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Père Maxime Massalitine
Le 7 janvier 2018, le jour de la fête de la Nativité du Christ, le célèbre ascète et théologien français, l'archimandrite Placide Deseille, est parti vers le Seigneur.
Le 15 janvier marque le neuvième jour de sa mort. Le recteur de l'église de la Résurrection à Rabat, l'archiprêtre Maxime Massalitine partage ses souvenirs du père Placide, qu'il a rencontré à plusieurs reprises et dont il a traduit les œuvres en russe.
Un célèbre théologien et patrologue, l'archimandrite Placide Deseille vient de décéder en France. Une partie importante de son héritage littéraire n'a pas encore été traduite en russe. Plus connu chez nous comme fondateur de monastères athonites en France, le père Placide a vécu une vie étonnante.
Entré jeune homme dans la confrérie d'un monastère catholique, c'est déjà en homme mûr qu'il fit connaissance avec l’Orthodoxie et la reçut par le sacrement du baptême, à un âge auquel rares sont ceux qui se décident à un changement radical dans leur vie. Tout ceci, le père Placide l'a raconté à plusieurs reprises lors de ses conférences et l'a décrit en détail dans son autobiographie intitulée « Étapes d'un pèlerinage spirituel », publié dans une brochure séparée. Longtemps, cette brochure n'eut pas une large diffusion. On ne pouvait se la procurer qu'au monastère Saint-Antoine-le-Grand, fondé par lui dans le Vercors, ce massif préalpin situé entre Valence et Grenoble. Le starets ne souhaitait pas que ses écrits sur le catholicisme et le christianisme authentique ne blessent le cœur de ses anciens confrères dans la foi.
Le 7 janvier 2018, le jour de la fête de la Nativité du Christ, le célèbre ascète et théologien français, l'archimandrite Placide Deseille, est parti vers le Seigneur.
Le 15 janvier marque le neuvième jour de sa mort. Le recteur de l'église de la Résurrection à Rabat, l'archiprêtre Maxime Massalitine partage ses souvenirs du père Placide, qu'il a rencontré à plusieurs reprises et dont il a traduit les œuvres en russe.
Un célèbre théologien et patrologue, l'archimandrite Placide Deseille vient de décéder en France. Une partie importante de son héritage littéraire n'a pas encore été traduite en russe. Plus connu chez nous comme fondateur de monastères athonites en France, le père Placide a vécu une vie étonnante.
Entré jeune homme dans la confrérie d'un monastère catholique, c'est déjà en homme mûr qu'il fit connaissance avec l’Orthodoxie et la reçut par le sacrement du baptême, à un âge auquel rares sont ceux qui se décident à un changement radical dans leur vie. Tout ceci, le père Placide l'a raconté à plusieurs reprises lors de ses conférences et l'a décrit en détail dans son autobiographie intitulée « Étapes d'un pèlerinage spirituel », publié dans une brochure séparée. Longtemps, cette brochure n'eut pas une large diffusion. On ne pouvait se la procurer qu'au monastère Saint-Antoine-le-Grand, fondé par lui dans le Vercors, ce massif préalpin situé entre Valence et Grenoble. Le starets ne souhaitait pas que ses écrits sur le catholicisme et le christianisme authentique ne blessent le cœur de ses anciens confrères dans la foi.
Mes relations avec l'archimandrite Placide ont commencé en 2003, lorsque, avec un groupe de jeunes Russes, j'ai visité les deux monastères athonites fondés par lui en France. Nous visitâmes le couvent pour femmes de Solan, puis la principale dépendance du monastère de Simonopetra, le monastère pour hommes Saint-Antoine-le-Grand.
Dans les deux monastères, le père fondateur nous reçut lui-même. Débordant de la joie de cette double rencontre, j'ai demandé au starets de prier pour que je revienne au monastère Saint-Antoine-le-Grand. Un an plus tard, à la fin de ma deuxième année au séminaire de la Sainte Rencontre, je vins en vacances d'été au monastère Saint-Antoine-le-Grand et m'installai dans son hôtellerie. J'eus la chance de me plonger totalement dans la vie du monastère. Avec la confrérie, je travaillai dans diverses obédiences de l'économie monastique, je chantai dans le chœur lors de la liturgie quotidienne en français, j'étudiai le chant byzantin. Alors, dans le monastère, je fis connaissance avec des évêques, des prêtres et des laïcs de différentes nationalités qui venaient rencontrer le père Placide pour des entretiens spirituels, afin de participer à la vie du monastère ne serait-ce que pour un peu de temps.
Je voudrais souligner un caractère très important de ce monastère.
Il a été créé par des moines français qui cherchaient de tout leur cœur la vérité de la connaissance de Dieu. Et ce désir se transmet à toute personne, quelle que soit sa nationalité, qui visite le monastère dans ce but. Il n'est donc pas étonnant qu'en quelques semaines de séjour dans ce monastère francophone j'aie pu y rencontrer non seulement des Français ou des ressortissants de pays orthodoxes, mais aussi des Allemands, des Portugais, des Hongrois, des Canadiens et d'autres. Ils venaient dans ce monastère lointain avec une soif spirituelle authentique, que pouvaient étancher le père Placide et l'atmosphère même de ce petit « morceau d'Athos » miraculeusement arrivé sur la terre de France.
Je me souviens qu'un jour, lors d'une conversation avec moi, André Nicolaievitch Lossky avait appelé le père Placide « un saint vivant ». Beaucoup de gens le considéraient ainsi et se rendaient à son monastère en famille. Les dimanches, après la liturgie et le repas pris en commun, le monastère du Vercors s'emplissait de cris d'enfants. Les parents amenaient leurs enfants au starets, afin que sa bénédiction et son amour reposent sur eux.
Dans les deux monastères, le père fondateur nous reçut lui-même. Débordant de la joie de cette double rencontre, j'ai demandé au starets de prier pour que je revienne au monastère Saint-Antoine-le-Grand. Un an plus tard, à la fin de ma deuxième année au séminaire de la Sainte Rencontre, je vins en vacances d'été au monastère Saint-Antoine-le-Grand et m'installai dans son hôtellerie. J'eus la chance de me plonger totalement dans la vie du monastère. Avec la confrérie, je travaillai dans diverses obédiences de l'économie monastique, je chantai dans le chœur lors de la liturgie quotidienne en français, j'étudiai le chant byzantin. Alors, dans le monastère, je fis connaissance avec des évêques, des prêtres et des laïcs de différentes nationalités qui venaient rencontrer le père Placide pour des entretiens spirituels, afin de participer à la vie du monastère ne serait-ce que pour un peu de temps.
Je voudrais souligner un caractère très important de ce monastère.
Il a été créé par des moines français qui cherchaient de tout leur cœur la vérité de la connaissance de Dieu. Et ce désir se transmet à toute personne, quelle que soit sa nationalité, qui visite le monastère dans ce but. Il n'est donc pas étonnant qu'en quelques semaines de séjour dans ce monastère francophone j'aie pu y rencontrer non seulement des Français ou des ressortissants de pays orthodoxes, mais aussi des Allemands, des Portugais, des Hongrois, des Canadiens et d'autres. Ils venaient dans ce monastère lointain avec une soif spirituelle authentique, que pouvaient étancher le père Placide et l'atmosphère même de ce petit « morceau d'Athos » miraculeusement arrivé sur la terre de France.
Je me souviens qu'un jour, lors d'une conversation avec moi, André Nicolaievitch Lossky avait appelé le père Placide « un saint vivant ». Beaucoup de gens le considéraient ainsi et se rendaient à son monastère en famille. Les dimanches, après la liturgie et le repas pris en commun, le monastère du Vercors s'emplissait de cris d'enfants. Les parents amenaient leurs enfants au starets, afin que sa bénédiction et son amour reposent sur eux.
Le monastère Saint-Antoine-le-Grand /situé à Saint-Laurent en Royans/, dépendance en France du monastère Simonopetra du Mont Athos, dans le massif du Vercors.
A mon retour en Russie, je me suis rendu compte que ma relation avec le père Placide ne faisait que commencer.
J'ai continué à lire ses livres, à écouter ses homélies, qui m'avaient profondément touché lors des offices au monastère Saint-Antoine-le-Grand. Pour la première fois de ma vie, j'avais véritablement senti qu'une homélie ou un office dans une langue étrangère pouvaient être tout aussi proche du cœur d'un chrétien de n'importe quelle nationalité, parce qu'ils sont faits dans le même esprit et la même vérité (Jean 4, 24), que dans sa propre Eglise orthodoxe locale. Au séminaire de la Sainte Rencontre, sous la direction de notre professeur de français, nous nous entraînions, avec d'autres étudiants, à la traduction des textes du père Placide.
Plus tard, lors d'un voyage d'études en France, je suis venu lui rendre visite. Lors de cette rencontre, ce n'est pas seulement les conversations personnelles qui étaient précieuses. C'étaient aussi les rencontres que le père Placide organisait pour les moines et les groupes de visiteurs, ce que l'on appelle les synaxes, au cours desquelles le starets présentait tel ou tel thème de l'enseignement de la foi orthodoxe ou de la vie spirituelle.
Parfois, il consacrait une causerie à l'Église russe et au rôle important qu'elle aurait à jouer ces derniers temps. Il était étonnant d'entendre cela de la part d'un homme qui n'avait jamais pu mettre les pieds en Russie. On sentait qu'il éprouvait toujours un vif lien spirituel avec elle. Au cours de l'année du millénaire du baptême de la Russie, le père Placide posa la première pierre de l'église principale du monastère Saint-Antoine-le-Grand, la dédiant à un saint russe récemment canonisé, Saint Silouane du Mont Athos. Le starets avait toujours suivi avec intérêt la renaissance de la vie orthodoxe dans notre pays. Je n'ai jamais entendu de lui ce scepticisme à l'égard de la Russie et de l'Église russe qui sont si répandus en Occident.
Je me souviens de notre rencontre en été 2011 dans les murs du couvent de la Protection de la Mère de Dieu à Solan, dont le père Placide était aussi l’higoumène.
Le starets était alors très occupé et entouré de dizaines de personnes venues au congrès des paroisses orthodoxes du sud de la France. Il trouva cependant le temps de parler avec moi. A cette époque, j'avais été affecté dans un pays complètement inconnu pour moi, le Maroc. Or, le père Placide connaissait la situation au Maghreb non par ouï-dire, puisqu'il avait passé plusieurs années en Algérie, déjà en tant que moine. Son soutien fut alors très important pour moi. S'adressant aux célèbres prêtres du sud de la France, assis à sa table, il me désigna, assis à côté de lui sur les talons pour notre entretien : « Celui-ci est animé du même esprit que nous ». A cette table étaient assis des représentants de diverses juridictions orthodoxes, qui ne trouvaient pas toujours de compréhension mutuelle entre eux. Et, semble-t-il, j'étais parmi eux le seul prêtre du patriarcat de Moscou. La parole du vieil homme était porteuse de paix, de réconfort et élevait l'esprit. C'est ainsi que je me souviens de lui.
Il y a deux ans, avant la liturgie du dimanche dans l'église de la Résurrection du Christ à Rabat, je prélevais les parcelles lors de la préparation et je vis sur une liste le nom de l'archimandrite Placide. Après l'office, en sortant du sanctuaire, je vis dans l'église une femme inconnue qui continuait à prier. M'approchant d'elle, je lui demandai si ce n'était pas d'elle que venait la liste comportant le nom du starets. La femme, surprise, répondit par l'affirmative.
Elle s'avéra être roumaine, fille spirituelle de l'archimandrite. Le jour du décès du starets je l'ai appelée à Grenoble, et elle m'a parlé du mystère de sa mort. Le Seigneur lui avait permis de passer auprès du lit de mort de son père spirituel les derniers jours de sa vie terrestre. Le 5 janvier, le père Placide fut emmené dans un hôpital voisin, dans la petite ville de Roman-sur-Isère. Dans la soirée du même jour, il tomba dans le coma. Le lendemain, par les prières de ses enfants spirituels, le starets revint à lui, comme cela apparut, pour leur faire ses adieux.
Beaucoup eurent le temps de se rendre à son chevet ce jour-là. Et le dimanche 7 janvier, au moment où l'Eglise russe célèbre solennellement la Nativité du Christ, l'Enfant Dieu, après la lecture du canon pour la séparation de l'âme du corps, le père Placide mourut paisiblement, dans la 92e année de sa vie. Dans la soirée, son corps fut transporté au monastère qu'il avait lui-même fondé.
Que le Royaume céleste soit à lui !
«Кусочек Афона» на французской земле Памяти схиархимандрита Плакиды (Дезея)
Священник Максим Массалитин
Pravoslavie ru Traduction Marie et André Donzeau
A mon retour en Russie, je me suis rendu compte que ma relation avec le père Placide ne faisait que commencer.
J'ai continué à lire ses livres, à écouter ses homélies, qui m'avaient profondément touché lors des offices au monastère Saint-Antoine-le-Grand. Pour la première fois de ma vie, j'avais véritablement senti qu'une homélie ou un office dans une langue étrangère pouvaient être tout aussi proche du cœur d'un chrétien de n'importe quelle nationalité, parce qu'ils sont faits dans le même esprit et la même vérité (Jean 4, 24), que dans sa propre Eglise orthodoxe locale. Au séminaire de la Sainte Rencontre, sous la direction de notre professeur de français, nous nous entraînions, avec d'autres étudiants, à la traduction des textes du père Placide.
Plus tard, lors d'un voyage d'études en France, je suis venu lui rendre visite. Lors de cette rencontre, ce n'est pas seulement les conversations personnelles qui étaient précieuses. C'étaient aussi les rencontres que le père Placide organisait pour les moines et les groupes de visiteurs, ce que l'on appelle les synaxes, au cours desquelles le starets présentait tel ou tel thème de l'enseignement de la foi orthodoxe ou de la vie spirituelle.
Parfois, il consacrait une causerie à l'Église russe et au rôle important qu'elle aurait à jouer ces derniers temps. Il était étonnant d'entendre cela de la part d'un homme qui n'avait jamais pu mettre les pieds en Russie. On sentait qu'il éprouvait toujours un vif lien spirituel avec elle. Au cours de l'année du millénaire du baptême de la Russie, le père Placide posa la première pierre de l'église principale du monastère Saint-Antoine-le-Grand, la dédiant à un saint russe récemment canonisé, Saint Silouane du Mont Athos. Le starets avait toujours suivi avec intérêt la renaissance de la vie orthodoxe dans notre pays. Je n'ai jamais entendu de lui ce scepticisme à l'égard de la Russie et de l'Église russe qui sont si répandus en Occident.
Je me souviens de notre rencontre en été 2011 dans les murs du couvent de la Protection de la Mère de Dieu à Solan, dont le père Placide était aussi l’higoumène.
Le starets était alors très occupé et entouré de dizaines de personnes venues au congrès des paroisses orthodoxes du sud de la France. Il trouva cependant le temps de parler avec moi. A cette époque, j'avais été affecté dans un pays complètement inconnu pour moi, le Maroc. Or, le père Placide connaissait la situation au Maghreb non par ouï-dire, puisqu'il avait passé plusieurs années en Algérie, déjà en tant que moine. Son soutien fut alors très important pour moi. S'adressant aux célèbres prêtres du sud de la France, assis à sa table, il me désigna, assis à côté de lui sur les talons pour notre entretien : « Celui-ci est animé du même esprit que nous ». A cette table étaient assis des représentants de diverses juridictions orthodoxes, qui ne trouvaient pas toujours de compréhension mutuelle entre eux. Et, semble-t-il, j'étais parmi eux le seul prêtre du patriarcat de Moscou. La parole du vieil homme était porteuse de paix, de réconfort et élevait l'esprit. C'est ainsi que je me souviens de lui.
Il y a deux ans, avant la liturgie du dimanche dans l'église de la Résurrection du Christ à Rabat, je prélevais les parcelles lors de la préparation et je vis sur une liste le nom de l'archimandrite Placide. Après l'office, en sortant du sanctuaire, je vis dans l'église une femme inconnue qui continuait à prier. M'approchant d'elle, je lui demandai si ce n'était pas d'elle que venait la liste comportant le nom du starets. La femme, surprise, répondit par l'affirmative.
Elle s'avéra être roumaine, fille spirituelle de l'archimandrite. Le jour du décès du starets je l'ai appelée à Grenoble, et elle m'a parlé du mystère de sa mort. Le Seigneur lui avait permis de passer auprès du lit de mort de son père spirituel les derniers jours de sa vie terrestre. Le 5 janvier, le père Placide fut emmené dans un hôpital voisin, dans la petite ville de Roman-sur-Isère. Dans la soirée du même jour, il tomba dans le coma. Le lendemain, par les prières de ses enfants spirituels, le starets revint à lui, comme cela apparut, pour leur faire ses adieux.
Beaucoup eurent le temps de se rendre à son chevet ce jour-là. Et le dimanche 7 janvier, au moment où l'Eglise russe célèbre solennellement la Nativité du Christ, l'Enfant Dieu, après la lecture du canon pour la séparation de l'âme du corps, le père Placide mourut paisiblement, dans la 92e année de sa vie. Dans la soirée, son corps fut transporté au monastère qu'il avait lui-même fondé.
Que le Royaume céleste soit à lui !
«Кусочек Афона» на французской земле Памяти схиархимандрита Плакиды (Дезея)
Священник Максим Массалитин
Pravoslavie ru Traduction Marie et André Donzeau
Photo: L'archimandrite Placide (Deseille), le prêtre Maxime Massalitine avec sa femme Vera et sa fille. A gauche se tient Mère Elisabeth, épouse de l'archiprêtre Michel Eriar-Dubreuil d'Aix-en-Provence. Solan, 2011
Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 22 Janvier 2018 à 08:55
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