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C’est avec une infinie tristesse que je vous annonce le décès de mon père Николай Александрович, le 27 février dernier, à Salies de Béarn. Il était né le 18 décembre 1916 à Moscou, loin de la propriété familiale de Чехово (Tchehovo) dans le gouvernement de Kovno (act. Kaunas en Lithuanie) que son père, maréchal de la noblesse dans cette province, voisin et ami de Stolypine, puis dernier président de Varsovie, avait laissée à la disposition du Haut-Commandement russe afin de mieux défendre la ligne du front qui n’en était pas très éloignée.
Une vieille photo jaunie témoigne du passage de mon père – encore enfant – à Antigone où il était sous la protection du père Tseretelli, qu’il devait retrouver plus tard comme recteur de la paroisse de Biarritz. Très tôt orphelin de son père et souvent éloigné de sa mère qui essayait de récupérer quelques lambeaux de la propriété dans la Lithuanie indépendante de l’entre-deux-guerres afin de faire subsister la famille, mon père fut d’abord élevé par sa sœur aînée Lydie – devenue plus tard Princesse Nicolas Galitzine, et qui se sera tant dévouée au profit des prisonniers russes pendant la guerre de 39-45 et ceux qui redoutaient de retourner dans l’univers stalinien…
Photo: Allemagne 1956
Une vieille photo jaunie témoigne du passage de mon père – encore enfant – à Antigone où il était sous la protection du père Tseretelli, qu’il devait retrouver plus tard comme recteur de la paroisse de Biarritz. Très tôt orphelin de son père et souvent éloigné de sa mère qui essayait de récupérer quelques lambeaux de la propriété dans la Lithuanie indépendante de l’entre-deux-guerres afin de faire subsister la famille, mon père fut d’abord élevé par sa sœur aînée Lydie – devenue plus tard Princesse Nicolas Galitzine, et qui se sera tant dévouée au profit des prisonniers russes pendant la guerre de 39-45 et ceux qui redoutaient de retourner dans l’univers stalinien…
Photo: Allemagne 1956
Etudes secondaires au collège de Pont-Levoy (près de Blois) puis droit et lettres à l’Université de Paris, ainsi que le chinois à Langues-O. Pendant la première partie du conflit, mon père fit la très dure campagne de Narvik et Namsos (Norvège) dans les Chasseurs alpins du général Béthouart avant d’être évacué en Ecosse puis en Angleterre.
A la Libération, Mme Zernoff recrute le jeune diplômé des facultés de droit et de lettres pour faire la tournée des camps où avaient été injustement enfermés, souvent sous de faux prétextes, nombre de Russes blancs – il suffisait à l’époque d’avoir été entendu s’exprimer dans une langue étrangère (quelle différence entre le russe et l’allemand ?) et d’être blond… Beaucoup ont été ainsi sauvés par Mme Zernoff et mon père, en particulier du terrible camp de Drancy. Après son mariage avec ma mère, descendante d’une lignée d’atamans des Cosaques du Kouban (le dernier ataman, Michel Babitch, atrocement torturé et assassiné par les bolchéviques en 1918), et ma naissance un an plus tard, la famille a suivi mon père en Allemagne où il a mis en place et dirigé pendant plusieurs années (à Solingen, Francfort, Munich et Hanovre, etc.) les maisons destinées à l’accueil des nombreux réfugiés soviétiques fuyant par la zone d'occupation soviétique en Allemagne de l'Est. Elles avaient été créées à l’initiative de l’association « Friends of fighters for russian freedom » (FFRF) fondée par la sœur aînée de mon père, évoquée précédemment.
Notre retour en France – correspondant à l’avènement du général De Gaulle - voit mon père obliquer vers l’industrie privée pour éviter une mission dans la Chine de Mao que lui auraient valu ses connaissances de la langue chinoise (rares à l’époque). Mais très tôt, c’est toute la famille qui est mobilisée – auprès de son dynamique recteur, le père Alexis Kniazeff - dans la restauration de la paroisse de l’Institut Saint-Serge à Paris, dont mon père avait été élu membre du conseil paroissial. Je me souviens des heures passées à tirer sur une vieille ronéo le bulletin de Saint-Serge, entièrement rédigé par mon père qui le distribuait ensuite à la sortie de la liturgie, souvent dans le froid, afin d’attirer et d’impliquer le plus de monde possible dans la restauration de l’église et de l’institut. On peut dire que mon père est resté fidèle à cette mission jusqu’à ses dernières limites physiques, polycopiant et photocopiant à tour de bras des documents et des cours de l’institut afin de les envoyer en URSS, puis en Russie, et en accueillant plus d’un étudiant lorsque les premiers arrivèrent à l’aube de la Perestroïka.
Depuis cinq ans, j’avais fait quitter à mon père sa maison de Normandie pour un climat pyrénéen plus favorable où il a pu bénéficier des meilleurs soins dus à son grand âge, et d’une présence familiale rapprochée.
Il n’est de meilleur témoignage que celui d’une amie de mon épouse, qui l’avait encore connu à Saint-Serge : « Je me rappelle votre père, comme un pilier de l'église, un témoin lumineux de l'Église et de la culture russe ».
L’office suivi de l’enterrement dans la tombe familiale aura lieu vendredi 2 mars à 16 h à l’église du cimetière russe de Sainte-Geneviève-des-Bois.
Alexandre de Miller de La Cerda
Consul (h) de Russie à Biarritz
A la Libération, Mme Zernoff recrute le jeune diplômé des facultés de droit et de lettres pour faire la tournée des camps où avaient été injustement enfermés, souvent sous de faux prétextes, nombre de Russes blancs – il suffisait à l’époque d’avoir été entendu s’exprimer dans une langue étrangère (quelle différence entre le russe et l’allemand ?) et d’être blond… Beaucoup ont été ainsi sauvés par Mme Zernoff et mon père, en particulier du terrible camp de Drancy. Après son mariage avec ma mère, descendante d’une lignée d’atamans des Cosaques du Kouban (le dernier ataman, Michel Babitch, atrocement torturé et assassiné par les bolchéviques en 1918), et ma naissance un an plus tard, la famille a suivi mon père en Allemagne où il a mis en place et dirigé pendant plusieurs années (à Solingen, Francfort, Munich et Hanovre, etc.) les maisons destinées à l’accueil des nombreux réfugiés soviétiques fuyant par la zone d'occupation soviétique en Allemagne de l'Est. Elles avaient été créées à l’initiative de l’association « Friends of fighters for russian freedom » (FFRF) fondée par la sœur aînée de mon père, évoquée précédemment.
Notre retour en France – correspondant à l’avènement du général De Gaulle - voit mon père obliquer vers l’industrie privée pour éviter une mission dans la Chine de Mao que lui auraient valu ses connaissances de la langue chinoise (rares à l’époque). Mais très tôt, c’est toute la famille qui est mobilisée – auprès de son dynamique recteur, le père Alexis Kniazeff - dans la restauration de la paroisse de l’Institut Saint-Serge à Paris, dont mon père avait été élu membre du conseil paroissial. Je me souviens des heures passées à tirer sur une vieille ronéo le bulletin de Saint-Serge, entièrement rédigé par mon père qui le distribuait ensuite à la sortie de la liturgie, souvent dans le froid, afin d’attirer et d’impliquer le plus de monde possible dans la restauration de l’église et de l’institut. On peut dire que mon père est resté fidèle à cette mission jusqu’à ses dernières limites physiques, polycopiant et photocopiant à tour de bras des documents et des cours de l’institut afin de les envoyer en URSS, puis en Russie, et en accueillant plus d’un étudiant lorsque les premiers arrivèrent à l’aube de la Perestroïka.
Depuis cinq ans, j’avais fait quitter à mon père sa maison de Normandie pour un climat pyrénéen plus favorable où il a pu bénéficier des meilleurs soins dus à son grand âge, et d’une présence familiale rapprochée.
Il n’est de meilleur témoignage que celui d’une amie de mon épouse, qui l’avait encore connu à Saint-Serge : « Je me rappelle votre père, comme un pilier de l'église, un témoin lumineux de l'Église et de la culture russe ».
L’office suivi de l’enterrement dans la tombe familiale aura lieu vendredi 2 mars à 16 h à l’église du cimetière russe de Sainte-Geneviève-des-Bois.
Alexandre de Miller de La Cerda
Consul (h) de Russie à Biarritz
Rédigé par Parlons d'orthodoxie le 29 Février 2012 à 10:30
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