Pourquoi l'URSS ne put détruire la religion
La révolution en Russie commença en février. Le tsar, à ce moment-là, avait déjà abdiqué. Le gouvernement provisoire bourgeois avait commencé à prendre le pouvoir entre ses mains.

Mais c'est l'occupation des bâtiments gouvernementaux à Petrograd, le 25 octobre 1917, par l'armée rouge des bolcheviks, qui marque le véritable début de l'ère communiste. C'est précisément à ce moment de l'histoire du monde qu'une expérience sans précédent commença : une tentative systématique, soutenue par l'État, de détruire la religion. « L'athéisme militant n'est pas un détail, pas un phénomène périphérique, pas un effet secondaire de la politique communiste, mais son principal moteur », écrivait Alexandre Soljenitsyne. Lénine comparait la religion à une maladie vénérienne.

Quelques semaines seulement après la révolution d'Octobre fut créé le commissariat du Peuple à l'éducation, dont la tâche était de supprimer toute référence à la religion des programmes scolaires. Au cours des années suivantes, les églises et les monastères du pays furent démolis ou transformés en toilettes publiques. Leurs terres et leurs biens furent saisis. Des milliers d'évêques, de moines et de prêtres furent systématiquement assassinés par les services spéciaux. Des détachements spéciaux de propagande furent constitués, par exemple, l'Union des militants athées. Des intellectuels chrétiens furent arrêtés et envoyés dans les camps.

Pourquoi l'URSS ne put détruire la religion
Dans le pays des Soviets, on croyait au début que lorsque l'Eglise serait privée de pouvoir, la religion mourrait rapidement. Quand cela ne se produisit pas, les efforts pour la combattre doublèrent d'intensité. Pendant les purges staliniennes de 1936-1937, des dizaines de milliers de prêtres furent arrêtés et fusillés. Sous Khrouchtchev, il était illégal de donner une éducation religieuse à ses enfants. De 1917 jusqu'à la période de la perestroïka, dans les années 1980, plus la religion résistait, plus les Soviétiques imaginaient des moyens ingénieux pour la détruire. Aujourd'hui, les églises orthodoxes de Russie sont pleines de paroissiens. Dès que l'étau s'est desserré, des millions de croyants sont retournés à l'Eglise.

L'expérience soviétique, de toute évidence, a échoué.

Si vous voulez savoir pourquoi, il n'y a rien de mieux que d'aller la semaine prochaine au London British Museum, où s'ouvre l'exposition « Vivre avec des dieux » (Living with gods). En même temps que la série produite par BBC Radio 4, cette exposition décrit les milliers de façons de manifester sa foi, en utilisant des sujets religieux pour examiner comment les gens croient et non en quoi ils croient. La première proposition de la présentation du British Museum est très éloquente : « La pratique et l'expérience de la foi sont naturelles pour tous les peuples ». Des drapeaux de prière à la casquette portant l'emblème du club Leeds United, des cruches d'eau aux charriots cérémoniels, cette exposition raconte l'histoire de l'aspiration immanentee et passionnée de l'humanité de trouver une signification au monde, au-delà de ce qui est purement empirique.

Pourquoi l'URSS ne put détruire la religion
Jill Cook, le commissaire de l'exposition, se souvient d'une visite à la cathédrale de Kazan à Saint-Pétersbourg, à l'époque précédant la « glasnost », quand il y avait là un musée de l'athéisme. Un des éléments de l'exposition était une image du Christ, confectionnée en velours et en soie, au dos d'un vêtement sacerdotal fabriqué en 1989. L'auteur de cette image n'avait pas d'autres vêtements sacerdotaux pour travailler, tous avaient été détruits à cette époque. Il ne restait que ceux utilisés pour ridiculiser le christianisme dans le musée de l'athéisme. Ce qui était autrefois un objet de moquerie s'était transformé en objet de culte. Les offices, dans la cathédrale de Kazan ont recommencé en 1992.

L'avant-dernier objet de l'exposition est une affiche de 1975, qui montre un cosmonaute moqueur dans l'espace, déclarant qu'il n'y a pas de dieu. Au-dessous de lui, sur la Terre, est représentée une église en ruine. Cette affiche date de l'époque de ce que l'on a appelé l'athéisme scientifique.


Pourquoi l'URSS ne put détruire la religion
Mais dans cette exposition un autre objet mérite d'être vu.

Dans un coin, dans un coffre de verre, se trouvent des petits modèles de bateaux avec des allumettes brûlées représentant des personnes serrées les unes contre les autres. Et deux petites chemises, utilisées comme linceul pour des enfants noyés. A côté d'eux a été placée une petite croix faite du bois d'un bateau qui avait coulé le 11 octobre 2013 au large de l'île italienne de Lampedusa. A bord de ce bateau se trouvaient des réfugiés somaliens et érythréens qui tentaient d'échapper à la pauvreté et à la persécution. Francesco Tuccio, un charpentier de Lampedusa, voulait désespérément faire pour eux quelque chose qui soit dans ses possibilités. Il fit ce qu'il savait faire et confectionna pour eux une croix. Certainement, comme l'illustre charpentier avant lui. Cette exposition démontre que rien, ni les décennies de propagande, ni la terreur d'État, ne peut étouffer cet instinct dans la vie des hommes.

Giles Fraser Почему СССР не смог уничтожить религию Bogoslov ru Traduit du russe par Marie et André Donzeau

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 14 Janvier 2018 à 20:34 | -4 commentaire | Permalien



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