Plateforme libre de discussion
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V.G.
Deux discussions que Mgr Antoine de Souroge (1) a eues avec ses paroissiens le 30 décembre 1989 lors d’une veillée de préparation à la confession avant la fête de Noël
Se débarrasser des anciens péchés pour faire de la place aux nouveaux
Prendre pour thème de discussion la confession avec des personnes qui sont nées et qui ont été éduquées dans l'Église, pourrait sembler complètement inutile. D'un autre côté quand on constate jusqu'à quel point certaines confessions peuvent être stériles (je parle ici des vôtres comme des miennes), il apparaît encore une fois nécessaire de se poser la question: qu'est que la confession ? Pourquoi nous confesser, à quoi cela nous oblige-t-il, et où cela peut-il nous mener ?
Quand je repense aux confessions, les miennes et celles que j'ai entendues, trop souvent la confession se réduit à un moment où nous désirons nous débarrasser d'un lourd fardeau, du poids pénible de nos anciens péchés afin que la vie devienne plus facile à vivre. Si je reprends les paroles d'un petit garçon à qui sa sœur demandait ce qui lui donnait envie de se confesser: « se débarrasser des anciens péchés pour faire de la place aux nouveaux... » Je pense que cela ne concerne pas seulement ce jeune garçon, mais aussi beaucoup d'adultes. On vient à la confession pour alléger sa conscience, pour se libérer du poids du passé; mais qui vient pour faire sincèrement la paix avec Dieu, avec sa propre conscience et avec ses proches, en finir définitivement avec le passé et commencer réellement une nouvelle vie ?
Deux discussions que Mgr Antoine de Souroge (1) a eues avec ses paroissiens le 30 décembre 1989 lors d’une veillée de préparation à la confession avant la fête de Noël
Se débarrasser des anciens péchés pour faire de la place aux nouveaux
Prendre pour thème de discussion la confession avec des personnes qui sont nées et qui ont été éduquées dans l'Église, pourrait sembler complètement inutile. D'un autre côté quand on constate jusqu'à quel point certaines confessions peuvent être stériles (je parle ici des vôtres comme des miennes), il apparaît encore une fois nécessaire de se poser la question: qu'est que la confession ? Pourquoi nous confesser, à quoi cela nous oblige-t-il, et où cela peut-il nous mener ?
Quand je repense aux confessions, les miennes et celles que j'ai entendues, trop souvent la confession se réduit à un moment où nous désirons nous débarrasser d'un lourd fardeau, du poids pénible de nos anciens péchés afin que la vie devienne plus facile à vivre. Si je reprends les paroles d'un petit garçon à qui sa sœur demandait ce qui lui donnait envie de se confesser: « se débarrasser des anciens péchés pour faire de la place aux nouveaux... » Je pense que cela ne concerne pas seulement ce jeune garçon, mais aussi beaucoup d'adultes. On vient à la confession pour alléger sa conscience, pour se libérer du poids du passé; mais qui vient pour faire sincèrement la paix avec Dieu, avec sa propre conscience et avec ses proches, en finir définitivement avec le passé et commencer réellement une nouvelle vie ?
Cette question chacun de nous doit se la poser, pas seulement pour se faire un avis, mais pour s'accuser réellement si, comme le petit garçon, il vient déposer un lourd fardeau pour que la vie aille mieux, et non pas pour en finir avec les péchés du passé. Quand je parle des « péchés du passé », je ne parle pas de tout ce qu'il nous reste à corriger – pour cela il faut une vie entière – mais je parle de tous nos péchés qui nous apparaissent comme tels, de tout notre péché qui est arrivé à notre conscience, qui nous apparaît dans toute sa laideur, qui nous est devenu insupportable et que nous voulons écarter; pas seulement mettre de côté, mais détruire pour qu'il ne soit plus.
Qui d'entre nous a un jour vécu une telle expérience?
A ce propos, il y a un passage remarquable dans l'œuvre de saint Barsanuphe le Grand (2), qui nous met très justement en accusation et qui dit que si l'on se rend réellement compte de l'horreur d'un péché particulier qui nous retenait prisonnier, si réellement nous rejetons du tréfonds de notre âme l'horreur que ce péché y a instillé, alors arrive le moment où nous pouvons pleurer sur ce péché, pas seulement les larmes de nos yeux, mais les larmes de notre cœur par un repentir de tout notre être: il nous apparaît alors clairement que nous ne pourrons plus jamais retourner à ce péché. Saint Barsanuphe dit que c'est seulement alors que nous pouvons considérer que notre péché est pardonné. Il dit même plus: si nous avons vécu cette expérience, si la vision de notre péché dans toute son horreur nous a réellement retournés, si elle nous en a dégoûtés au point que nous ressentons en nous-mêmes que jamais plus nous ne pourrons y revenir, alors nous pouvons nous considérer comme pardonnés par Dieu. Et il ajoute que ce n'est plus la peine d'aller confesser ce péché à un prêtre, car Dieu l'a déjà pardonné, purifié et guéri et qu'il ne peut plus y avoir d'autre pardon, purification et guérison. Se pose ici une seconde question. Qui d'entre nous a un jour vécu une telle expérience vis à vis d'un quelconque de ses péchés, qui a vu ce péché comme le meurtre de son âme, comme le meurtre de son prochain, comme sa froide et consciente participation au meurtre du Christ ? C'est une question que nous ne pouvons éluder, car nous revenons régulièrement nous confesser des mêmes péchés. Comment se fait-il que nous ne les ressentions pas ? Qu'ils comptent si peu pour nous ? Que, si nous comprenons vraiment ce qu'est le péché, nous puissions y revenir aussi froidement ?
Nous choisissons le péché:
L'apôtre Paul nous dit que la question n'est pas dans l'importance du péché, mais que nous choisissions le péché. Je pense que l'on pourrait se représenter les choses de la manière suivante: il y a une rivière qui coule entre la domaine du Christ et le domaine de Satan. Par endroit elle est étroite, peu profonde et on peut la traverser à pied, à d'autres endroits elle est profonde, rapide et large. La question n'est pas de savoir où nous avons traversé, mais de comprendre que nous avons quitté le domaine du Royaume du Christ et de Dieu pour le domaine de Satan. C'est à la fois aussi simple et terrible. Le péché – c'est le choix entre Dieu et Son adversaire, entre la vie et la mort, entre la lumière et les ténèbres. Ce n'est peut-être pas un choix partisan, dans la mesure où on ne dit pas: « Oui, je rejette Dieu et Son Christ et je choisis le camp de Son adversaire. » Mais c'est un choix dans la mesure où je me dis: « Ça passera ! Ce n'est pas grave ! Je me donne un répit, je passe pour un temps dans l'autre camp, là où ma conscience ne me fera pas de reproches, parce que dans le camp des ténèbres, je ne me verrai pas aussi sombre que si j'étais encore dans le camp de la lumière. »
Voilà en quoi consiste le péché; et à chaque fois que nous y succombons, nous nous mettons dans cette situation. Parfois par méchanceté et sciemment contre Dieu, parfois involontairement ou par insouciance. On se dit que l'on « pourra toujours revenir ! » Oui, on pourra revenir, mais ce n'est pas si facile; oui, on peut retraverser la rivière, à la nage ou parfois à pied, mais dans quel état sommes-nous alors ? Nous ne revenons pas tels que nous étions avant de nous couper de notre amitié avec Dieu et de rejoindre le camp de Ses adversaires, de Ses meurtriers; nous revenons éclaboussés, salis, blessés et parfois très profondément. La confession, celle dont nous parlons aujourd'hui, consiste à revenir à la vie: pas juste se laver, prendre une douche et sentir que le passé n'est plus; non – nous parlons maintenant de réconciliation. Pas une simple réconciliation avec sa conscience: « Je ne suis plus le même, je ne veux plus de ça et je ne le ferai plus ! » – une réconciliation avec Dieu, que nous avons trahi, que nous avons abandonné pour nous choisir un autre maître, un autre pasteur.
Titres intermédiaires et notes de VG
Notes:
(1) Mgr Antoine (Bloom) métropolite de Souroge (1914-2003), Anthony de Sourozh en anglais, a gouverné le diocèse du patriarcat de Moscou qui recouvre la grande Bretagne pendant 45 ans (1957-2003). Théologien réputé, il fut une figure importante de l'Orthodoxie contemporaine surtout en Oxcident. Il fut en effet, avec Mgr Basile (Krivocheine) de Bruxelles l'un des prélats de l'émigration qui restèrent toujours fidèle à leur Eglise – le patriarcat de Moscou, malgré toutes les difficultés que cela représentait. Tous deux trouvaient en effet impensable de choisir la facilité en condamnant ceux qui étaient obligés de subir le joug athée pour rester avec leurs ouailles (cela ressort parfaitement d'un dialogue entre les deux prélats) Mgr Antoine a aussi été un grand missionnaire qui a beaucoup fait pour le développement de son diocèse en particulier par la conversion de nombreux Anglican.
(2) La Correspondance des saints BARSANUPHE LE GRAND et JEAN DE GAZA (VIe siècle) est un ouvrage précieux de conseils spirituels et pratiques pour les moines. 850 lettres nous sont parvenues, elles sont éditées en français aux Sources chrétiennes en cinq volumes
Source "Paroisse orthodoxe de Compiègne" et suite en PDF
Qui d'entre nous a un jour vécu une telle expérience?
A ce propos, il y a un passage remarquable dans l'œuvre de saint Barsanuphe le Grand (2), qui nous met très justement en accusation et qui dit que si l'on se rend réellement compte de l'horreur d'un péché particulier qui nous retenait prisonnier, si réellement nous rejetons du tréfonds de notre âme l'horreur que ce péché y a instillé, alors arrive le moment où nous pouvons pleurer sur ce péché, pas seulement les larmes de nos yeux, mais les larmes de notre cœur par un repentir de tout notre être: il nous apparaît alors clairement que nous ne pourrons plus jamais retourner à ce péché. Saint Barsanuphe dit que c'est seulement alors que nous pouvons considérer que notre péché est pardonné. Il dit même plus: si nous avons vécu cette expérience, si la vision de notre péché dans toute son horreur nous a réellement retournés, si elle nous en a dégoûtés au point que nous ressentons en nous-mêmes que jamais plus nous ne pourrons y revenir, alors nous pouvons nous considérer comme pardonnés par Dieu. Et il ajoute que ce n'est plus la peine d'aller confesser ce péché à un prêtre, car Dieu l'a déjà pardonné, purifié et guéri et qu'il ne peut plus y avoir d'autre pardon, purification et guérison. Se pose ici une seconde question. Qui d'entre nous a un jour vécu une telle expérience vis à vis d'un quelconque de ses péchés, qui a vu ce péché comme le meurtre de son âme, comme le meurtre de son prochain, comme sa froide et consciente participation au meurtre du Christ ? C'est une question que nous ne pouvons éluder, car nous revenons régulièrement nous confesser des mêmes péchés. Comment se fait-il que nous ne les ressentions pas ? Qu'ils comptent si peu pour nous ? Que, si nous comprenons vraiment ce qu'est le péché, nous puissions y revenir aussi froidement ?
Nous choisissons le péché:
L'apôtre Paul nous dit que la question n'est pas dans l'importance du péché, mais que nous choisissions le péché. Je pense que l'on pourrait se représenter les choses de la manière suivante: il y a une rivière qui coule entre la domaine du Christ et le domaine de Satan. Par endroit elle est étroite, peu profonde et on peut la traverser à pied, à d'autres endroits elle est profonde, rapide et large. La question n'est pas de savoir où nous avons traversé, mais de comprendre que nous avons quitté le domaine du Royaume du Christ et de Dieu pour le domaine de Satan. C'est à la fois aussi simple et terrible. Le péché – c'est le choix entre Dieu et Son adversaire, entre la vie et la mort, entre la lumière et les ténèbres. Ce n'est peut-être pas un choix partisan, dans la mesure où on ne dit pas: « Oui, je rejette Dieu et Son Christ et je choisis le camp de Son adversaire. » Mais c'est un choix dans la mesure où je me dis: « Ça passera ! Ce n'est pas grave ! Je me donne un répit, je passe pour un temps dans l'autre camp, là où ma conscience ne me fera pas de reproches, parce que dans le camp des ténèbres, je ne me verrai pas aussi sombre que si j'étais encore dans le camp de la lumière. »
Voilà en quoi consiste le péché; et à chaque fois que nous y succombons, nous nous mettons dans cette situation. Parfois par méchanceté et sciemment contre Dieu, parfois involontairement ou par insouciance. On se dit que l'on « pourra toujours revenir ! » Oui, on pourra revenir, mais ce n'est pas si facile; oui, on peut retraverser la rivière, à la nage ou parfois à pied, mais dans quel état sommes-nous alors ? Nous ne revenons pas tels que nous étions avant de nous couper de notre amitié avec Dieu et de rejoindre le camp de Ses adversaires, de Ses meurtriers; nous revenons éclaboussés, salis, blessés et parfois très profondément. La confession, celle dont nous parlons aujourd'hui, consiste à revenir à la vie: pas juste se laver, prendre une douche et sentir que le passé n'est plus; non – nous parlons maintenant de réconciliation. Pas une simple réconciliation avec sa conscience: « Je ne suis plus le même, je ne veux plus de ça et je ne le ferai plus ! » – une réconciliation avec Dieu, que nous avons trahi, que nous avons abandonné pour nous choisir un autre maître, un autre pasteur.
Titres intermédiaires et notes de VG
Notes:
(1) Mgr Antoine (Bloom) métropolite de Souroge (1914-2003), Anthony de Sourozh en anglais, a gouverné le diocèse du patriarcat de Moscou qui recouvre la grande Bretagne pendant 45 ans (1957-2003). Théologien réputé, il fut une figure importante de l'Orthodoxie contemporaine surtout en Oxcident. Il fut en effet, avec Mgr Basile (Krivocheine) de Bruxelles l'un des prélats de l'émigration qui restèrent toujours fidèle à leur Eglise – le patriarcat de Moscou, malgré toutes les difficultés que cela représentait. Tous deux trouvaient en effet impensable de choisir la facilité en condamnant ceux qui étaient obligés de subir le joug athée pour rester avec leurs ouailles (cela ressort parfaitement d'un dialogue entre les deux prélats) Mgr Antoine a aussi été un grand missionnaire qui a beaucoup fait pour le développement de son diocèse en particulier par la conversion de nombreux Anglican.
(2) La Correspondance des saints BARSANUPHE LE GRAND et JEAN DE GAZA (VIe siècle) est un ouvrage précieux de conseils spirituels et pratiques pour les moines. 850 lettres nous sont parvenues, elles sont éditées en français aux Sources chrétiennes en cinq volumes
Source "Paroisse orthodoxe de Compiègne" et suite en PDF
Rédigé par Vladimir GOLOVANOW le 17 Juin 2012 à 15:12
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