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Vera GAUFMAN
Le séminaire orthodoxe Sainte-Geneviève d’Épinay-sous-Sénart a ouvert ses portes il y a trois ans. L’établissement forme des prêtres pour les paroisses de l’église orthodoxe russe à l’étranger. Le Courrier de Russie est allé regarder derrière ses murs.
J’arrive à la station Brunoy vers midi, après trente minutes de RER depuis Châtelet. Dans cette ville de banlieue parisienne, personne ne connaît ni la rue Sainte Geneviève ni le séminaire orthodoxe. Jusqu’au chauffeur de bus qui pourtant passe devant chaque jour. Il faut dire que le lieu n’est pas évident à trouver : le séminaire est situé dans un ancien couvent auquel les gens ne font plus attention. En arrivant, on ne s’attend pas à entendre parler russe.
Chez les sœurs
Je suis accueillie par deux séminaristes, Victor Smirnov et Ion Dimitrov. Souriants, ils ne cessent de plaisanter. Pas vraiment l’image que l’on se fait des hommes en soutane… Est-ce l’effet des croissants français du petit déjeuner ?
Victor, blond, a l’air typiquement russe. Ion est tout l’inverse : peau mate, barbe et cheveux noirs. Tous deux en dernière année, ils terminent leur thèse – et c’est le seul sujet qui parvient à les assombrir quelque peu.
Le séminaire orthodoxe Sainte-Geneviève d’Épinay-sous-Sénart a ouvert ses portes il y a trois ans. L’établissement forme des prêtres pour les paroisses de l’église orthodoxe russe à l’étranger. Le Courrier de Russie est allé regarder derrière ses murs.
J’arrive à la station Brunoy vers midi, après trente minutes de RER depuis Châtelet. Dans cette ville de banlieue parisienne, personne ne connaît ni la rue Sainte Geneviève ni le séminaire orthodoxe. Jusqu’au chauffeur de bus qui pourtant passe devant chaque jour. Il faut dire que le lieu n’est pas évident à trouver : le séminaire est situé dans un ancien couvent auquel les gens ne font plus attention. En arrivant, on ne s’attend pas à entendre parler russe.
Chez les sœurs
Je suis accueillie par deux séminaristes, Victor Smirnov et Ion Dimitrov. Souriants, ils ne cessent de plaisanter. Pas vraiment l’image que l’on se fait des hommes en soutane… Est-ce l’effet des croissants français du petit déjeuner ?
Victor, blond, a l’air typiquement russe. Ion est tout l’inverse : peau mate, barbe et cheveux noirs. Tous deux en dernière année, ils terminent leur thèse – et c’est le seul sujet qui parvient à les assombrir quelque peu.
Victor vient de Moscou, Ion de Leova, une petite ville de Moldavie. Ils ont l’un comme l’autre été initiés à la religion par leurs mères, orthodoxes pratiquantes.
« À 6 ans, je voulais entrer en section de foot, se souvient Victor. Mais ma mère m’a emmené à la chorale du monastère Danilov en promettant que si ça ne me plaisait pas, je pourrais aller jouer au ballon. Et chanter m’a tellement plu… Je ne songeais plus qu’à intégrer le séminaire. »
« J’ai aussi commencé parchanter dans un chœur, confie Ion. Mais je n’ai pas aimé du tout ! Ce que je voulais, c’était étudier les sciences naturelles. Je ne suis entré au séminaire d’Odessa que pour faire plaisir à ma mère. Je comptais poursuivre ensuite mes études dans une université laïque. Pourtant, au bout d’un moment, j’ai réalisé que je ne voulais plus aller nulle part ailleurs. »
« Les deux premières années du séminaire sont cruciales, reprend Victor. Au cours de cette période, la détermination du futur prêtre est constamment mise à l’épreuve. Certains comprennent alors qu’ils ne sont pas faits pour la vie de prêtre mais d’autres décident de continuer.»
« Allié » des catholiques
Après le séminaire, Ion et Victor ont poursuivi leur cursus à l’Académie spirituelle de la Laure Saint-Serge, à Moscou. Où ils sont tombés, un jour, sur une annonce du doyen du séminaire Sainte-Geneviève, le père Alexandre Siniakov, invitant tous ceux qui le désiraient à poser leurs candidatures pour étudier en France. Ion et Victor, qui avaient tous deux appris le français dans le passé, ont décidé de tenter leur chance. La liste originelle des candidats était longue, mais elle s’est progressivement raccourcie. De nombreux séminaristes ont en effet retiré leur candidature suite à la campagne d’une partie de la communauté orthodoxe qui accusait le père Alexandre d’être un « allié » des catholiques.
« Sur Internet, des fanatiques accusaient le doyen de s’être vendu à Rome, simplement parce qu’il compte des amis parmi les catholiques », se souvient Ion. Mais les deux jeunes hommes ne se sont pas laissé intimider – et les voilà depuis trois ans déjà à Sainte-Geneviève, ravis de leur choix.
Ils me font faire le tour du parc du séminaire, où de petits sentiers couverts de feuilles fanées contournent les chênes centenaires.
« Là, ce sont les serres qui nous restent des bonnes sœurs, commente Victor. Les moniales permettaient aux habitants d’Epinay d’y faire leurs potagers. Nous poursuivons la tradition et les gens nous offrent des fruits et légumes frais. »
Apercevant un bouleau, je demande si les séminaristes l’ont planté dans un accès de nostalgie. « Non, le bouleau était ici. Mais on a planté des pêches, affirme Ion, tout fier, en montrant l’étiquette de la souche et son nom imprononçable en latin. À 33 euros le plant, elles devraient être bonnes ! »
« Au départ, les gens du coin n’étaient pas ravis-ravis à l’idée du voisinage avec un séminaire orthodoxe, se souvient Victor. Quelqu’un a même mis le feu à nos ruches. »
« Les socialistes, ça veut toujours construire du logement social ! »
Les autorités d’Epinay n’ont pas non plus accueilli les religieux à bras ouverts. Madame le maire, Christine Scelle-Maury, qui voulait faire construire dans le parc du couvent un complexe de logement social, a commencé par s’opposer : elle s’élevait notamment contre la construction d’une petite église à proximité de l’établissement.
« Vous savez, la maire est socialiste, commente Ion. Et les socialistes, ça veut toujours construire du logement social ! »
Cependant, au fil du temps, l’édile a changé d’avis – et même promis d’assister à la cérémonie de sanctification de l’église. « Une fois l’église prête, on ouvrira le parc au public », assure Victor.
Ion et Victor me montrent l’église en rondins aux coupoles bleues et, à côté, les sept cloches qui attendent leur tour.
« Notre église est arrivée de Toula à Paris dans trois gros camions, souligne Victor. Les ouvriers ont travaillé sans relâche pour la monter en trois semaines. Ils sont repartis juste avant que leurs visas n’expirent ! »
« Des scouts venus faire leurs entraînements ici ont dit que notre église ressemblait à une pagode », s’amuse Ion.
SUITE LE COURRIE DE RUSSIE
« À 6 ans, je voulais entrer en section de foot, se souvient Victor. Mais ma mère m’a emmené à la chorale du monastère Danilov en promettant que si ça ne me plaisait pas, je pourrais aller jouer au ballon. Et chanter m’a tellement plu… Je ne songeais plus qu’à intégrer le séminaire. »
« J’ai aussi commencé parchanter dans un chœur, confie Ion. Mais je n’ai pas aimé du tout ! Ce que je voulais, c’était étudier les sciences naturelles. Je ne suis entré au séminaire d’Odessa que pour faire plaisir à ma mère. Je comptais poursuivre ensuite mes études dans une université laïque. Pourtant, au bout d’un moment, j’ai réalisé que je ne voulais plus aller nulle part ailleurs. »
« Les deux premières années du séminaire sont cruciales, reprend Victor. Au cours de cette période, la détermination du futur prêtre est constamment mise à l’épreuve. Certains comprennent alors qu’ils ne sont pas faits pour la vie de prêtre mais d’autres décident de continuer.»
« Allié » des catholiques
Après le séminaire, Ion et Victor ont poursuivi leur cursus à l’Académie spirituelle de la Laure Saint-Serge, à Moscou. Où ils sont tombés, un jour, sur une annonce du doyen du séminaire Sainte-Geneviève, le père Alexandre Siniakov, invitant tous ceux qui le désiraient à poser leurs candidatures pour étudier en France. Ion et Victor, qui avaient tous deux appris le français dans le passé, ont décidé de tenter leur chance. La liste originelle des candidats était longue, mais elle s’est progressivement raccourcie. De nombreux séminaristes ont en effet retiré leur candidature suite à la campagne d’une partie de la communauté orthodoxe qui accusait le père Alexandre d’être un « allié » des catholiques.
« Sur Internet, des fanatiques accusaient le doyen de s’être vendu à Rome, simplement parce qu’il compte des amis parmi les catholiques », se souvient Ion. Mais les deux jeunes hommes ne se sont pas laissé intimider – et les voilà depuis trois ans déjà à Sainte-Geneviève, ravis de leur choix.
Ils me font faire le tour du parc du séminaire, où de petits sentiers couverts de feuilles fanées contournent les chênes centenaires.
« Là, ce sont les serres qui nous restent des bonnes sœurs, commente Victor. Les moniales permettaient aux habitants d’Epinay d’y faire leurs potagers. Nous poursuivons la tradition et les gens nous offrent des fruits et légumes frais. »
Apercevant un bouleau, je demande si les séminaristes l’ont planté dans un accès de nostalgie. « Non, le bouleau était ici. Mais on a planté des pêches, affirme Ion, tout fier, en montrant l’étiquette de la souche et son nom imprononçable en latin. À 33 euros le plant, elles devraient être bonnes ! »
« Au départ, les gens du coin n’étaient pas ravis-ravis à l’idée du voisinage avec un séminaire orthodoxe, se souvient Victor. Quelqu’un a même mis le feu à nos ruches. »
« Les socialistes, ça veut toujours construire du logement social ! »
Les autorités d’Epinay n’ont pas non plus accueilli les religieux à bras ouverts. Madame le maire, Christine Scelle-Maury, qui voulait faire construire dans le parc du couvent un complexe de logement social, a commencé par s’opposer : elle s’élevait notamment contre la construction d’une petite église à proximité de l’établissement.
« Vous savez, la maire est socialiste, commente Ion. Et les socialistes, ça veut toujours construire du logement social ! »
Cependant, au fil du temps, l’édile a changé d’avis – et même promis d’assister à la cérémonie de sanctification de l’église. « Une fois l’église prête, on ouvrira le parc au public », assure Victor.
Ion et Victor me montrent l’église en rondins aux coupoles bleues et, à côté, les sept cloches qui attendent leur tour.
« Notre église est arrivée de Toula à Paris dans trois gros camions, souligne Victor. Les ouvriers ont travaillé sans relâche pour la monter en trois semaines. Ils sont repartis juste avant que leurs visas n’expirent ! »
« Des scouts venus faire leurs entraînements ici ont dit que notre église ressemblait à une pagode », s’amuse Ion.
SUITE LE COURRIE DE RUSSIE
Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 16 Janvier 2013 à 19:39
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