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Tomasz Orlowski, ambassadeur de Pologne en France, voit dans l'appel à la réconciliation entre les deux peuples lancé conjointement par les évêques polonais et le patriarche de Moscou une révolution spirituelle et politique.
Un appel commun des évêques polonais et russes a été signé par l'archevêque Jozef Michalik, président de la conférence des évêques de Pologne, et le patriarche de Moscou et de toutes les Russies, Cyrille Ier, lors de sa visite historique à Varsovie. Il a été lu dans toutes églises de Pologne et a été ratifié par le Saint-Synode le 4 octobre dernier. La Pologne et la Russie engagent un processus de rapprochement. Car, non seulement le voisinage pluriséculaire, mais également le riche héritage chrétien de l'Occident et de l'Orient, réunit nos peuples frères. Cet événement majeur ouvre la perspective réelle d'un avenir meilleur, alors que nombreux sont ceux qui se posent la question de savoir si l'évolution actuelle de la Russie va dans la bonne direction. Faut-il considérer, au moment où la politique russe dans le monde se durcit, que l'Église prend la relève pour rapprocher ses voisins occidentaux? Les changements, que nous espérons conjoncturels, laissent-ils la place à une approche plus apaisée et beaucoup plus structurelle? En effet, la volonté de réconciliation a son rythme propre et résiste aux interférences.
Un appel commun des évêques polonais et russes a été signé par l'archevêque Jozef Michalik, président de la conférence des évêques de Pologne, et le patriarche de Moscou et de toutes les Russies, Cyrille Ier, lors de sa visite historique à Varsovie. Il a été lu dans toutes églises de Pologne et a été ratifié par le Saint-Synode le 4 octobre dernier. La Pologne et la Russie engagent un processus de rapprochement. Car, non seulement le voisinage pluriséculaire, mais également le riche héritage chrétien de l'Occident et de l'Orient, réunit nos peuples frères. Cet événement majeur ouvre la perspective réelle d'un avenir meilleur, alors que nombreux sont ceux qui se posent la question de savoir si l'évolution actuelle de la Russie va dans la bonne direction. Faut-il considérer, au moment où la politique russe dans le monde se durcit, que l'Église prend la relève pour rapprocher ses voisins occidentaux? Les changements, que nous espérons conjoncturels, laissent-ils la place à une approche plus apaisée et beaucoup plus structurelle? En effet, la volonté de réconciliation a son rythme propre et résiste aux interférences.
L'initiative prise par les évêques de Pologne et le patriarche de Moscou est marquée par l'influence directe de la pensée de Jean-Paul II. Dès le début de son pontificat, en pleine guerre froide, le pape slave considérait l'Orient et l'Occident comme les deux poumons du corps de l'Église et appelait celle-ci à respirer avec ses deux poumons. L'ancien premier ministre polonais Tadeusz Mazowiecki estime que cette métaphore se rapporte à la division du christianisme, tandis que notre interprétation a été, à tort, limitée à la division de l'Europe décidée à Yalta. Or l'appel des évêques apporte une réponse qui embrasse ces deux dimensions, œcuménique et nationale. Déjà difficile à imaginer, le rapprochement polono-russe peut-il permettre de progresser dans le dialogue interconfessionnel? En ajoutant, à quatre siècles d'un voisinage troublé, les mille années de la fracture de schisme? Ce rapprochement ne serait-il pas le plus bel hommage rendu à Jean-Paul II, le pape polonais?
Le texte de l'appel commun est révolutionnaire pour certains, dont moi-même, et insuffisant pour d'autres, car il ne règle pas tout. Chaque mot a son poids, aussi a-t-on préféré éviter d'inventorier les plaintes mutuelles. D'autres regrettent que le document oublie les non-croyants et favorise un enseignement moral trop strict. En trois pages nos évêques indiquent, en revanche, un programme de réconciliation à accomplir entre les deux peuples. S'avançant sur un chemin si difficile, où tant de plaies restent ouvertes, ils trouvent les mots les plus justes en les empruntant à la prière commune à tous les chrétiens: «pardonnez-nous nos offenses, comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés». Cela représente un changement d'état d'esprit.
Le lancement de cette initiative mérite d'être replacé dans le temps. Le 1er septembre 2009, Vladimir Poutine se rendait en Pologne pour participer à la célébration du 70e anniversaire de l'éclatement de la Seconde Guerre mondiale que les Russes préféraient placer en 1941, passant ainsi sous silence la collaboration entre Staline et Hitler, dont Katyn fut l'un des principaux épisodes. Au même moment les moines du monastère Saint-Nil sur l'île de Stolbensk - près d'un des camps des officiers tués à Katyn - venaient en Pologne afin de demander une copie de l'icône de la Vierge noire de Częstochowa pour la chapelle dédiée à leur mémoire. Le dialogue s'engagea. Alors que les relations politiques entre la Pologne et la Russie subissaient des contretemps à la suite de l'accident de l'avion présidentiel le 10 avril 2010, le travail patient des Églises se poursuivait et progressait, épaulé par une commission intergouvernementale coprésidée par Adam Daniel Rotfeld et Anatoly Torkunov. Le cliché persistant, même en France, selon lequel les Polonais et les Russes réunis amènent inévitablement des problèmes et non des solutions n'est plus d‘actualité.
L'appel polono-russe renvoie à la lettre que les évêques polonais adressèrent en 1965 aux évêques allemands, qui comprenait la fameuse phrase: «nous pardonnons et demandons pardon». Ce fut le premier pas vers la réconciliation entre Polonais et Allemands. Pourtant cette lettre fut une initiative unilatérale, alors que l'appel actuel est le fruit d'un travail commun. Le chemin est tracé, même si les modalités et la vitesse du rapprochement restent inconnues.
Pardonner ne signifie certainement pas oublier, écrivent les évêques. Pardonner signifie, en revanche, abandonner la vengeance et la haine, contribuer à construire l'entente et la fraternité entre nos peuples et nos pays, ce qui constitue le fondement de l'avenir pacifique. Pour mesurer l'importance du geste accompli, il faudra du temps. Vingt-quatre ans se sont écoulés entre la lettre des évêques jusqu'au baiser de paix échangé entre Tadeusz Mazowiecki et le chancelier fédéral Helmut Kohl. Cette fois aussi, un pas de géant a été accompli, et tant qu'il y aura des gens capables de le suivre, nous pourrons regarder l'avenir avec confiance.
Publié le 01/11/2012 "Le Figaro'"
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"PO" La Russie et la Pologne ont tourné une nouvelle page de leur histoire commune et peut-être un nouveau regard sur l’Église de Rome
Le texte de l'appel commun est révolutionnaire pour certains, dont moi-même, et insuffisant pour d'autres, car il ne règle pas tout. Chaque mot a son poids, aussi a-t-on préféré éviter d'inventorier les plaintes mutuelles. D'autres regrettent que le document oublie les non-croyants et favorise un enseignement moral trop strict. En trois pages nos évêques indiquent, en revanche, un programme de réconciliation à accomplir entre les deux peuples. S'avançant sur un chemin si difficile, où tant de plaies restent ouvertes, ils trouvent les mots les plus justes en les empruntant à la prière commune à tous les chrétiens: «pardonnez-nous nos offenses, comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés». Cela représente un changement d'état d'esprit.
Le lancement de cette initiative mérite d'être replacé dans le temps. Le 1er septembre 2009, Vladimir Poutine se rendait en Pologne pour participer à la célébration du 70e anniversaire de l'éclatement de la Seconde Guerre mondiale que les Russes préféraient placer en 1941, passant ainsi sous silence la collaboration entre Staline et Hitler, dont Katyn fut l'un des principaux épisodes. Au même moment les moines du monastère Saint-Nil sur l'île de Stolbensk - près d'un des camps des officiers tués à Katyn - venaient en Pologne afin de demander une copie de l'icône de la Vierge noire de Częstochowa pour la chapelle dédiée à leur mémoire. Le dialogue s'engagea. Alors que les relations politiques entre la Pologne et la Russie subissaient des contretemps à la suite de l'accident de l'avion présidentiel le 10 avril 2010, le travail patient des Églises se poursuivait et progressait, épaulé par une commission intergouvernementale coprésidée par Adam Daniel Rotfeld et Anatoly Torkunov. Le cliché persistant, même en France, selon lequel les Polonais et les Russes réunis amènent inévitablement des problèmes et non des solutions n'est plus d‘actualité.
L'appel polono-russe renvoie à la lettre que les évêques polonais adressèrent en 1965 aux évêques allemands, qui comprenait la fameuse phrase: «nous pardonnons et demandons pardon». Ce fut le premier pas vers la réconciliation entre Polonais et Allemands. Pourtant cette lettre fut une initiative unilatérale, alors que l'appel actuel est le fruit d'un travail commun. Le chemin est tracé, même si les modalités et la vitesse du rapprochement restent inconnues.
Pardonner ne signifie certainement pas oublier, écrivent les évêques. Pardonner signifie, en revanche, abandonner la vengeance et la haine, contribuer à construire l'entente et la fraternité entre nos peuples et nos pays, ce qui constitue le fondement de l'avenir pacifique. Pour mesurer l'importance du geste accompli, il faudra du temps. Vingt-quatre ans se sont écoulés entre la lettre des évêques jusqu'au baiser de paix échangé entre Tadeusz Mazowiecki et le chancelier fédéral Helmut Kohl. Cette fois aussi, un pas de géant a été accompli, et tant qu'il y aura des gens capables de le suivre, nous pourrons regarder l'avenir avec confiance.
Publié le 01/11/2012 "Le Figaro'"
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"PO" La Russie et la Pologne ont tourné une nouvelle page de leur histoire commune et peut-être un nouveau regard sur l’Église de Rome
Rédigé par Parlons d'orthodoxie le 2 Novembre 2012 à 11:12
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