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Vladimir Golovanow
La question du calendrier se pose de façon particulièrement aigue à Noël quand même les Orthodoxes sont divisés et ne fêtent pas ensemble la nativité du Christ. Cette question est bien entendu à l’ordre du jour du prochain Concile panorthodoxe et a fait l’objet de plusieurs communications lors du dernier séminaire théologique à Saint Serge (1) où Pierre Sollogoub a souligné que « le calendrier julien s’est révélé (avec les siècles) inadéquat pour relier les dates des fêtes liturgiques de l’année aux événements cosmiques » (ibid).
Icône cosmique et anniversaire
Mais de quels « événements cosmiques » s’agit-il ? En fait, comme l’écrit Nicolas Osorguine (2), certains théologiens expliquent les dates de Noël et Pâques par une "icône cosmique" qui montre l'univers entier participant au sens de la fête : pour Noël le rallongement des jours à partir du solstice (3) marque cette naissance qui "a fait resplendir dans le monde la lumière de l'intelligence" comme le proclame le tropaire de Noël (4).
Remarquons toutefois que cette date a été fixée assez tard : Noël a d’abord été fêté le 6 janvier, en tout cas en Orient, comme c’est encore les cas dans l’Eglise arménienne et comme le rappelle la fête des Rois dans l’Eglise catholique. La première mention de la fête de Noël au 25 Décembre se trouve dans le calendrier romain des martyrs (le Martyrologue de 354 établi à partir d’un texte qui remonte à 336) et ce n’est qu’en 425 que l'empereur Théodose II codifie officiellement les cérémonies de la fête de Noël. (Ibid. 4)
La question du calendrier se pose de façon particulièrement aigue à Noël quand même les Orthodoxes sont divisés et ne fêtent pas ensemble la nativité du Christ. Cette question est bien entendu à l’ordre du jour du prochain Concile panorthodoxe et a fait l’objet de plusieurs communications lors du dernier séminaire théologique à Saint Serge (1) où Pierre Sollogoub a souligné que « le calendrier julien s’est révélé (avec les siècles) inadéquat pour relier les dates des fêtes liturgiques de l’année aux événements cosmiques » (ibid).
Icône cosmique et anniversaire
Mais de quels « événements cosmiques » s’agit-il ? En fait, comme l’écrit Nicolas Osorguine (2), certains théologiens expliquent les dates de Noël et Pâques par une "icône cosmique" qui montre l'univers entier participant au sens de la fête : pour Noël le rallongement des jours à partir du solstice (3) marque cette naissance qui "a fait resplendir dans le monde la lumière de l'intelligence" comme le proclame le tropaire de Noël (4).
Remarquons toutefois que cette date a été fixée assez tard : Noël a d’abord été fêté le 6 janvier, en tout cas en Orient, comme c’est encore les cas dans l’Eglise arménienne et comme le rappelle la fête des Rois dans l’Eglise catholique. La première mention de la fête de Noël au 25 Décembre se trouve dans le calendrier romain des martyrs (le Martyrologue de 354 établi à partir d’un texte qui remonte à 336) et ce n’est qu’en 425 que l'empereur Théodose II codifie officiellement les cérémonies de la fête de Noël. (Ibid. 4)
Mais d’autres théologiens insistent sur l’anniversaire de la Naissance de Jésus Christ : ainsi dans « l’Homélie sur la Fête de la Nativité de Notre-Seigneur Jésus-Christ », (386) Saint Jean Chrysostome ne fait pas référence à l’astronomie mais cherche à démontrer que le 25 décembre est bien l’anniversaire de la naissance de Jésus en apportant trois séries de preuves : (i) l'empressement avec lequel la fête a été reçue par les croyants, (ii) le recensement décrété par César Auguste dont la date est consignée dans les registres de Rome, (iii) par le récit évangélique qui permet de déduire la date de naissance de Jésus en partant du temps où Zacharie reçut la nouvelle que son épouse Elizabeth était enceinte de saint Jean (5). Tous ces éléments indiquent bien la fin décembre, mais aucun ne permet d’en préciser le jour.
Vox populi
Alors pourquoi ce 25 décembre qui intervient 3 jours après le solstice sans raison évidente ? Et de fait l’origine de cette date plonge dans les cultes païens de Rome : c’était une fête populaire qui avait été établie pour commémore officiellement "la naissance du soleil invaincu" (dies natalis solis invicti) sous l'empereur Aurélien (270-275). Il s’agissait des anciennes "saturnales", qui culminaient au solstice d’hiver, et le 25 décembre correspondait bien au solstice quand fut instauré le calendrier julien en -45. Mais un décalage commençait à s’instaurer dès le siècle suivant à cause de l'imprécision scientifique du calendrier julien (6) et quand la fête de Noël est officiellement codifiée, au 5ème siècle, le décalage atteint ces 3 jours… Toutefois le peuple ayant pris l’habitude du 25 décembre il n’était pas question d’en changer ! C’est bien cette habitude de la fête le 25 décembre qui, pour moi, explique la facilité avec laquelle cette date a été acceptée pour fêter Noël comme le souligne saint Jean Chrisostome.
Les dates des solstices et équinoxes sont parfaitement connues des Pères qui décident de fixer les fêtes de Noël et de Pâques au IV-Vèmes siècles : ils définissent très justement le 21 mars comme étant la date de l’équinoxe qui va servir aux calculs des Pâques, mais ils laissent Noël le 25 décembre et pour moi cela montre que la réception populaire leur parait plus importante que l’exactitude scientifique.
Ainsi la question de la précision scientifique du calendrier liturgique et de sa "capacité à relier les dates des fêtes liturgiques de l’année aux événements cosmiques" ne se pose tout simplement pas. Pour changer ses règles l'Église attend non une preuve scientifique mais un signe de l’Esprit qui la dirige, et c'est le consensus du Peuple de Dieu qui constitue le plus souvent ce signe. Or nous n'en avons pas eu et j’en vois au contraire deux en faveur de la conservation du calendrier julien:
- En 1923 un concile restreint décida de passer au calendrier dit "julien révisé" (7) mais ce changement a été rejeté par la majorité des fidèles. Voilà pourquoi nous constatons autant de différences sur ce sujet (8).
- Les Eglises catholiques du Moyen Orient ont décidé de fêter Pâques avec les Orthodoxes, le 5 mai en 2013, alors même que c’est l’une des dates les plus éloignées possibles de "l’événement cosmique" considéré (l’équinoxe). Mais la demande "émane d’une pression de la part des fidèles"(9) et vient donc bien du Peuple de Dieu.
Pourquoi le 25 décembre a été choisi pour célébrer la naissance du Christ?
Pour conclure, je citerais Sa Sainteté Cyrille I: "le changement de calendrier n'est pas à l'ordre du jour et, de toute façon, le salut n'est pas une question de calendrier."
Amen !
Vox populi
Alors pourquoi ce 25 décembre qui intervient 3 jours après le solstice sans raison évidente ? Et de fait l’origine de cette date plonge dans les cultes païens de Rome : c’était une fête populaire qui avait été établie pour commémore officiellement "la naissance du soleil invaincu" (dies natalis solis invicti) sous l'empereur Aurélien (270-275). Il s’agissait des anciennes "saturnales", qui culminaient au solstice d’hiver, et le 25 décembre correspondait bien au solstice quand fut instauré le calendrier julien en -45. Mais un décalage commençait à s’instaurer dès le siècle suivant à cause de l'imprécision scientifique du calendrier julien (6) et quand la fête de Noël est officiellement codifiée, au 5ème siècle, le décalage atteint ces 3 jours… Toutefois le peuple ayant pris l’habitude du 25 décembre il n’était pas question d’en changer ! C’est bien cette habitude de la fête le 25 décembre qui, pour moi, explique la facilité avec laquelle cette date a été acceptée pour fêter Noël comme le souligne saint Jean Chrisostome.
Les dates des solstices et équinoxes sont parfaitement connues des Pères qui décident de fixer les fêtes de Noël et de Pâques au IV-Vèmes siècles : ils définissent très justement le 21 mars comme étant la date de l’équinoxe qui va servir aux calculs des Pâques, mais ils laissent Noël le 25 décembre et pour moi cela montre que la réception populaire leur parait plus importante que l’exactitude scientifique.
Ainsi la question de la précision scientifique du calendrier liturgique et de sa "capacité à relier les dates des fêtes liturgiques de l’année aux événements cosmiques" ne se pose tout simplement pas. Pour changer ses règles l'Église attend non une preuve scientifique mais un signe de l’Esprit qui la dirige, et c'est le consensus du Peuple de Dieu qui constitue le plus souvent ce signe. Or nous n'en avons pas eu et j’en vois au contraire deux en faveur de la conservation du calendrier julien:
- En 1923 un concile restreint décida de passer au calendrier dit "julien révisé" (7) mais ce changement a été rejeté par la majorité des fidèles. Voilà pourquoi nous constatons autant de différences sur ce sujet (8).
- Les Eglises catholiques du Moyen Orient ont décidé de fêter Pâques avec les Orthodoxes, le 5 mai en 2013, alors même que c’est l’une des dates les plus éloignées possibles de "l’événement cosmique" considéré (l’équinoxe). Mais la demande "émane d’une pression de la part des fidèles"(9) et vient donc bien du Peuple de Dieu.
Pourquoi le 25 décembre a été choisi pour célébrer la naissance du Christ?
Pour conclure, je citerais Sa Sainteté Cyrille I: "le changement de calendrier n'est pas à l'ordre du jour et, de toute façon, le salut n'est pas une question de calendrier."
Amen !
Notes :
(1) Colloque "Comprendre les enjeux du prochain Concile de l'Eglise orthodoxe", 18-20 octobre 2012, Cf
(2) In Nicolas Osorguine, professeur à Saint Serge (Paris), dans "La pensée Russe" du 21-27 mars 2003.
(3) Le solstice d’hiver dans l’hémisphère nord correspond au point de l’orbite terrestre où le soleil se trouve au zénith du tropique sud ce qui correspond au jour le plus court. La terre se trouve à ce point précis à un moment bien déterminé dont la date et l’heure exactes varient en fonction des fuseaux horaires.
(4) ICI
(5) Cf. texte de l’homélie
(6) Rappelons que les 365 jours et 6 heures d’une année moyenne du calendrier julien (en comptant les années bissextiles) font 11 minutes en plus de l'année astronomique, soit 18 heures par siècle. (Cf pour plus de détails.)
(7) Dans ce calendrier, le cycle des fêtes fixes (Annonciation, Noël, Théophanie, Transfiguration, …) et les fêtes des saints suivent le calendrier grégorien tandis que le cycle mobile (Grand carême, Pâques, Ascension, Pentecôte) est calculé en fonction du calendrier julien.
(8) En fait, les Orthodoxes se partagent entre 3 calendriers:
a. Julien: les Églises de Russie, Serbie, Géorgie et Jérusalem, le mont Athos et le monastère Sainte Catherine du Sinaï, qui constituent la majorité de l'Orthodoxie en nombre de fidèles, de paroisses, de monastères, de clercs…
b. Grégorien: la seule Église orthodoxe de Finlande (patriarcat de Constantinople)
c. Julien révisé: les autres Eglises, qui subissent les dissidences des "paléo-calendaristes" (tenants de l'ancien calendrier).
L'Église copte suit aussi le calendrier Julien, de même que les Églises orientales (non-chalcédoniennes) et quelques Églises catholique de rite orientales. Pour 2013 toutes les Eglises catholiques du Proche Orient ont décidé de fêter Pâques avec les Orthodoxes (Julien révisé)
(9) ICI
(1) Colloque "Comprendre les enjeux du prochain Concile de l'Eglise orthodoxe", 18-20 octobre 2012, Cf
(2) In Nicolas Osorguine, professeur à Saint Serge (Paris), dans "La pensée Russe" du 21-27 mars 2003.
(3) Le solstice d’hiver dans l’hémisphère nord correspond au point de l’orbite terrestre où le soleil se trouve au zénith du tropique sud ce qui correspond au jour le plus court. La terre se trouve à ce point précis à un moment bien déterminé dont la date et l’heure exactes varient en fonction des fuseaux horaires.
(4) ICI
(5) Cf. texte de l’homélie
(6) Rappelons que les 365 jours et 6 heures d’une année moyenne du calendrier julien (en comptant les années bissextiles) font 11 minutes en plus de l'année astronomique, soit 18 heures par siècle. (Cf pour plus de détails.)
(7) Dans ce calendrier, le cycle des fêtes fixes (Annonciation, Noël, Théophanie, Transfiguration, …) et les fêtes des saints suivent le calendrier grégorien tandis que le cycle mobile (Grand carême, Pâques, Ascension, Pentecôte) est calculé en fonction du calendrier julien.
(8) En fait, les Orthodoxes se partagent entre 3 calendriers:
a. Julien: les Églises de Russie, Serbie, Géorgie et Jérusalem, le mont Athos et le monastère Sainte Catherine du Sinaï, qui constituent la majorité de l'Orthodoxie en nombre de fidèles, de paroisses, de monastères, de clercs…
b. Grégorien: la seule Église orthodoxe de Finlande (patriarcat de Constantinople)
c. Julien révisé: les autres Eglises, qui subissent les dissidences des "paléo-calendaristes" (tenants de l'ancien calendrier).
L'Église copte suit aussi le calendrier Julien, de même que les Églises orientales (non-chalcédoniennes) et quelques Églises catholique de rite orientales. Pour 2013 toutes les Eglises catholiques du Proche Orient ont décidé de fêter Pâques avec les Orthodoxes (Julien révisé)
(9) ICI
Rédigé par Parlons d'orthodoxie le 24 Décembre 2020 à 09:56
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