L’histoire de la Russie au XX siècle est souvent falsifiée
Cette lettre signée par Mgr Agapit, évêque de Stuttgart et l’archiprêtre Nicolas Artiomov (tous deux appartenant à l’EORHF) a été publiée dans le numéro de février 2011 de « La Revue du patriarcat de Moscou » (Журнал Московской Патриархии)

Ce texte qui nous a été envoyé par ses auteurs exprime l’inquiétude ressentie par de nombreux fidèles résidant hors de Russie. Une nouvelle approche de l’histoire du XX siècle est, en effet, indispensable. Mais l’inaccessibilité des archives de la guerre civile et des Armées Blanches, etc. rend impossible une nouvelle lecture du passé récent. Le gouvernement de la Fédération se doit d’enfin officiellement reconnaître les crimes commis par le régime communiste. "RPM-ЖМП"

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Il est souvent question en Russie des falsifications que l’on fait subir à l’histoire moderne. La science ignorait l’étrange notion de « falsification de l’histoire » : ce concept été créé par les services de propagande staliniens. Etait considérée en tant que « falsification » toute analyse ne correspondant pas aux dogmes mensongers du parti. Voilà près de vingt ans que le régime soviétique s’est effondré. L’Etat athée fondé par Lénine et Staline pour se substituer à la Russie millénaire n’est plus.

La vie quotidienne des citoyens de l’ex-URSS était, cela en commençant par le jardin d’enfants, imprégnée par le mensonge. Un mensonge qui portait sur les racines mêmes de la Russie et la conscience historique du peuple. C’est à regret qu’il faut constater que les vingt années qui ont suivi la débâcle du régime n’ont pas apporté l’essentiel : la prise de conscience par la société de la tragédie spirituelle vécue par le pays au XX siècle. Nous devons nous élever contre les altérations que l’on fait subir aux évènements historiques. Or, nous constatons que le repentir ne s’est toujours pas manifesté
Oui, en effet, une procession solennelle a eu lieu : des îles Solovki, un crucifix de huit mètres de hauteur a été transporté à Moscou en empruntant les canaux creusés par les déportés. Ce crucifix se trouve désormais au « polygone » de Boutovo.
Mais qui se souvient aujourd’hui de cette longue procession ?
Il y a en Russie des historiens qui se consacrent à la sauvegarde de la mémoire de ceux qui ont péri en creusant les canaux du Nord de la Russie (Lidia Golovkova, les chercheurs de l’université orthodoxe Saint Tikhon, etc.). Leur travail est un véritable exploit. Mais l’opinion reste indifférente aux publications de ces auteurs.
Même « L’archipel » d’Alexandre Soljenitsyne est ignoré...
Une belle église a été construite au « polygone » de Boutovo. Nous avons participé à sa consécration. Près de dix mille orthodoxes s’y réunissent chaque année pour honorer la mémoire des innocents. Malheureusement, Boutovo est jusqu’à présent le seul endroit de l’ex-URSS où l’on peut s’imprégner de ce qu’ a été le régime soviétique. Comment rester indifférent au passé lorsqu’on habite une rue ou une place portant le nom d’un criminel patenté haïssant la Russie ? On débat jusqu’à présent de l’opportunité de faire revenir la statue de Dzerjinsky à son ancien emplacement, en plein centre de la capitale, là où se trouve maintenant la pierre venue des camps Solovki.

Entre-temps l’Allemagne a effectué, et continue à le faire, un immense effort de prise de conscience de son passé récent. Une église orthodoxe a été érigée à l’emplacement du camp de concentration de Dachau. Une deuxième église se situe à trois kilomètres de la première, on y commémore les travailleurs que les nazis avaient fait venir des territoires occupés de l’URSS. Où pouvaient-ils aller après la guerre ? Considérés comme traîtres dans leur pays, menacés d’être envoyés dans les camps de l’Archipel…

Si seulement ce qui existe maintenant à Boutovo pouvait être présent partout en Russie !

Les archives restent interdites : voilà l’un des principaux obstacles à la renaissance spirituelle et à la prise de conscience du passé. L’on craint une amenée d’air frais ! Or, le pays est menacé d’asphyxie si l’on continue à lui cacher son passé.

Les médias ainsi que les manuels scolaires se sont mis ces dernières années à promouvoir une réhabilitation larvée du stalinisme. On nous propose de considérer les crimes des années 1930-1940, extermination du clergé de l’Eglise orthodoxe la plus importante du monde par son nombre, anéantissement de nombreux millions de compatriotes comme une sorte de nécessité historique, comme la conséquence de conditions objectives, comme la condition d’une nécessaire mobilisation du peuple à la veille de la deuxième guerre.
La troisième, récente, édition du manuel scolaire d’histoire moderne de la Russie, 1917-2009 (A. Barsenkov et A. Vdovine) est une preuve, s’il en fallait d’une authentique « falsification de l’histoire ». Les auteurs de cet ouvrage s’emploient à redorer le blason du régime stalinien athée. Ils vont jusqu’à affirmer que la sanguinaire collectivisation des campagnes conduite par Staline aurait été le parachèvement des réformes agraires de Stolypine. Mensonge délibéré ou ignorance complète des réformes de Stolypine comme du déroulement de la collectivisation ?

La campagne de mensonges commencée vers la fin des années 40 a eu pour résultat que la science historique est aux mains de cyniques et d’amateurs. Leur influence sur l’opinion reste très forte. Leur manière de présenter à la jeune génération le personnage de Staline en tant qu’homme d’Etat et patriote éminent est un signe de mépris à l’égard des millions de victimes faites par le régime communiste athée et de la mémoire des Nouveaux Martyrs et confesseurs de la Foi.
« Dieu n’est pas dans la force mais dans la Vérité », voilà un adage qui définit parfaitement l’essence de la Russie.
Cette vérité a été maintenue et transmise de génération en génération partout de par le monde grâce aux efforts de l’Eglise Hors Frontières. L’avenir de la science historique en Russie ne nous est pas indifférent car la connaissance de l’histoire détermine pour beaucoup ce que seront les générations à venir. Le sang de Boutovo imprègne le sol de toute la Russie et clame aux cieux.
La jeunesse russe entendra-t-elle ces gémissements ?
Le rétablissement de la vérité historique sera pour la Russie vivifiant et salutaire. Il conduira à une perception nouvelle du pays par les autres nations. Nous savons que, souvent, l’image de la Russie est perçue de manière négative. Les éléments hostiles à notre pays font valoir le refus de la vérité pour renforcer les préjugés existant à l’égard de la Russie en se fondant précisément sur notre immobilisme, sur notre refus de regarder la vérité en face. Seule le libre accès aux archives permettra à la vérité historique de triompher. C’est dans un climat de totale liberté que l’étude des archives doit pouvoir se faire.
C’est à cela que nous appelle le Seigneur.

Traduction "P.O" Nikita KRIVOCHEINE
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Cette lettre signée par Mgr Agapit, évêque de Stuttgart et l’archiprêtre Nicolas Artiomov (tous deux appartenant à l’EORHF) en russe ICI et ICI










Rédigé par Nikita KRIVOCHEINE le 24 Février 2011 à 08:38 | 2 commentaires | Permalien



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