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Les enfants spirituels du métropolite Nicodème (Rotov) dont le patriarche Cyrille I commémorent le 12 octobre à Saint Pétersbourg le quatre vingtième anniversaire de sa naissance.
Voici le texte d’une allocution du patriarche Cyrille ("Messager de l’Eglise Orthodoxe Russe" N°11, 2009) Ce numéro 11 est consacré au métropolite Nicodème (Rotov) de Leningrad et Novgorod, une des personnalités majeures de l'Église orthodoxe au XXe siècle.
Allocution du métropolite Cyrille de Smolensk et de Kaliningrad à la conférence consacrée au trentième anniversaire du décès du métropolite Nicodème (Rotov) de Leningrad et de Novgorod
Nous commémorons aujourd’hui le trentième anniversaire du rappel à Dieu de Monseigneur Nicodème (Rotov), éminent hiérarque de notre Eglise. Son action continue de nos jours à déterminer dans une grande mesure la vie de notre Eglise, nous sommes nombreux à garder dans nos cœurs le souvenir de cette éminente personnalité.
La vie terrestre du métropolite défunt était avant tout une floraison d’idées hardies et profondes, de vastes projets, d’immenses travaux à la mesure de ces projets. Une vie d’une très grande intensité et, malheureusement, trop brève. Mgr Nicodème, comme s’il avait eu le pressentiment de la brièveté de son séjour en ce monde, comme s’il savait que le temps qui lui était imparti n’était pas suffisant pour réaliser tout ce à quoi il aspirait voulait hâter le cours des évènements. Il aimait répéter la phrase du généralissime Souvorov : « Il me faut combattre, à l’histoire de me juger ». Mgr Nicodème a été un guerrier sage, puissant et tenace de l’Eglise du Christ. Les trente ans qui se sont écoulés depuis qu’il nous a quitté sont amplement suffisants pour que nous puissions évaluer sa personnalité sub specie aeternitatis.
Il peut, à première vue, nous paraître paradoxal que c’est sur les années soixante du dernier siècle, période de persécutions administratives cruelles contre l’orthodoxie russe, que tombe la période la plus intense du service pastoral et ecclésialo-politique de Mgr Nicodème. En effet, ce n’était plus l’époque féroce quand, et il en a été ainsi au cours de plusieurs décennies, en réponse aux ordres cannibales de Lénine, des télégrammes étaient envoyés au Kremlin disant : « La ville de Kazan est nettoyée. Il n’y reste plus un seul pope, pas un seul moine, aucun bourgeois. Personne à fusiller ».
Or, les années soixante du XXe siècle, considérées comme « végétariennes », bien que Khrouchtchev avait alors promis de montrer « le dernier pope du pays » à la télévision, ont été pour l’orthodoxie russe une terrible épreuve. Jamais dans l’histoire russe, même à ses pires époques, les ennemis du Christ, n’ont levé la main sur l’existence institutionnelle de l’Eglise Russe en tant que telle. Ni la Horde d’Or (les occupants tatars au Moyen Age), ni le III Reich ne s’étaient fixés de tels buts. Le régime déicide a été le seul à formuler et commencer à mettre en œuvre cet objectif.
Il va de soi que Nikita Khrouchtchev n’était pas féru des écrits de Saint Justinien. Il y est dit « Le bien-être de l’Eglise, c’est la solidité de l’Empire ». Mais Mgr Nicodème, homme d’Eglise et patriote russe, était parfaitement conscient du bien fondé de ces paroles.
Aussi, la tâche de sauvegarder l’Eglise institutionnelle pour le bien de la Russie future était aux yeux de Mgr Nicodème primordiale et vitale. Il était en cela en harmonie avec notre contemporain Alexandre Soljenitsyne qui estimait que l’idée nationale russe essentielle et l’impératif de notre survie commune consistent en premier lieu à sauvegarder physiquement et moralement notre peuple.
Voici le texte d’une allocution du patriarche Cyrille ("Messager de l’Eglise Orthodoxe Russe" N°11, 2009) Ce numéro 11 est consacré au métropolite Nicodème (Rotov) de Leningrad et Novgorod, une des personnalités majeures de l'Église orthodoxe au XXe siècle.
Allocution du métropolite Cyrille de Smolensk et de Kaliningrad à la conférence consacrée au trentième anniversaire du décès du métropolite Nicodème (Rotov) de Leningrad et de Novgorod
Nous commémorons aujourd’hui le trentième anniversaire du rappel à Dieu de Monseigneur Nicodème (Rotov), éminent hiérarque de notre Eglise. Son action continue de nos jours à déterminer dans une grande mesure la vie de notre Eglise, nous sommes nombreux à garder dans nos cœurs le souvenir de cette éminente personnalité.
La vie terrestre du métropolite défunt était avant tout une floraison d’idées hardies et profondes, de vastes projets, d’immenses travaux à la mesure de ces projets. Une vie d’une très grande intensité et, malheureusement, trop brève. Mgr Nicodème, comme s’il avait eu le pressentiment de la brièveté de son séjour en ce monde, comme s’il savait que le temps qui lui était imparti n’était pas suffisant pour réaliser tout ce à quoi il aspirait voulait hâter le cours des évènements. Il aimait répéter la phrase du généralissime Souvorov : « Il me faut combattre, à l’histoire de me juger ». Mgr Nicodème a été un guerrier sage, puissant et tenace de l’Eglise du Christ. Les trente ans qui se sont écoulés depuis qu’il nous a quitté sont amplement suffisants pour que nous puissions évaluer sa personnalité sub specie aeternitatis.
Il peut, à première vue, nous paraître paradoxal que c’est sur les années soixante du dernier siècle, période de persécutions administratives cruelles contre l’orthodoxie russe, que tombe la période la plus intense du service pastoral et ecclésialo-politique de Mgr Nicodème. En effet, ce n’était plus l’époque féroce quand, et il en a été ainsi au cours de plusieurs décennies, en réponse aux ordres cannibales de Lénine, des télégrammes étaient envoyés au Kremlin disant : « La ville de Kazan est nettoyée. Il n’y reste plus un seul pope, pas un seul moine, aucun bourgeois. Personne à fusiller ».
Or, les années soixante du XXe siècle, considérées comme « végétariennes », bien que Khrouchtchev avait alors promis de montrer « le dernier pope du pays » à la télévision, ont été pour l’orthodoxie russe une terrible épreuve. Jamais dans l’histoire russe, même à ses pires époques, les ennemis du Christ, n’ont levé la main sur l’existence institutionnelle de l’Eglise Russe en tant que telle. Ni la Horde d’Or (les occupants tatars au Moyen Age), ni le III Reich ne s’étaient fixés de tels buts. Le régime déicide a été le seul à formuler et commencer à mettre en œuvre cet objectif.
Il va de soi que Nikita Khrouchtchev n’était pas féru des écrits de Saint Justinien. Il y est dit « Le bien-être de l’Eglise, c’est la solidité de l’Empire ». Mais Mgr Nicodème, homme d’Eglise et patriote russe, était parfaitement conscient du bien fondé de ces paroles.
Aussi, la tâche de sauvegarder l’Eglise institutionnelle pour le bien de la Russie future était aux yeux de Mgr Nicodème primordiale et vitale. Il était en cela en harmonie avec notre contemporain Alexandre Soljenitsyne qui estimait que l’idée nationale russe essentielle et l’impératif de notre survie commune consistent en premier lieu à sauvegarder physiquement et moralement notre peuple.
Servir fidèlement son pays dont l’âme profonde avait été mutilée par l’idéologie communiste et l’oppression totalitaire jusqu’à en devenir méconnaissable et d’une manière qui pouvait paraître irréversible, consacrer toutes ses forces, toutes ses aptitudes à sauver l’Orthodoxie russe d’un anéantissement définitif, ces deux objectifs qui pouvaient sembler s’exclure l’un l’autre n’étaient à la mesure que d’une personnalité comme celle du métropolite Nicodème - esprit éminent, cœur sensible, appelé par la Providence à servir l’Eglise qui se trouvait en danger mortel. Monseigneur Nicodème a su trouver l’unique solution possible de cette équation dont la difficulté équivalait à celle de la quadrature du cercle. Voila pourquoi son nom restera inscrit à jamais dans l’histoire de l’Eglise et celle de la Russie.
Les arts martiaux orientaux nous apprennent que la victoire n’est envisageable que si l’on réussit à retourner contre l’attaquant les forces dont il dispose, aussi plus l’adversaire est fort, plus sûrement il sera défait par celui qui a réussi à maîtriser cette subtile technique de combat. Le métropolite Nicodème a été dans notre histoire moderne celui qui a réussi à terrasser le Goliath déicide en faisant sortir l’Eglise asservie et semble-t-il condamnée de son enfermement dans les frontières de sa cruelle patrie soviétique. Il lui a offert les vastes espaces internationaux de la « lutte pour la paix » et ceux de l’œcuménisme. L’Etat soviétique poursuivait à des fins de propagande des buts similaires. Puisqu’il était impensable de conduire le dialogue interconfessionnel si l’Eglise elle même était frappée d’interdit les autorités décidèrent qu’il était dans leurs intérêts d’ajourner sa mise à mort définitive jusqu’à une période encore plus défavorable pour l’Orthodoxie.Grâce à Dieu cette période ne vint pas.
S’étant approprié ce levier d’Archimède le métropolite Nicodème qui se considérait lui-même comme « un chrétien réaliste » a su obtenir pour l’Eglise des conditions d’existence plus ou moins normales et ceci malgré un climat politique qui lui était moins que propice. La mise en place et le maintien de tout un réseau de relations fraternelles avec l’oecumenia chrétienne a permis, nous l’avons vu, le maintien en vie de l’Eglise Russe. Les autorités locales manifestent-elles l’intention de fermer un monastère, une paroisse ? Veulent-elles raser une vieille église ? Elles interdisent les processions pascales ? L’Académie de Théologie de Leningrad et son séminaire sont menacés de disparition ? En réponse le métropolite Nicodème inclut dans le programme du séjour d’une délégation ecclésiale étrangère la visite de ces entités menacées. Afin de sauver le séminaire il y organise une faculté pour les étudiants étrangers : à contrecœur le pouvoir soviétique l’opinion internationale renonce provisoirement à ses projets dirigés contre l’Eglise pour plaire à l’opinion internationale. Avec le temps les fonctionnaires soviétique sont forcé de constater, à leur propre stupéfaction, que l’Eglise persécutée a mystérieusement échappé aux geôles qui lui étaient préparées, qu’il faut désormais compter avec elle et tenir compte des nouvelles possibilités que l’Eglise a su imperceptiblement s’aménager.
Le succès sans doute la plus marquant de ce grand prélat dans la résistance tenace qu’il opposait à l’immense puissance des esprits du mal a été son programme de rénovation du corps épiscopal. Il y avait à l’époque fort peu d’évêques, ils étaient tous très âgés. Pour des raisons naturelles d’une part, regrettables de l’autre leur nombre se réduisait constamment. Invoquant la nécessité de former des jeunes spécialistes afin que l’Eglise Russe puisse être plus active dans le combat international pour la paix et le mouvement œcuménique Mgr Nicodème réussit à extirper l’accord des autorités laïques à l’ordination épiscopale d’un nombreux groupe de jeunes moines choisis parmi ceux qui lui étaient fidèles.
Tel un grand capitaine faisant face à la nécessité de prendre des décisions d’ordre stratégique il a réussi à lancer dans le combat spirituel pour l’avenir de l’Eglise, et donc de la Russie, des forces fraîches puisées dans ses réserves personnelles. Aujourd’hui ses disciples, ses enfants spirituels, ses compagnons constituent le noyau actif, intellectuellement dynamique de notre Eglise. Il suffit de dire que le premier évêque à avoir été sacré par le défunt métropolite a été le jeune archimandrite Alexis (Riddiger), il fut nommé à la chaire de Tallin et d’Estonie. C’est maintenant Sa Sainteté Alexis II, patriarche de Moscou et de la Russie.
Fidèle à la cause de l’unité des chrétiens, Mgr Nicodème puisait spirituellement et intellectuellement à la théologie patristique. Cette théologie avait l’immense mérite de « s’être développée sans se détacher de la Tradition Apostolique, de se fonder sur la Révélation Divine et donnait une réponse pertinente aux questions que la vie venait poser devant nous ». Il existe cependant des milieux en marge de l’Eglise qui s’emploient à faire de la radieuse mémoire de Mgr Nicodème un objet de controverse. Ces personnes s’emploient à reprocher à ce grand homme d’Eglise sa participation au mouvement œcuménique, à la lutte pour la paix alors que c’est précisément cette participation qui, dans une conjecture historique extrêmement dangereuse pour l’existence même de notre Eglise, a été pour nous une ancre de salut. Laissons de coté ces critiques au verbe fort : ils ne connaissent pas ou ne comprennent ni l’histoire de l’Eglise dont le bien leur tient soit disant à cœur, ni l’histoire du pays dont ils se font passer pour de fidèles patriotes. Je suis convaincu que les auteurs de ces allégations n’ont pas, à la différence du métropolite Nicodème, accompli dans leur vie d’exploit pour le bien de l’Eglise et de la Patrie.
Winston Churchill à dit qu’il n’avait pas la moindre intention de présider à la liquidation de l’Empire Britannique ! A ceux qui noircissent le nom de Mgr Nicodème alors qu’il se trouve outre-tombe, à ceux qui sont les otages volontaires de notions abstraites et de schémas irréels nous pouvons répondre que l’unique faute du défunt a consisté à ne pas accepter le rôle qui lui était proposé, celui de « fossoyeur vertueux » de son Eglise ; Mgr Nicodème s’est engagé dans la voie d’une défense inventive et novatrice de l’Eglise, et il a abouti.
Si ce n’étaient l’étonnante faculté de pressentir l’avenir, l’immense intuition spirituelle, le dévouement plein d’abnégation au service de l’Eglise de ce serviteur de Dieu il est tout à fait envisageable que les derniers orthodoxes du pays auraient célébré le millénaire du baptême de la Russie terrés dans de nouvelles catacombes. Il est possible qu’à l’ère de la « perestroïka » gorbatchévienne et du tout permis sous Eltsine il ne se serait trouvé personne pour faire face à l’invasion des missionnaires étrangers dans l’ancienne Sainte Russie.
Oui, bien sûr, le providentiel triomphe stratégique dans le combat invisible que livrait le métropolite Nicodème était parfois obtenu au prix de compromis tactiques. Oui, l’Eglise était tenue de suivre des règles du jeu artificielles et imposées.
Bref, il s’agissait de l’art du possible. Mais personne, jamais, n’a pu reprocher à Mgr Nicodème d’avoir abjuré la foi ou d’avoir ignoré les intérêts de l’Orthodoxie Russe ou d’avoir refusé de témoigner de la vérité face au monde hétérodoxe, d’avoir fait preuve d’un conformise veule dans ses rapports avec le pouvoir.
Tout ceci était évident aux yeux du professeur A.Kartachov (Paris), historien et critique conséquent de la situation de l’Eglise en URSS. Il écrivait : « Un chrétien ne peut accepter toutes les imperfections de l’Etat que dans l’esprit de la mise en œuvre du « Royaume de Dieu et de sa justice » (Mt 6-33), tout en ressentant profondément le péché et l’imperfection de ces efforts sur terre ».
Nous pouvons supposer que l’exceptionnel talent ecclésial de Mgr Nicodème avait pour moteur ce désir inassouvissable d’incarner dans sa mission « la justice du Royaume de Dieu » allié à une conscience profonde de l’imperfection et du péché inhérent à l’effort humain.
Mgr Nicodème était un homme d’Eglise et, par conséquent un homme appartenant au monde dans l’acceptation universelle de ce mot. A l’instar de Martin Luther King il aurait pu s’exclamer : « J’ai un rêve ». Ce rêve était celui de la puissante unité de tous ceux qui suivent le Christ et de la reconstitution de l’oecumenia chrétienne fondée sur les Écritures et la Tradition de l’ancienne Eglise non divisée des temps apostoliques. On ne saurait le tenir responsable de ce que ce grand idéal soit resté irréalisable, terni par le péché et la division qui frappent la communauté humaine. Mgr Nicodème disait : « Il suffit de peu pour introduire la division mais des efforts en vérité héroïques sont indispensables pour surmonter la division et, de surcroît, une aide Divine toute particulière ».
Le métropolite Nicodème oeuvrait dans ce sens d’une façon permanente. Il aspirait à l’unité panorthodoxe et, plus loin, à celle de tous les chrétiens. Mgr Nicodème bénéficiait manifestement dans ces efforts du soutien de Dieu. Les contradicteurs modernes de Mgr Nicodème ne se souviennent sans doute pas qu’il avait été à la source du processus qui a permis de panser les plaies du schisme tragique dont souffrait l’orthodoxie russe. C’est à son initiative que le Concile de 1971 a décidé de lever les anathèmes prononcés à l’égard des anciens rites et aux chrétiens orthodoxes qui respectaient ces rites par le Concile de Moscou de 1656 et du grand concile de Moscou de 1667. Mgr Nicodème se prononça pour la reconnaissance des anciens rites en tant qu’ayant la même portée sotériologique que les rites nouveaux et étant de la même valeur.
La tradition de la présence de moines russes dans les cloîtres du Saint Mont Athos était en presque totale déperdition. Mgr Nicodème fit personnellement de son mieux pour que cette tradition renaisse. C’est dans une grande part grâce à la persévérance du défunt métropolite que l’Eglise Orthodoxe d’Amérique se vit conférer l’autocéphalie alors que l’Eglise Orthodoxe du Japon devenait autonome.
En tant que Président du Service des Relations Extérieures du patriarcat de Moscou a su, béni en cela par le Saint Synode et le patriarche, jeter les fondement d’un dialogue théologique bilatéral avec l’Eglise Évangélique d’Allemagne (RFA), l’Union des Églises Évangéliques (RDA), l’Eglise Évangélique Luthérienne de Finlande, les Églises anglicanes, l’Eglise Catholique Romaine. Mgr Nicodème conduisait les délégations de l’Eglise Orthodoxe Russe aux III, IV et V èmes Assemblées du Conseil Œcuménique des Églises.
Homme de paix, ce grand prélat était avant tout un homme d’Eglise. Dans l’homélie prononcée au repas funéraire le jour de l’inhumation de Monseigneur Nicodème, métropolite de Leningrad et de Novgorod, Sa Sainteté le patriarche Pimène a dit : « Le prélat rappelé à Dieu était en premier lieu un bon pasteur de l’Eglise du Christ, toute sa vie a été un vie de labeur inlassable, de prières pour le salut éternel du troupeau qui lui avait été confié par la Providence Divine ». Le primat de l’Eglise Russe a évoqué le deuil et la tristesse des croyants, ceux de Leningrad et de Novgorod en premier.
Ces paroles étaient profondément authentiques car la mission pastorale était la véritable vocation du défunt métropolite. Cette vocation s’était clairement manifestée dans les paroisses qu’il desservait en tant que prêtre, dans les diocèses dont il était l’évêque ainsi que dans ses vastes activités internationales. Les proches du métropolite savaient à quel point il était attaché au bon ordonnancement, à l’harmonie des offices, que sa foi était pure et simple au point d’en paraître parfois semblable à celle des enfants. Il lui arrivait de venir chanter dans le chœur, et il le faisait avec plaisir et de lire les cathismes. Il élaborait en slavon d’église et ceci avec une facilité surprenante aux yeux des contemporains des textes d’acathiste aux saints nouvellement canonisés ainsi que des tropaires, des kondaks et des hymnes à la gloire des saints.
Le métropolite Nicodème a visité à plusieurs reprises chacune des paroisses de ses diocèses. Il en connaissait tous les clercs de visage comme de nom. Il disait quotidiennement la liturgie, ne refusait jamais de procéder à des baptêmes, il donnait l’absolution à ceux qui apportaient leur repentir, il s’entretenait jusqu’à tard dans la nuit avec tous ceux qui avaient besoin de ses conseils et de son soutien. Il trouvait des solutions aux conflits, dissipait les malentendus entre les personnes… Les archives de la métropole de Leningrad attestent de ce que chaque année le métropolite Nicodème étudiait des milliers de dossiers qui requéraient sa signature. Le métropolite Nicodème vivait et oeuvrait avec les fidèles de son troupeau en plein accord avec une règle qu’il avait lui-même formulé : « Les semailles du grain évangélique ne donneront des récoltes abondantes que lorsque le prédicateur offre le bon exemple d’une vie dans le Christ ».Il m’arrive parfois d’entendre que des ennemis cachés et manifestes de notre Eglise qui n’ont pas la force d’âme suffisante pour pardonner au métropolite Nicodème ses dons brillants et la manière dont il a fidèlement servi l’orthodoxie russe calomnient systématiquement sa mémoire le traitant injurieusement de «crypto-catholique et d’ oecuméniste ». J’ai le souvenir très fort de ce que mon défunt maître a, en effet, officié deux liturgies clandestines car j’en ai été le témoin.
La première s’est tenue près d’un mur du camp de concentration des îles Solovki, mur criblé de balles car il servait aux exécutions. L’archipel est maintenant considéré comme le « Golgotha de la Russie ». La deuxième liturgie « clandestine » avait été célébrée dans l’île monastère de Valaam, dans l’église du cimetière que les blasphémateurs avaient réduite en ruines et souillée. Le métropolite était convaincu de la nécessité absolue de ces liturgies. C’était à ses yeux un besoin spirituel et un devoir incontournable. Il faut rappeler que nous étions alors à l’époque de la « stagnation » la plus obtuse, la plus désespérée. Dans le meilleur des cas ceux qu’on désignait « les simples soviétiques » formés à l’athéisme dès leur enfance auraient traînés au poste de milice sans la moindre hésitation « ces popes pris en flagrant délit ». Dans le pire des cas ils s’en seraient méchamment pris à l’officiant, auraient souillé le Sacrement. Par la grâce de Dieu rien de ceci ne s’est cependant pas produit. Ces deux liturgies « secrètes », j’ai eu le bonheur de les concélébrer avec le métropolite Nicodème et elles restent dans ma mémoire comme l’une des émotions religieuses les plus fortes de toutes de ma vie.
Je disais il y a trente ans devant le cercueil de mon maître rappelé à Dieu avant l’heure que Mgr Nicodème ne se souciait jamais de savoir s’il lui sera donné de participer aux futures transformations dans la vie de l’Eglise étant ici bas sur Terre ou de les contempler de là où il trouverait le repos. Je crois pouvoir partiellement expliquer aujourd’hui cette attitude par l’étonnante faculté du défunt d’entrevoir l’avenir, du moins dans ses grands traits. Lorsque les persécutions de l’Eglise battaient leur plein, il prédisait d’une manière convaincue : « Ne vous laissez pas abattre, frères ! Le temps est proche quand nous entendrons sonner les cloches des basiliques du Kremlin ».
Un penseur vertueux des temps récents citait l’image d’une Grande Russie, « homme visible » et de la Sainte Russie « monde intérieur de cet homme visible ». Nous sommes axés aujourd’hui sur la renaissance de la grandeur extérieure, apparente de la Patrie et, en même temps, sur la rénovation de son essence spirituelle.Tel est précisément, si l’on y pense, l’objectif auquel s’était consacré le grand prélat qu’était Mgr Nicodème. Lors de son sacre il a, en quelques mots, formulé la vérité la plus complète qui puisse être dite à son propre propos : «Ma vie consciente toute entière appartient à l’Eglise ».
Traduction française Nikita Krivocheine
Les arts martiaux orientaux nous apprennent que la victoire n’est envisageable que si l’on réussit à retourner contre l’attaquant les forces dont il dispose, aussi plus l’adversaire est fort, plus sûrement il sera défait par celui qui a réussi à maîtriser cette subtile technique de combat. Le métropolite Nicodème a été dans notre histoire moderne celui qui a réussi à terrasser le Goliath déicide en faisant sortir l’Eglise asservie et semble-t-il condamnée de son enfermement dans les frontières de sa cruelle patrie soviétique. Il lui a offert les vastes espaces internationaux de la « lutte pour la paix » et ceux de l’œcuménisme. L’Etat soviétique poursuivait à des fins de propagande des buts similaires. Puisqu’il était impensable de conduire le dialogue interconfessionnel si l’Eglise elle même était frappée d’interdit les autorités décidèrent qu’il était dans leurs intérêts d’ajourner sa mise à mort définitive jusqu’à une période encore plus défavorable pour l’Orthodoxie.Grâce à Dieu cette période ne vint pas.
S’étant approprié ce levier d’Archimède le métropolite Nicodème qui se considérait lui-même comme « un chrétien réaliste » a su obtenir pour l’Eglise des conditions d’existence plus ou moins normales et ceci malgré un climat politique qui lui était moins que propice. La mise en place et le maintien de tout un réseau de relations fraternelles avec l’oecumenia chrétienne a permis, nous l’avons vu, le maintien en vie de l’Eglise Russe. Les autorités locales manifestent-elles l’intention de fermer un monastère, une paroisse ? Veulent-elles raser une vieille église ? Elles interdisent les processions pascales ? L’Académie de Théologie de Leningrad et son séminaire sont menacés de disparition ? En réponse le métropolite Nicodème inclut dans le programme du séjour d’une délégation ecclésiale étrangère la visite de ces entités menacées. Afin de sauver le séminaire il y organise une faculté pour les étudiants étrangers : à contrecœur le pouvoir soviétique l’opinion internationale renonce provisoirement à ses projets dirigés contre l’Eglise pour plaire à l’opinion internationale. Avec le temps les fonctionnaires soviétique sont forcé de constater, à leur propre stupéfaction, que l’Eglise persécutée a mystérieusement échappé aux geôles qui lui étaient préparées, qu’il faut désormais compter avec elle et tenir compte des nouvelles possibilités que l’Eglise a su imperceptiblement s’aménager.
Le succès sans doute la plus marquant de ce grand prélat dans la résistance tenace qu’il opposait à l’immense puissance des esprits du mal a été son programme de rénovation du corps épiscopal. Il y avait à l’époque fort peu d’évêques, ils étaient tous très âgés. Pour des raisons naturelles d’une part, regrettables de l’autre leur nombre se réduisait constamment. Invoquant la nécessité de former des jeunes spécialistes afin que l’Eglise Russe puisse être plus active dans le combat international pour la paix et le mouvement œcuménique Mgr Nicodème réussit à extirper l’accord des autorités laïques à l’ordination épiscopale d’un nombreux groupe de jeunes moines choisis parmi ceux qui lui étaient fidèles.
Tel un grand capitaine faisant face à la nécessité de prendre des décisions d’ordre stratégique il a réussi à lancer dans le combat spirituel pour l’avenir de l’Eglise, et donc de la Russie, des forces fraîches puisées dans ses réserves personnelles. Aujourd’hui ses disciples, ses enfants spirituels, ses compagnons constituent le noyau actif, intellectuellement dynamique de notre Eglise. Il suffit de dire que le premier évêque à avoir été sacré par le défunt métropolite a été le jeune archimandrite Alexis (Riddiger), il fut nommé à la chaire de Tallin et d’Estonie. C’est maintenant Sa Sainteté Alexis II, patriarche de Moscou et de la Russie.
Fidèle à la cause de l’unité des chrétiens, Mgr Nicodème puisait spirituellement et intellectuellement à la théologie patristique. Cette théologie avait l’immense mérite de « s’être développée sans se détacher de la Tradition Apostolique, de se fonder sur la Révélation Divine et donnait une réponse pertinente aux questions que la vie venait poser devant nous ». Il existe cependant des milieux en marge de l’Eglise qui s’emploient à faire de la radieuse mémoire de Mgr Nicodème un objet de controverse. Ces personnes s’emploient à reprocher à ce grand homme d’Eglise sa participation au mouvement œcuménique, à la lutte pour la paix alors que c’est précisément cette participation qui, dans une conjecture historique extrêmement dangereuse pour l’existence même de notre Eglise, a été pour nous une ancre de salut. Laissons de coté ces critiques au verbe fort : ils ne connaissent pas ou ne comprennent ni l’histoire de l’Eglise dont le bien leur tient soit disant à cœur, ni l’histoire du pays dont ils se font passer pour de fidèles patriotes. Je suis convaincu que les auteurs de ces allégations n’ont pas, à la différence du métropolite Nicodème, accompli dans leur vie d’exploit pour le bien de l’Eglise et de la Patrie.
Winston Churchill à dit qu’il n’avait pas la moindre intention de présider à la liquidation de l’Empire Britannique ! A ceux qui noircissent le nom de Mgr Nicodème alors qu’il se trouve outre-tombe, à ceux qui sont les otages volontaires de notions abstraites et de schémas irréels nous pouvons répondre que l’unique faute du défunt a consisté à ne pas accepter le rôle qui lui était proposé, celui de « fossoyeur vertueux » de son Eglise ; Mgr Nicodème s’est engagé dans la voie d’une défense inventive et novatrice de l’Eglise, et il a abouti.
Si ce n’étaient l’étonnante faculté de pressentir l’avenir, l’immense intuition spirituelle, le dévouement plein d’abnégation au service de l’Eglise de ce serviteur de Dieu il est tout à fait envisageable que les derniers orthodoxes du pays auraient célébré le millénaire du baptême de la Russie terrés dans de nouvelles catacombes. Il est possible qu’à l’ère de la « perestroïka » gorbatchévienne et du tout permis sous Eltsine il ne se serait trouvé personne pour faire face à l’invasion des missionnaires étrangers dans l’ancienne Sainte Russie.
Oui, bien sûr, le providentiel triomphe stratégique dans le combat invisible que livrait le métropolite Nicodème était parfois obtenu au prix de compromis tactiques. Oui, l’Eglise était tenue de suivre des règles du jeu artificielles et imposées.
Bref, il s’agissait de l’art du possible. Mais personne, jamais, n’a pu reprocher à Mgr Nicodème d’avoir abjuré la foi ou d’avoir ignoré les intérêts de l’Orthodoxie Russe ou d’avoir refusé de témoigner de la vérité face au monde hétérodoxe, d’avoir fait preuve d’un conformise veule dans ses rapports avec le pouvoir.
Tout ceci était évident aux yeux du professeur A.Kartachov (Paris), historien et critique conséquent de la situation de l’Eglise en URSS. Il écrivait : « Un chrétien ne peut accepter toutes les imperfections de l’Etat que dans l’esprit de la mise en œuvre du « Royaume de Dieu et de sa justice » (Mt 6-33), tout en ressentant profondément le péché et l’imperfection de ces efforts sur terre ».
Nous pouvons supposer que l’exceptionnel talent ecclésial de Mgr Nicodème avait pour moteur ce désir inassouvissable d’incarner dans sa mission « la justice du Royaume de Dieu » allié à une conscience profonde de l’imperfection et du péché inhérent à l’effort humain.
Mgr Nicodème était un homme d’Eglise et, par conséquent un homme appartenant au monde dans l’acceptation universelle de ce mot. A l’instar de Martin Luther King il aurait pu s’exclamer : « J’ai un rêve ». Ce rêve était celui de la puissante unité de tous ceux qui suivent le Christ et de la reconstitution de l’oecumenia chrétienne fondée sur les Écritures et la Tradition de l’ancienne Eglise non divisée des temps apostoliques. On ne saurait le tenir responsable de ce que ce grand idéal soit resté irréalisable, terni par le péché et la division qui frappent la communauté humaine. Mgr Nicodème disait : « Il suffit de peu pour introduire la division mais des efforts en vérité héroïques sont indispensables pour surmonter la division et, de surcroît, une aide Divine toute particulière ».
Le métropolite Nicodème oeuvrait dans ce sens d’une façon permanente. Il aspirait à l’unité panorthodoxe et, plus loin, à celle de tous les chrétiens. Mgr Nicodème bénéficiait manifestement dans ces efforts du soutien de Dieu. Les contradicteurs modernes de Mgr Nicodème ne se souviennent sans doute pas qu’il avait été à la source du processus qui a permis de panser les plaies du schisme tragique dont souffrait l’orthodoxie russe. C’est à son initiative que le Concile de 1971 a décidé de lever les anathèmes prononcés à l’égard des anciens rites et aux chrétiens orthodoxes qui respectaient ces rites par le Concile de Moscou de 1656 et du grand concile de Moscou de 1667. Mgr Nicodème se prononça pour la reconnaissance des anciens rites en tant qu’ayant la même portée sotériologique que les rites nouveaux et étant de la même valeur.
La tradition de la présence de moines russes dans les cloîtres du Saint Mont Athos était en presque totale déperdition. Mgr Nicodème fit personnellement de son mieux pour que cette tradition renaisse. C’est dans une grande part grâce à la persévérance du défunt métropolite que l’Eglise Orthodoxe d’Amérique se vit conférer l’autocéphalie alors que l’Eglise Orthodoxe du Japon devenait autonome.
En tant que Président du Service des Relations Extérieures du patriarcat de Moscou a su, béni en cela par le Saint Synode et le patriarche, jeter les fondement d’un dialogue théologique bilatéral avec l’Eglise Évangélique d’Allemagne (RFA), l’Union des Églises Évangéliques (RDA), l’Eglise Évangélique Luthérienne de Finlande, les Églises anglicanes, l’Eglise Catholique Romaine. Mgr Nicodème conduisait les délégations de l’Eglise Orthodoxe Russe aux III, IV et V èmes Assemblées du Conseil Œcuménique des Églises.
Homme de paix, ce grand prélat était avant tout un homme d’Eglise. Dans l’homélie prononcée au repas funéraire le jour de l’inhumation de Monseigneur Nicodème, métropolite de Leningrad et de Novgorod, Sa Sainteté le patriarche Pimène a dit : « Le prélat rappelé à Dieu était en premier lieu un bon pasteur de l’Eglise du Christ, toute sa vie a été un vie de labeur inlassable, de prières pour le salut éternel du troupeau qui lui avait été confié par la Providence Divine ». Le primat de l’Eglise Russe a évoqué le deuil et la tristesse des croyants, ceux de Leningrad et de Novgorod en premier.
Ces paroles étaient profondément authentiques car la mission pastorale était la véritable vocation du défunt métropolite. Cette vocation s’était clairement manifestée dans les paroisses qu’il desservait en tant que prêtre, dans les diocèses dont il était l’évêque ainsi que dans ses vastes activités internationales. Les proches du métropolite savaient à quel point il était attaché au bon ordonnancement, à l’harmonie des offices, que sa foi était pure et simple au point d’en paraître parfois semblable à celle des enfants. Il lui arrivait de venir chanter dans le chœur, et il le faisait avec plaisir et de lire les cathismes. Il élaborait en slavon d’église et ceci avec une facilité surprenante aux yeux des contemporains des textes d’acathiste aux saints nouvellement canonisés ainsi que des tropaires, des kondaks et des hymnes à la gloire des saints.
Le métropolite Nicodème a visité à plusieurs reprises chacune des paroisses de ses diocèses. Il en connaissait tous les clercs de visage comme de nom. Il disait quotidiennement la liturgie, ne refusait jamais de procéder à des baptêmes, il donnait l’absolution à ceux qui apportaient leur repentir, il s’entretenait jusqu’à tard dans la nuit avec tous ceux qui avaient besoin de ses conseils et de son soutien. Il trouvait des solutions aux conflits, dissipait les malentendus entre les personnes… Les archives de la métropole de Leningrad attestent de ce que chaque année le métropolite Nicodème étudiait des milliers de dossiers qui requéraient sa signature. Le métropolite Nicodème vivait et oeuvrait avec les fidèles de son troupeau en plein accord avec une règle qu’il avait lui-même formulé : « Les semailles du grain évangélique ne donneront des récoltes abondantes que lorsque le prédicateur offre le bon exemple d’une vie dans le Christ ».Il m’arrive parfois d’entendre que des ennemis cachés et manifestes de notre Eglise qui n’ont pas la force d’âme suffisante pour pardonner au métropolite Nicodème ses dons brillants et la manière dont il a fidèlement servi l’orthodoxie russe calomnient systématiquement sa mémoire le traitant injurieusement de «crypto-catholique et d’ oecuméniste ». J’ai le souvenir très fort de ce que mon défunt maître a, en effet, officié deux liturgies clandestines car j’en ai été le témoin.
La première s’est tenue près d’un mur du camp de concentration des îles Solovki, mur criblé de balles car il servait aux exécutions. L’archipel est maintenant considéré comme le « Golgotha de la Russie ». La deuxième liturgie « clandestine » avait été célébrée dans l’île monastère de Valaam, dans l’église du cimetière que les blasphémateurs avaient réduite en ruines et souillée. Le métropolite était convaincu de la nécessité absolue de ces liturgies. C’était à ses yeux un besoin spirituel et un devoir incontournable. Il faut rappeler que nous étions alors à l’époque de la « stagnation » la plus obtuse, la plus désespérée. Dans le meilleur des cas ceux qu’on désignait « les simples soviétiques » formés à l’athéisme dès leur enfance auraient traînés au poste de milice sans la moindre hésitation « ces popes pris en flagrant délit ». Dans le pire des cas ils s’en seraient méchamment pris à l’officiant, auraient souillé le Sacrement. Par la grâce de Dieu rien de ceci ne s’est cependant pas produit. Ces deux liturgies « secrètes », j’ai eu le bonheur de les concélébrer avec le métropolite Nicodème et elles restent dans ma mémoire comme l’une des émotions religieuses les plus fortes de toutes de ma vie.
Je disais il y a trente ans devant le cercueil de mon maître rappelé à Dieu avant l’heure que Mgr Nicodème ne se souciait jamais de savoir s’il lui sera donné de participer aux futures transformations dans la vie de l’Eglise étant ici bas sur Terre ou de les contempler de là où il trouverait le repos. Je crois pouvoir partiellement expliquer aujourd’hui cette attitude par l’étonnante faculté du défunt d’entrevoir l’avenir, du moins dans ses grands traits. Lorsque les persécutions de l’Eglise battaient leur plein, il prédisait d’une manière convaincue : « Ne vous laissez pas abattre, frères ! Le temps est proche quand nous entendrons sonner les cloches des basiliques du Kremlin ».
Un penseur vertueux des temps récents citait l’image d’une Grande Russie, « homme visible » et de la Sainte Russie « monde intérieur de cet homme visible ». Nous sommes axés aujourd’hui sur la renaissance de la grandeur extérieure, apparente de la Patrie et, en même temps, sur la rénovation de son essence spirituelle.Tel est précisément, si l’on y pense, l’objectif auquel s’était consacré le grand prélat qu’était Mgr Nicodème. Lors de son sacre il a, en quelques mots, formulé la vérité la plus complète qui puisse être dite à son propre propos : «Ma vie consciente toute entière appartient à l’Eglise ».
Traduction française Nikita Krivocheine
Rédigé par l'équipe de rédaction le 12 Octobre 2009 à 10:16
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