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Xenia KRIVOCHEINE
Nous parlons beaucoup ces derniers temps de l’émigration russe de « la première vague », de son admirable patrimoine artistique et culturel, du maintien, loin du pays, qu’elle a assumé de l’esprit de notre foi orthodoxe. Mais ce tableau n’est pas sans ombres : à la suite de la disparition de l’URSS la colonie émigrée est tombée dans une grande confusion et sa cohésion a commencé à se fissurer.
Les diasporas ont de tout temps vécu dans les dissensions. Chez les Russes de France il arrivait qu’au sein d’une même famille l’un aille prier dans les églises de l’EORHF, l’autre soit paroissien du patriarcat de Moscou et le troisième fréquente la cathédrale de la rue Daru. Il y a l’exemple d’une famille dont le père fidèle monarchiste avait un fils adepte de Trotski.
Mais tous étaient animés du même espoir : la fin des soviets, la possibilité d’aller prier dans les églises d’une Russie libérée, de se rendre sur les tombes des ancêtres.
Cela est arrivé, les rêves se sont réalisés. Plusieurs émigrés sont même allés vivre et travailler en Fédération de Russie. Des centaines de livres sont parus en Russie consacrés à l’émigration, de très nombreux films y ont été tournés. Une « Maison de la Russie à l’étranger » a été ouverte il y a quinze ans à Moscou sous les auspices d’Alexandre Soljenitsyne.
Nous parlons beaucoup ces derniers temps de l’émigration russe de « la première vague », de son admirable patrimoine artistique et culturel, du maintien, loin du pays, qu’elle a assumé de l’esprit de notre foi orthodoxe. Mais ce tableau n’est pas sans ombres : à la suite de la disparition de l’URSS la colonie émigrée est tombée dans une grande confusion et sa cohésion a commencé à se fissurer.
Les diasporas ont de tout temps vécu dans les dissensions. Chez les Russes de France il arrivait qu’au sein d’une même famille l’un aille prier dans les églises de l’EORHF, l’autre soit paroissien du patriarcat de Moscou et le troisième fréquente la cathédrale de la rue Daru. Il y a l’exemple d’une famille dont le père fidèle monarchiste avait un fils adepte de Trotski.
Mais tous étaient animés du même espoir : la fin des soviets, la possibilité d’aller prier dans les églises d’une Russie libérée, de se rendre sur les tombes des ancêtres.
Cela est arrivé, les rêves se sont réalisés. Plusieurs émigrés sont même allés vivre et travailler en Fédération de Russie. Des centaines de livres sont parus en Russie consacrés à l’émigration, de très nombreux films y ont été tournés. Une « Maison de la Russie à l’étranger » a été ouverte il y a quinze ans à Moscou sous les auspices d’Alexandre Soljenitsyne.
Comment ces bouleversements ont été vécus dans les capitales de la diaspora Paris, Londres, Rome ?
Beaucoup de phénomènes surprenants, et ceci contre toute attente : de très nombreuses entités ecclésiales, associations, maisons d’édition n’ont pas réussi à prendre le tournant. L’enthousiasme, les subventions, les dons privés ont tari. La plupart des généreux donateurs se sont transposés à Sainte Geneviève.
L’administration américaine, les associations catholiques, les particuliers ont cessé de mettre la main au porte-monnaie. L’ennemi communiste avait disparu et c’est vers l’Afrique ravagée par les famines, vers les catholiques des pays les plus pauvres, etc. que l’aide a été canalisée.
C’est en masse que les migrants venus de l’espace post soviétique et des pays orthodoxes ont afflué en Italie, en Espagne, en France et en Allemagne. Redevenue libre, l’Eglise russe a tendu une main fraternelle à ses enfants spirituels disséminés dans le monde entier. L’Eglise orthodoxe russe hors frontières et l’Eglise russe patriarcat de Moscou ont, en 2007, signé un Acte d’union canonique.
Plus de rideau de fer : chez de nombreux réfugiés qui s’étaient entièrement consacrés à son démantèlement on a vu s’installer une sensation de vide et d’inutilité.
Comment peut réagir une personne qui a passé sa vie à thésauriser, à sauvegarder et qui voit sa descendance indifférente aux trésors accumulés ? Les petits-enfants des émigrés, du moins dans leur majorité, se sont assimilés dans les pays d’accueil, ne fréquentent plus les paroisses, n’empruntent plus de livres à la bibliothèque Tourguenev, parlent fort mal la langue des parents et n’ont qu’une vague idée de l’existence de l’Institut Saint Serge.
Il ne s’agit cependant pas tellement de nos petits-fils, voire de nos arrière-petits-fils mais aussi de maisons, de temples, de bibliothèques, d’archives, de collections largement connus, souvent filmés et dont nous observons « en temps réel » la ruine et la décrépitude. Nos vieillards nous quittent emportant avec eux le patrimoine et la mémoire de l’émigration. Notre passé, les souffrances de nos ancêtres, leurs espoirs d’une prochaine libération de la Russie…
C’est la nouvelle Russie qui, il y a deux ou trois ans, a transféré 450.000 € à la municipalité de Sainte Geneviève des Bois pour l’entretien du cimetière et qui a remis 100.000 € au Musée cosaque d’Asnières pour qu’y soient effectués des travaux de réfection.
D’autres offres d’aide désintéressée ont été faites par la suite. Elles ont été refusées pour des raisons difficiles à imaginer : que tout disparaisse, nous préférons mourir indigents mais dans des ruines bien à nous, nous n’accepterons rien de la Russie post soviétique. Les moyens manquent pour entretenir le patrimoine, aucune aide à attendre, indifférence des générations qui suivent…
Comment ne pas dire que c’est là un crime de lèse-ancêtres, une manifestation de mépris à l’égard de leur mémoire et un désir peu fraternel d’ignorer la Russie renaissante. J’entends déjà les épithètes qui nous été si souvent adressées « mensonges, calomnies, impudentes élucubrations, ignoble propagande, malice… ». Laissons ces invectives sur la conscience de ceux qui y ont si fréquemment recours. La caravane devra passer ! D’où vient la volonté de ne rien faire pour arrêter cette destruction, de ne rien créer pour soi même ?
Ces gens se sont obstinément appliqués à ne pas laisser s’installer un dialogue fraternel entre l’Eglise russe et l’Archevêché, ont lancé et mené des campagnes contre l’installation du séminaire orthodoxe d’Epinay s/Sénart et du Centre spirituel et culturel quai Branly. Pour ceux qui l’auraient oublié précisions que Saint Serge n’a pas, ou très peu, formé de prêtres.
A quoi bon mettre des bâtons dans les roues et vouloir faire obstacle à des projets dont la nécessité est évidente ?
Je m’abstiendrai de traiter de Nice tellement la situation y est évidente; inutile d’essayer de convertir les obstinés.
Laissons les habitués du Web débattre du bien fondé de la construction d’une cathédrale à Paris « alors que, nous dit-on, la Russie est en ruines ». La Russie a toujours construit des églises dans d’autres pays, il est bon que les Russes mettent fin à leur sentiment d’isolement, séquelle du rideau de fer. Il est bon que les Russes sachent que le métochion Saint Serge à Jérusalem leur a été restitué de même que l’église de Bari en Italie, que l’Eglise russe disposera à Paris d’une vraie cathédrale et ne devra pas se contenter d’un ancien garage, qu’il en est de même à Londres où la cathédrale avait failli leur être confisquée …
* * *
Lors de l’une de mes visites à la « Maison de la Russie à l’étranger à Moscou » j’ai été étonnée de voir que les murs de cette admirable institution étaient ornés des fresques authentiques de sœur Ioanna (Reitlinger). Un texte explicatif disait «i Ces fresques ont été sauvées en 2003 par [N.A. Struve du centre de Montgeron où elles se trouvaient, transportées en Russie et remises au Fonds Soljenitsyne »]i. Ce sauvetage est passé largement inaperçu par de nombreux émigrés russes. Personne n’avait été informé de cette opération quasi clandestine. Ces œuvres n’appartenaient pas au professeur Struve à titre personnel, de même d’ailleurs que le centre de Montgeron. Aussi, des consultations préalables auraient été souhaitables. Le Centre de Montgeron est devenu un lieu d’endettement, de procès interminables, d’incurie et de dégradation. Le déni de réalité qui s’est installé chez N.Struve y est pour beaucoup.
On ne peut, bien sûr, que se réjouir de voir les œuvres de sœur Ioanna sauvées des bûchers que les SDF font brûler sur le site de Montgeron. Des milliers de livres devenus inutiles ont quitté les caves d’YMCA-PRESS pour aller dans les bibliothèques russes ce qui est une bonne chose.
N’y a-t-il pas là une étrange contradiction ? Sauver des livres voués à la moisissure, des fresques menacées par la destruction et, en même, s’opposer de toutes ses forces à ce que la Russie prenne sur soi les travaux indispensables à la rénovation de la cathédrale de Nice, s’occupe du Moulin de Senlis (Montgeron) et mette en chantier une cathédrale à Paris ?
Le centre de Montgeron a été fondé en 1939 pour héberger des enfants d’émigrés russes.
En 1957 une église y fut construite en l’honneur de Saint Séraphin de Sarov, de Saint Serge et de Saint Herman du Valaam. Son architecte, Nikita Kovalenko, a choisi le style byzantin du XII siècle. Les fresques sont du père Grégoire Krug, celle de la Sainte Trinité dans l’abside ainsi que l’iconostase sont d’une grande beauté. Le centre cesse d’héberger des enfants en 1975. L’Association d’aide aux réfugiés russes en France (fondée en 1934), y invite le collectionneur de tableaux Alexandre Gleser et lui offre la possibilité d’y habiter et d’y organiser une exposition d’art russe non conformiste. Peu après l’exposition doit fermer ses visiteurs étant fort peu nombreux. Les personnes qui se réunissaient alors à Montgeron avaient un comportement peu adéquat… Vers la fin des années 70 le Centre, comme d’ailleurs nombre d’autres institutions émigrées, était sur la pente descendante. De 1978 jusqu’à la moitié des années 90 le Centre est resté sans activités. Puis des migrants venus des Républiques de l’ex URSS se sont substitués aux réfugiés politiques. Le domaine s’est complètement dégradé, le grand jardin s’est transformé en terrain vague, le château a été découpé en logements par des parois en contreplaqué, sorte d’appartement communautaire ou kommounalka. Les squatters n’acquittaient pas les factures EDF-GDF. Les nouveaux habitants n’avait nul besoin de l’église. Celle-ci est restée fermée pendant une longue période, dans l’attente de nouveaux fidèles.
L’écroulement de crépi survenu récemment à la cathédrale de Nice, l’état de ses fresques ne sont rien par rapport à la décrépitude qu’a connu le domaine du Moulin de Senlis. Une paroisse serbe s’y installa pour un temps et s’en alla en 2003. Puis il y a eu une période pendant laquelle c’est le père Placide, venu du monastère Simonos-Petra, (métochion de la Grande Laure du Mont Athos) au Sud de la France qui a desservi la paroisse. Mais aucune vie paroissiale n’a repris. Les offices cessèrent définitivement à partir de 2003. C’est à partir de là que N.Struve se met à installer des SDF à Montgeron. En même temps il sauve de leur présence les fresque de sœur Ioanna (Reitlinger).
A partir de 2005 une communauté consistant d’orthodoxes résidant dans la région commence à se reconstituer. C’est à leur demande que des clercs du diocèse de Chersonèse se remettent à dire régulièrement des offices. La communauté compte actuellement plus de 100 fidèles. Par son nombre, elle est devenue la deuxième paroisse du diocèse sur le territoire français. Plus de 240 personnes étaient présente à l’office pascal de minuit. Chacun des fidèles participe à la vie de la paroisse à la mesure de ses moyens.
A l’exemple de la sœur Ioanna et de mère Marie (Skobtsov) qui ont tant fait dans les années 20 et 30 pour installer des églises en France, ces orthodoxes arrivés dans les années post soviétiques ont de leurs mains restauré l’église, confectionné des chasubles, aménagé les locaux, réparé les conduites d’eau et le réseau électrique. Le réfectoire attenant à l’église est redevenu un endroit animé : cours de catéchisme, rencontres avec des prêtres, école du dimanche. Tout ceci est relaté sur le site de la paroisse.
Voici ce que disent les membres de l’association cultuelle de Montgeron : « Nous souhaiterions que, dans la mesure du possible, cet endroit aide à glorifier notre Seigneur Jésus-Christ. Les membres de l’association font pour cela tout ce qui est à la mesure de leurs forces. Devenir un métochion du monastère des îles Solovki nous paraît être l’un des projets qui servirait le mieux notre cause. Cette suggestion a été faite par les responsables du diocèse de Chersonèse (patriarcat de Moscou). Nous éprouvons actuellement de grandes difficultés, essentiellement d’ordre financier. Les frais que nous devons assumer équivalent à environ un tiers du coût de la propriété dans son état actuel. Certains de ces frais (les taxes foncières, en particulier) doivent être couverts dans l’immédiat. La majeure partie de ces sommes pourrait être remboursée avec un étalement des paiements sur une période de 5 à 10 ans. Nous espérons que le monastère des Solovki serait intéressé de disposer d’un métochion non loin de Paris afin de pouvoir irradier la Lumière du Christ en terre de France où prédomine la sécularisation. Tout au Moulin de Senlis favoriserait l’installation d’un tel métochion : une paroisse avec de nombreux fidèles, plusieurs bâtiments qui, si restaurés, se prêteraient à l’installation de cellules monastiques, un réfectoire et des cuisines, une salle de réunion, un grand parc, un cours d’eau avec une petite île. Tout ceci à proximité de Paris. Il ne reste qu’à mettre ce projet en route. D’autres propositions peuvent se faire jour.
L’Association est disposée à envoyer l’ensemble des informations dont elle dispose à tous ceux qui manifesteraient leur intérêt : histoire de l’association « Centre d’aide », histoire du Moulin de Senlis, histoire du refuge pour enfants russes, description des lots fonciers et plan cadastral, bilan financier, descriptif des difficultés existantes, aperçu de la vie paroissiale de l’église Saint Séraphin de Sarov, etc. ».
* * *
La Providence a fait que les efforts des fidèles ont ramené la paroisse à la vie. Les nouveaux émigrés, loin d’être aisés, ont repris le flambeau de Sophie Zernov, la fondatrice du refuge. Elle avait en 1939, sans disposer de moyens, ne comptant que sur l’aide des bénévoles, réussi à créer de toute pièce ce coin de Russie dans la banlieue parisienne. La nouvelle communauté a en 2005 réussi, après des dizaines d’années de délabrement, à reprendre le flambeau. Il aurait été plus cohérent de la part de M. Nikita Struve de ne pas se limiter à sauver les fresques de la paroisse en les emmenant à Moscou mais aussi à accorder son soutien aux fidèles qui vivent à proximité de lui. Pourquoi faut-il que les croyants envoient des lettres en Russie, cherchent aide et soutien auprès de leurs frères lointains ?
Il convient de préciser que N.Struve persévère à délivrer des billets de logements à des personnes sans titre de séjour. Ces personnes n’ont rien à voir avec l’orthodoxie et font leur possible pour ne pas laisser une nouvelle vie reprendre dans ces lieux historiques. N.Struve initie procès sur procès manifestant ainsi un acharnement judiciaire déplacé.
Il ne nous reste qu’à prier Saint Séraphin de Sarov et mère Marie (Skobtsov) canonisée par le patriarcat de Constantinople afin qu’ils intercèdent en faveur de la communauté de Montgeron.
Pavoslavie i Mir
Traduction "PO" Larissa
Beaucoup de phénomènes surprenants, et ceci contre toute attente : de très nombreuses entités ecclésiales, associations, maisons d’édition n’ont pas réussi à prendre le tournant. L’enthousiasme, les subventions, les dons privés ont tari. La plupart des généreux donateurs se sont transposés à Sainte Geneviève.
L’administration américaine, les associations catholiques, les particuliers ont cessé de mettre la main au porte-monnaie. L’ennemi communiste avait disparu et c’est vers l’Afrique ravagée par les famines, vers les catholiques des pays les plus pauvres, etc. que l’aide a été canalisée.
C’est en masse que les migrants venus de l’espace post soviétique et des pays orthodoxes ont afflué en Italie, en Espagne, en France et en Allemagne. Redevenue libre, l’Eglise russe a tendu une main fraternelle à ses enfants spirituels disséminés dans le monde entier. L’Eglise orthodoxe russe hors frontières et l’Eglise russe patriarcat de Moscou ont, en 2007, signé un Acte d’union canonique.
Plus de rideau de fer : chez de nombreux réfugiés qui s’étaient entièrement consacrés à son démantèlement on a vu s’installer une sensation de vide et d’inutilité.
Comment peut réagir une personne qui a passé sa vie à thésauriser, à sauvegarder et qui voit sa descendance indifférente aux trésors accumulés ? Les petits-enfants des émigrés, du moins dans leur majorité, se sont assimilés dans les pays d’accueil, ne fréquentent plus les paroisses, n’empruntent plus de livres à la bibliothèque Tourguenev, parlent fort mal la langue des parents et n’ont qu’une vague idée de l’existence de l’Institut Saint Serge.
Il ne s’agit cependant pas tellement de nos petits-fils, voire de nos arrière-petits-fils mais aussi de maisons, de temples, de bibliothèques, d’archives, de collections largement connus, souvent filmés et dont nous observons « en temps réel » la ruine et la décrépitude. Nos vieillards nous quittent emportant avec eux le patrimoine et la mémoire de l’émigration. Notre passé, les souffrances de nos ancêtres, leurs espoirs d’une prochaine libération de la Russie…
C’est la nouvelle Russie qui, il y a deux ou trois ans, a transféré 450.000 € à la municipalité de Sainte Geneviève des Bois pour l’entretien du cimetière et qui a remis 100.000 € au Musée cosaque d’Asnières pour qu’y soient effectués des travaux de réfection.
D’autres offres d’aide désintéressée ont été faites par la suite. Elles ont été refusées pour des raisons difficiles à imaginer : que tout disparaisse, nous préférons mourir indigents mais dans des ruines bien à nous, nous n’accepterons rien de la Russie post soviétique. Les moyens manquent pour entretenir le patrimoine, aucune aide à attendre, indifférence des générations qui suivent…
Comment ne pas dire que c’est là un crime de lèse-ancêtres, une manifestation de mépris à l’égard de leur mémoire et un désir peu fraternel d’ignorer la Russie renaissante. J’entends déjà les épithètes qui nous été si souvent adressées « mensonges, calomnies, impudentes élucubrations, ignoble propagande, malice… ». Laissons ces invectives sur la conscience de ceux qui y ont si fréquemment recours. La caravane devra passer ! D’où vient la volonté de ne rien faire pour arrêter cette destruction, de ne rien créer pour soi même ?
Ces gens se sont obstinément appliqués à ne pas laisser s’installer un dialogue fraternel entre l’Eglise russe et l’Archevêché, ont lancé et mené des campagnes contre l’installation du séminaire orthodoxe d’Epinay s/Sénart et du Centre spirituel et culturel quai Branly. Pour ceux qui l’auraient oublié précisions que Saint Serge n’a pas, ou très peu, formé de prêtres.
A quoi bon mettre des bâtons dans les roues et vouloir faire obstacle à des projets dont la nécessité est évidente ?
Je m’abstiendrai de traiter de Nice tellement la situation y est évidente; inutile d’essayer de convertir les obstinés.
Laissons les habitués du Web débattre du bien fondé de la construction d’une cathédrale à Paris « alors que, nous dit-on, la Russie est en ruines ». La Russie a toujours construit des églises dans d’autres pays, il est bon que les Russes mettent fin à leur sentiment d’isolement, séquelle du rideau de fer. Il est bon que les Russes sachent que le métochion Saint Serge à Jérusalem leur a été restitué de même que l’église de Bari en Italie, que l’Eglise russe disposera à Paris d’une vraie cathédrale et ne devra pas se contenter d’un ancien garage, qu’il en est de même à Londres où la cathédrale avait failli leur être confisquée …
* * *
Lors de l’une de mes visites à la « Maison de la Russie à l’étranger à Moscou » j’ai été étonnée de voir que les murs de cette admirable institution étaient ornés des fresques authentiques de sœur Ioanna (Reitlinger). Un texte explicatif disait «i Ces fresques ont été sauvées en 2003 par [N.A. Struve du centre de Montgeron où elles se trouvaient, transportées en Russie et remises au Fonds Soljenitsyne »]i. Ce sauvetage est passé largement inaperçu par de nombreux émigrés russes. Personne n’avait été informé de cette opération quasi clandestine. Ces œuvres n’appartenaient pas au professeur Struve à titre personnel, de même d’ailleurs que le centre de Montgeron. Aussi, des consultations préalables auraient été souhaitables. Le Centre de Montgeron est devenu un lieu d’endettement, de procès interminables, d’incurie et de dégradation. Le déni de réalité qui s’est installé chez N.Struve y est pour beaucoup.
On ne peut, bien sûr, que se réjouir de voir les œuvres de sœur Ioanna sauvées des bûchers que les SDF font brûler sur le site de Montgeron. Des milliers de livres devenus inutiles ont quitté les caves d’YMCA-PRESS pour aller dans les bibliothèques russes ce qui est une bonne chose.
N’y a-t-il pas là une étrange contradiction ? Sauver des livres voués à la moisissure, des fresques menacées par la destruction et, en même, s’opposer de toutes ses forces à ce que la Russie prenne sur soi les travaux indispensables à la rénovation de la cathédrale de Nice, s’occupe du Moulin de Senlis (Montgeron) et mette en chantier une cathédrale à Paris ?
Le centre de Montgeron a été fondé en 1939 pour héberger des enfants d’émigrés russes.
En 1957 une église y fut construite en l’honneur de Saint Séraphin de Sarov, de Saint Serge et de Saint Herman du Valaam. Son architecte, Nikita Kovalenko, a choisi le style byzantin du XII siècle. Les fresques sont du père Grégoire Krug, celle de la Sainte Trinité dans l’abside ainsi que l’iconostase sont d’une grande beauté. Le centre cesse d’héberger des enfants en 1975. L’Association d’aide aux réfugiés russes en France (fondée en 1934), y invite le collectionneur de tableaux Alexandre Gleser et lui offre la possibilité d’y habiter et d’y organiser une exposition d’art russe non conformiste. Peu après l’exposition doit fermer ses visiteurs étant fort peu nombreux. Les personnes qui se réunissaient alors à Montgeron avaient un comportement peu adéquat… Vers la fin des années 70 le Centre, comme d’ailleurs nombre d’autres institutions émigrées, était sur la pente descendante. De 1978 jusqu’à la moitié des années 90 le Centre est resté sans activités. Puis des migrants venus des Républiques de l’ex URSS se sont substitués aux réfugiés politiques. Le domaine s’est complètement dégradé, le grand jardin s’est transformé en terrain vague, le château a été découpé en logements par des parois en contreplaqué, sorte d’appartement communautaire ou kommounalka. Les squatters n’acquittaient pas les factures EDF-GDF. Les nouveaux habitants n’avait nul besoin de l’église. Celle-ci est restée fermée pendant une longue période, dans l’attente de nouveaux fidèles.
L’écroulement de crépi survenu récemment à la cathédrale de Nice, l’état de ses fresques ne sont rien par rapport à la décrépitude qu’a connu le domaine du Moulin de Senlis. Une paroisse serbe s’y installa pour un temps et s’en alla en 2003. Puis il y a eu une période pendant laquelle c’est le père Placide, venu du monastère Simonos-Petra, (métochion de la Grande Laure du Mont Athos) au Sud de la France qui a desservi la paroisse. Mais aucune vie paroissiale n’a repris. Les offices cessèrent définitivement à partir de 2003. C’est à partir de là que N.Struve se met à installer des SDF à Montgeron. En même temps il sauve de leur présence les fresque de sœur Ioanna (Reitlinger).
A partir de 2005 une communauté consistant d’orthodoxes résidant dans la région commence à se reconstituer. C’est à leur demande que des clercs du diocèse de Chersonèse se remettent à dire régulièrement des offices. La communauté compte actuellement plus de 100 fidèles. Par son nombre, elle est devenue la deuxième paroisse du diocèse sur le territoire français. Plus de 240 personnes étaient présente à l’office pascal de minuit. Chacun des fidèles participe à la vie de la paroisse à la mesure de ses moyens.
A l’exemple de la sœur Ioanna et de mère Marie (Skobtsov) qui ont tant fait dans les années 20 et 30 pour installer des églises en France, ces orthodoxes arrivés dans les années post soviétiques ont de leurs mains restauré l’église, confectionné des chasubles, aménagé les locaux, réparé les conduites d’eau et le réseau électrique. Le réfectoire attenant à l’église est redevenu un endroit animé : cours de catéchisme, rencontres avec des prêtres, école du dimanche. Tout ceci est relaté sur le site de la paroisse.
Voici ce que disent les membres de l’association cultuelle de Montgeron : « Nous souhaiterions que, dans la mesure du possible, cet endroit aide à glorifier notre Seigneur Jésus-Christ. Les membres de l’association font pour cela tout ce qui est à la mesure de leurs forces. Devenir un métochion du monastère des îles Solovki nous paraît être l’un des projets qui servirait le mieux notre cause. Cette suggestion a été faite par les responsables du diocèse de Chersonèse (patriarcat de Moscou). Nous éprouvons actuellement de grandes difficultés, essentiellement d’ordre financier. Les frais que nous devons assumer équivalent à environ un tiers du coût de la propriété dans son état actuel. Certains de ces frais (les taxes foncières, en particulier) doivent être couverts dans l’immédiat. La majeure partie de ces sommes pourrait être remboursée avec un étalement des paiements sur une période de 5 à 10 ans. Nous espérons que le monastère des Solovki serait intéressé de disposer d’un métochion non loin de Paris afin de pouvoir irradier la Lumière du Christ en terre de France où prédomine la sécularisation. Tout au Moulin de Senlis favoriserait l’installation d’un tel métochion : une paroisse avec de nombreux fidèles, plusieurs bâtiments qui, si restaurés, se prêteraient à l’installation de cellules monastiques, un réfectoire et des cuisines, une salle de réunion, un grand parc, un cours d’eau avec une petite île. Tout ceci à proximité de Paris. Il ne reste qu’à mettre ce projet en route. D’autres propositions peuvent se faire jour.
L’Association est disposée à envoyer l’ensemble des informations dont elle dispose à tous ceux qui manifesteraient leur intérêt : histoire de l’association « Centre d’aide », histoire du Moulin de Senlis, histoire du refuge pour enfants russes, description des lots fonciers et plan cadastral, bilan financier, descriptif des difficultés existantes, aperçu de la vie paroissiale de l’église Saint Séraphin de Sarov, etc. ».
* * *
La Providence a fait que les efforts des fidèles ont ramené la paroisse à la vie. Les nouveaux émigrés, loin d’être aisés, ont repris le flambeau de Sophie Zernov, la fondatrice du refuge. Elle avait en 1939, sans disposer de moyens, ne comptant que sur l’aide des bénévoles, réussi à créer de toute pièce ce coin de Russie dans la banlieue parisienne. La nouvelle communauté a en 2005 réussi, après des dizaines d’années de délabrement, à reprendre le flambeau. Il aurait été plus cohérent de la part de M. Nikita Struve de ne pas se limiter à sauver les fresques de la paroisse en les emmenant à Moscou mais aussi à accorder son soutien aux fidèles qui vivent à proximité de lui. Pourquoi faut-il que les croyants envoient des lettres en Russie, cherchent aide et soutien auprès de leurs frères lointains ?
Il convient de préciser que N.Struve persévère à délivrer des billets de logements à des personnes sans titre de séjour. Ces personnes n’ont rien à voir avec l’orthodoxie et font leur possible pour ne pas laisser une nouvelle vie reprendre dans ces lieux historiques. N.Struve initie procès sur procès manifestant ainsi un acharnement judiciaire déplacé.
Il ne nous reste qu’à prier Saint Séraphin de Sarov et mère Marie (Skobtsov) canonisée par le patriarcat de Constantinople afin qu’ils intercèdent en faveur de la communauté de Montgeron.
Pavoslavie i Mir
Traduction "PO" Larissa
Rédigé par Xenia KRIVOCHEINE le 7 Août 2011 à 17:09
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