Plateforme libre de discussion
|
Texte proposé par Émilie van Tack
Cette année 2016, les Orthodoxes célèbrent de nouveau Pâques le 1er mai, comme ce fut le cas récemment encore en 2011, après 2005 et 1994.
Comment se fait-il que cette année, une fois de plus, nous fêtions Pâques aussi tardivement? Quelle est la signification de ce retard? Comment s'explique-t-il? Est-il simplement un accident inévitable?
Dans un article paru en 1994 dans Les nouvelles de Saint Serge, (N°18, 1994, p. 10-14) le professeur Nicolas Ossorguine avait déjà dénoncé cette anomalie.
Les Pères du IVième siècle considéraient le moment de l'équinoxe de printemps comme l'icône astronomique de la fête de Pâques, victoire de la lumière divine sur les ténèbres spirituelles. Le soleil éclaire alors en effet toutes les parties de la terre d'un éclat identique, et il se produit comme un triomphe de la lumière du soleil sur l'obscurité cosmique
Cette année 2016, les Orthodoxes célèbrent de nouveau Pâques le 1er mai, comme ce fut le cas récemment encore en 2011, après 2005 et 1994.
Comment se fait-il que cette année, une fois de plus, nous fêtions Pâques aussi tardivement? Quelle est la signification de ce retard? Comment s'explique-t-il? Est-il simplement un accident inévitable?
Dans un article paru en 1994 dans Les nouvelles de Saint Serge, (N°18, 1994, p. 10-14) le professeur Nicolas Ossorguine avait déjà dénoncé cette anomalie.
Les Pères du IVième siècle considéraient le moment de l'équinoxe de printemps comme l'icône astronomique de la fête de Pâques, victoire de la lumière divine sur les ténèbres spirituelles. Le soleil éclaire alors en effet toutes les parties de la terre d'un éclat identique, et il se produit comme un triomphe de la lumière du soleil sur l'obscurité cosmique
Que devrions-nous faire pour éviter que Pâques ne soit à nouveau fêtée lorsque l'hémisphère sud s'enfonce déjà dans l'obscurité?
Pour alimenter cette réflexion, nous désirons rappeler à la mémoire des Orthodoxes l'article de Nicolas Ossorguine qui a conservé aujourd'hui toute sa pertinence.
LA DATE DE PÂQUES ORTHODOXE, LE 1er MAI 1994
En 1994, les Chrétiens occidentaux célèbrent Pâques le 3 avril, alors que les Orthodoxes la fêtent quatre semaines plus tard, le 1er mai.
En réalité, une date aussi tardive pour la fête de Pâques n'a aucun fondement légitime puisqu'elle ne respecte pas la règle établie au IVième siècle par les Pères du 1er Concile Œcuménique de 325 concernant la date de célébration de Pâques. Rappelons cette règle, dite formule de Nicée:
Il convient de célébrer la fête Pâques le premier dimanche
après la première pleine lune qui suit l'équinoxe de printemps
Ainsi cette formule se décompose, peut-on dire, en trois "moments", qui doivent se succéder:
- premier "moment" - l'équinoxe de printemps
- deuxième "moment" - la pleine lune
- troisième "moment" - le dimanche
Malgré l'avis (erroné) des partisans de l'ancien style, (calendrier julien), qui prétendent qu'historiquement on ignore l'origine de la date de la formule de Nicée, il convient d'attirer l'attention sur l'existence d'un document grec très précieux du IVième siècle intitulé Une homélie anatolienne sur la date de Pâques en l'an 387 , qui explique cette formule en détails. Cette homélie était motivée par le fait que, en 387, pour la première fois depuis le 1er Concile Œcuménique, c'est-à-dire après quelques 62 ans, les conditions cosmiques (la position de la terre et de la lune par rapport au soleil) étaient telles que qu'en appliquant la formule de Nicée le jour de Pâques tombait un 25 avril. Ce fait provoqua le trouble parmi les chrétiens qui craignaient que la date ne fut trop tardive (!). L'auteur du document explique en détail le principe "nicéen" et sa signification, et démontre ainsi qu'une célébration exceptionnellement tardive de Pâques en 387 était incorrecte.
L'homélie anatolienne montre avec précision que dès le IVième siècle c'est-à-dire bien avant l'établissement même des tables du comput pascal (VIIième-VIIIième siècle), une tradition écrite existait déjà dans l'Eglise. Nous l'avons appelée plus haut formule de Nicée. L'application de cette formule exigeait la conformité scrupuleuse de tous les "moments": équinoxe de printemps, pleine lune, dimanche (cf. plus haut) dès leur apparition effective (équinoxe de printemps et pleine lune) et non à leur date calendaire qui, comme chacun devrait savoir, cesse de correspondre tôt ou tard à la réalité.
Ce document nous donne encore quelques renseignements importants concernant la date de Pâques, qui montrent qu'à notre époque, il existe une série d'idées reçues incorrectes à ce sujet. Tout cela affecte la clarté, la beauté, la simplicité et la profondeur du principe même. En voici deux exemples:
1) premier exemple: la pâque juive doit soit disant précéder la fête chrétienne de Pâques. Or, selon l'homélie anatolienne, celle-ci n'entretient aucun rapport avec la pâque juive (cf. page 120, §12 de ce document). cette idée est donc non seulement fausse mais superflue.
Le Christ n'a-t-Il pas accompli "la Pâque de la loi"? N'est-il pas l'agneau offert en sacrifice pour le monde, "l'Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde" (Jean, 1, 29)? Cet Agneau n'a-t-il pas été préfiguré par l'agneau vétérotestamentaire? Le Sacrifice et la Résurrection du Christ comprenant le monde entier (y compris les Juifs), accomplissent et réalisent toutes les préfigurations de l'Ancien Testament, prennent le relai spirituel de la pâque juive, la rendant ainsi caduque. Touts juxtaposition de celle-ci avec la Pâques chrétienne devient anachronique et dénuée de sens. Il conviendrait de réfléchir sérieusement à cette question.
A propos de la pâque juive, n'oublions pas que le deuxième temps de la formule de Nicée, c'est-à-dire la pleine lune de printemps, est précisément la pâque vétérotestamentaire et en même temps l'image du Christ incarné. [Que l'on veuille bien considérer] le stichère du premier dimanche après Noël qui évoque sous forme de lune ensanglantée l'image prophétique de l'incarnation du Christ (Joël, 3,4), qui "s'est abaissé, devenant obéissant jusqu'à la mort, à la mort sur la croix" (Philippiens, 2,8) et ressuscité le troisième jour, premier dimanche (troisième temps de la formule) après cette pleine lune.
Ainsi, le fête chrétienne de Pâques est toujours précédée de la pleine lune de la pâque vétérotestamentaire.
Quant aux Juifs contemporains, qui ne connaissent pas le Christ et commémorent pour leur pâque la sortie d'Egypte, espérons qu'ils atteignent un jour la vraie Terre promise et chantent à la Mère de Dieu "Réjouis-toi, Terre promise"(Acathiste à la Mère de Dieu, 7ième ikos, samedi de la cinquième semaine du Carême)!
2) deuxième exemple: l'affirmation que trois jours au moins doivent s'écouler entre la pleine lune et le jour de la Pâques est une idée fausse.
Conformément à l'homélie anatolienne, si la pleine lune de printemps tombe un samedi, Pâques est fêtée le jour suivant (p. 166, §53). Ce témoignage est très important car il montre que la pleine lune pascale peut apparaître à partir du dimanche des Rameaux n'importe quel jour de la Semaine Sainte jusqu'au Samedi Saint inclus. L'auteur de notre document explique en détail, lorsqu'il parle de la pleine lune de 387, qu'elle dure tout le dimanche (des Rameaux) jusqu'au Lundi Saint. Par conséquent il n'est pas possible d'admettre que cette pleine lune appartienne au samedi qui précède et qu'on puisse fêter Pâques une semaine plus tôt, c'est-à-dire le 18 et non le 25 avril.
Cette année, en 1994, les Orthodoxes fêtent Pâques après la deuxième pleine lune (première lune - le 27 mars, la deuxième - le 25 avril)!
Pour se justifier, on se réfère vainement au comput pascal, établi il y a plus de 1000 ans suivant le calendrier julien (ancien calendrier), lorsque le 21 mars devait coïncider avec l'équinoxe de printemps. Il en était ainsi au IVième siècle mais au XXième siècle, à cause du retard pris par le calendrier sur le temps solaire, le jour de l'équinoxe de printemps a lieu 13 jours plus tôt (le 8 mars selon l'ancien calendrier). Quant aux dates des pleines lunes indiquées dans les "tables" d'après le comput pascal, elles retardent à notre époque de3-4 jours.
Rappelons brièvement la raison du retard de l'équinoxe de printemps suivant le calendrier julien.
Le calendrier solaire julien (qui suit l'année tropique et non astronomique comme l'imaginent certains partisans de celui-ci) fut adopté dans l'empire romain en 46 avant Jésus-Christ, lorsque l'équinoxe de printemps coïncidait avec le 25 mars (il en était encore ainsi au temps du Christ). Ce calendrier julien retarde par rapport au temps solaire de 1 jour tous les 128 ans. Il n'est pas difficile alors de calculer que vers la moitié du IVième siècle le retard atteignait 4 jours, et que l'équinoxe de printemps correspondait alors au 21 mars.
L'histoire de l'Eglise nous apprend que, dans les débats du IVième siècle sur la date de Pâques, l'Eglise d'Alexandrie était bien renseignée quant au moment de l'équinoxe de printemps (21 mars) mais l'Eglise romaine, en revanche, insistait sur la date qui lui était habituelle du 25 mars (comme les partisans du calendrier julien aujourd'hui, pourrait-on dire). Finalement, l'Eglise romaine a cédé devant l'objectivité scientifique et toute l'Eglise chrétienne a adopté le 21 mars comme jour d'équinoxe. Cependant aucune mesure n'a été prise pour empêcher que le calendrier julien prenne du retard et celui-ci à continué à s'accumuler.
Au XVIième siècle ce retard a attient 10 jours (l'équinoxe correspondait alors au 11 mars). En occident, pendant le pontificat du pape Grégoire XIII, on apporta la correction nécessaire au calendrier solaire qui permit de réduire considérablement le retard (1 jour en 3200 ans). Le calendrier corrigé a pris le nom de grégorien. Et c'est depuis ce moment-là qu'il y a deux calendriers - 2 styles: l'ancien et le nouveau. D'après le nouveau style, l'équinoxe de printemps tombe les 20-21 mars comme au IVième siècle. En revanche, selon l'ancien style (calendrier julien), au XXième siècle le retard sur le temps solaire a atteint 13 jours. Conformément au comput pascal, le jour de l'équinoxe continue de correspondre au 21 mars (calendrier julien) alors qu'en réalité il correspond maintenant au 8 mars de ce même calendrier.
Voyons maintenant les dates du calendrier au IVième siècle, quand d'après le calendrier julien le jour de l'équinoxe tombait le 21 mars; à notre époque, cela correspond exactement aux dates du calendrier grégorien (nouveau style). Autrement dit, le nouveau style tel qu'il est vécu à notre époque correspond exactement au calendrier julien du IVième siècle. Ainsi, le 1er mai 1994 (nouveau style) correspond exactement à la date du 1er mai 387! Et comme il a été dit plus haut que le 25 avril apparaissait déjà comme date-limite, il paraît évident que la date du 1er mai qui se situe après la deuxième pleine lune, ne respecte plus le principe de la formule de Nicée.
En conclusion, nous pouvons dire que dans ce problème concernant la date de Pâques qui semble compliqué, nous devons distinguer deux aspects: l'un - de principe (la formule de Nicée), qui par son contenu est parfaitement simple, compréhensible et riche de sens. L'autre aspect - technique, concerne l'application pratique de ce principe.cet aspect est lié aux calculs compliqués concernant le mouvement de la terre et de la lune par rapport au soleil. Il faut être bien naïf pour croire que ces calculs ont pu être faits une fois pour toutes. Sans vouloir entrer dans des détails techniques, ne serait-il pas plus opportun de faire confiance aux spécialistes qui peuvent sans aucune difficulté prévoir avec exactitude et beaucoup d'années à l'avance le jour de l'équinoxe, de la pleine lune et tout ce qu'il faut pour l'application de la formule de Nicée?
Pratiquement, il suffit de prendre un agenda de n'importe quelle année et tous les éléments nous sont donnés: le jour de l'équinoxe appelé "printemps" (le 20 ou le 21 mars), le jour de la pleine lune, et le dimanche qui suit doit être le dimanche de Pâques. Ainsi que nous avons essayé de la montrer plus haut, en nous appuyant sur le document du IVième siècle, ces trois éléments suffisent pour déterminer la date de Pâques.
Mais alors nous voyons poindre un autre problème, celui-ci d'ordre pastoral: la prise de conscience que toute modification du calendrier entraînerait certainement à l'heure actuelle de nouveaux schismes et qu'il est préférable au nom d'une certaine unité de ne pas courir ce risque.
Nous nous permettons de donner deux réponses à cela.
Tout d'abord en parlant d'unité, il convient de distinguer l'unité dans la vérité et l'unité dans l'erreur; si l'on admet qu'il est souhaitable de quitter l'unité dans l'erreur pour se retrouver ensemble dans la vérité, il est naturellement indispensable d'effectuer un long travail préalable d'explication et de préparation. Mais si l'on ne fait rien dans ce domaine, alors cette unité dans l'erreur se transformera en situation de péché. C'est pourquoi nous nous permettons d'émettre le souhait que les responsables de l'Eglise orthodoxe parviennent à un accord total et sans équivoque à ce sujet afin que ce problème devienne clair pur chacun d'eux comme au IVième siècle.
Ayant atteint ce consensus, ces responsables devront en pasteurs attentifs l'expliquer à leurs ouailles. Ainsi, grâce aux nouvelles générations, conscientes de l'importance de ce problème, elle contribueront à éviter ce nouveau schisme. Actuellement, nous ne nous rendons pas compte de la diversité des avis en ce domaine chez les pasteurs de notre Eglise, due parfois à la méconnaissance du problème.
C'est pourquoi, nos hiérarques doivent s'attacher en premier lieu à rétablir l'unanimité chez nos hommes d'Eglise.
Quant aux fidèles, ils ont leur rôle et leur responsabilité dans l'Eglise. Cela leur donne le droit et même le devoir d'être vigilants en connaissance de cause, afin de sauvegarder le respect de la tradition ecclésiale qui nous unit tous dans la vérité et la fidélité à l'Eglise.
.............................;;;
Notes:
1. Editions du cerf, Sources chrétiennes, n°48.
2. Là, il est très important de noter que, lorsque dans la vie liturgique de l'Eglise on parle d'influence cosmique ou d'aspect cosmique, etc. on ne considère que le soleil et la lune c'est-à-dire les deux "luminaires" du 4ième jour de la création, auxquels le Créateur a ordonné d'administrer la lumière, pour que la lumière triomphe finalement des ténèbres. C'est précisément le thème essentiel de la vie liturgique et le calendrier liturgique est en cela différent du calendrier civil que son critère est la lumière qui triomphe des ténèbres. Le calendrier civil, en revanche, n'a pour objectif que le calcul des jours comme unité de temps, sans rapport avec l'aspect lumière/ténèbres.
3.L'année tropique est définie comme l’intervalle de temps, sur Terre, pour que le Soleil retourne à la même position dans le cycle des saisons. (Note de l'éditeur)
4. Intervalle de temps pendant lequel la longitude moyenne du Soleil sur son écliptique croît de 360 degrés. (Note de l'éditeur)
5. Du calendrier sur le temps solaire. (Note de l'éditeur)
6. Du point de vue du temps solaire, le jour de l'équinoxe se situe le jour nommé 8 mars en calendrier julien. (Note de l'éditeur)
Pour alimenter cette réflexion, nous désirons rappeler à la mémoire des Orthodoxes l'article de Nicolas Ossorguine qui a conservé aujourd'hui toute sa pertinence.
LA DATE DE PÂQUES ORTHODOXE, LE 1er MAI 1994
En 1994, les Chrétiens occidentaux célèbrent Pâques le 3 avril, alors que les Orthodoxes la fêtent quatre semaines plus tard, le 1er mai.
En réalité, une date aussi tardive pour la fête de Pâques n'a aucun fondement légitime puisqu'elle ne respecte pas la règle établie au IVième siècle par les Pères du 1er Concile Œcuménique de 325 concernant la date de célébration de Pâques. Rappelons cette règle, dite formule de Nicée:
Il convient de célébrer la fête Pâques le premier dimanche
après la première pleine lune qui suit l'équinoxe de printemps
Ainsi cette formule se décompose, peut-on dire, en trois "moments", qui doivent se succéder:
- premier "moment" - l'équinoxe de printemps
- deuxième "moment" - la pleine lune
- troisième "moment" - le dimanche
Malgré l'avis (erroné) des partisans de l'ancien style, (calendrier julien), qui prétendent qu'historiquement on ignore l'origine de la date de la formule de Nicée, il convient d'attirer l'attention sur l'existence d'un document grec très précieux du IVième siècle intitulé Une homélie anatolienne sur la date de Pâques en l'an 387 , qui explique cette formule en détails. Cette homélie était motivée par le fait que, en 387, pour la première fois depuis le 1er Concile Œcuménique, c'est-à-dire après quelques 62 ans, les conditions cosmiques (la position de la terre et de la lune par rapport au soleil) étaient telles que qu'en appliquant la formule de Nicée le jour de Pâques tombait un 25 avril. Ce fait provoqua le trouble parmi les chrétiens qui craignaient que la date ne fut trop tardive (!). L'auteur du document explique en détail le principe "nicéen" et sa signification, et démontre ainsi qu'une célébration exceptionnellement tardive de Pâques en 387 était incorrecte.
L'homélie anatolienne montre avec précision que dès le IVième siècle c'est-à-dire bien avant l'établissement même des tables du comput pascal (VIIième-VIIIième siècle), une tradition écrite existait déjà dans l'Eglise. Nous l'avons appelée plus haut formule de Nicée. L'application de cette formule exigeait la conformité scrupuleuse de tous les "moments": équinoxe de printemps, pleine lune, dimanche (cf. plus haut) dès leur apparition effective (équinoxe de printemps et pleine lune) et non à leur date calendaire qui, comme chacun devrait savoir, cesse de correspondre tôt ou tard à la réalité.
Ce document nous donne encore quelques renseignements importants concernant la date de Pâques, qui montrent qu'à notre époque, il existe une série d'idées reçues incorrectes à ce sujet. Tout cela affecte la clarté, la beauté, la simplicité et la profondeur du principe même. En voici deux exemples:
1) premier exemple: la pâque juive doit soit disant précéder la fête chrétienne de Pâques. Or, selon l'homélie anatolienne, celle-ci n'entretient aucun rapport avec la pâque juive (cf. page 120, §12 de ce document). cette idée est donc non seulement fausse mais superflue.
Le Christ n'a-t-Il pas accompli "la Pâque de la loi"? N'est-il pas l'agneau offert en sacrifice pour le monde, "l'Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde" (Jean, 1, 29)? Cet Agneau n'a-t-il pas été préfiguré par l'agneau vétérotestamentaire? Le Sacrifice et la Résurrection du Christ comprenant le monde entier (y compris les Juifs), accomplissent et réalisent toutes les préfigurations de l'Ancien Testament, prennent le relai spirituel de la pâque juive, la rendant ainsi caduque. Touts juxtaposition de celle-ci avec la Pâques chrétienne devient anachronique et dénuée de sens. Il conviendrait de réfléchir sérieusement à cette question.
A propos de la pâque juive, n'oublions pas que le deuxième temps de la formule de Nicée, c'est-à-dire la pleine lune de printemps, est précisément la pâque vétérotestamentaire et en même temps l'image du Christ incarné. [Que l'on veuille bien considérer] le stichère du premier dimanche après Noël qui évoque sous forme de lune ensanglantée l'image prophétique de l'incarnation du Christ (Joël, 3,4), qui "s'est abaissé, devenant obéissant jusqu'à la mort, à la mort sur la croix" (Philippiens, 2,8) et ressuscité le troisième jour, premier dimanche (troisième temps de la formule) après cette pleine lune.
Ainsi, le fête chrétienne de Pâques est toujours précédée de la pleine lune de la pâque vétérotestamentaire.
Quant aux Juifs contemporains, qui ne connaissent pas le Christ et commémorent pour leur pâque la sortie d'Egypte, espérons qu'ils atteignent un jour la vraie Terre promise et chantent à la Mère de Dieu "Réjouis-toi, Terre promise"(Acathiste à la Mère de Dieu, 7ième ikos, samedi de la cinquième semaine du Carême)!
2) deuxième exemple: l'affirmation que trois jours au moins doivent s'écouler entre la pleine lune et le jour de la Pâques est une idée fausse.
Conformément à l'homélie anatolienne, si la pleine lune de printemps tombe un samedi, Pâques est fêtée le jour suivant (p. 166, §53). Ce témoignage est très important car il montre que la pleine lune pascale peut apparaître à partir du dimanche des Rameaux n'importe quel jour de la Semaine Sainte jusqu'au Samedi Saint inclus. L'auteur de notre document explique en détail, lorsqu'il parle de la pleine lune de 387, qu'elle dure tout le dimanche (des Rameaux) jusqu'au Lundi Saint. Par conséquent il n'est pas possible d'admettre que cette pleine lune appartienne au samedi qui précède et qu'on puisse fêter Pâques une semaine plus tôt, c'est-à-dire le 18 et non le 25 avril.
Cette année, en 1994, les Orthodoxes fêtent Pâques après la deuxième pleine lune (première lune - le 27 mars, la deuxième - le 25 avril)!
Pour se justifier, on se réfère vainement au comput pascal, établi il y a plus de 1000 ans suivant le calendrier julien (ancien calendrier), lorsque le 21 mars devait coïncider avec l'équinoxe de printemps. Il en était ainsi au IVième siècle mais au XXième siècle, à cause du retard pris par le calendrier sur le temps solaire, le jour de l'équinoxe de printemps a lieu 13 jours plus tôt (le 8 mars selon l'ancien calendrier). Quant aux dates des pleines lunes indiquées dans les "tables" d'après le comput pascal, elles retardent à notre époque de3-4 jours.
Rappelons brièvement la raison du retard de l'équinoxe de printemps suivant le calendrier julien.
Le calendrier solaire julien (qui suit l'année tropique et non astronomique comme l'imaginent certains partisans de celui-ci) fut adopté dans l'empire romain en 46 avant Jésus-Christ, lorsque l'équinoxe de printemps coïncidait avec le 25 mars (il en était encore ainsi au temps du Christ). Ce calendrier julien retarde par rapport au temps solaire de 1 jour tous les 128 ans. Il n'est pas difficile alors de calculer que vers la moitié du IVième siècle le retard atteignait 4 jours, et que l'équinoxe de printemps correspondait alors au 21 mars.
L'histoire de l'Eglise nous apprend que, dans les débats du IVième siècle sur la date de Pâques, l'Eglise d'Alexandrie était bien renseignée quant au moment de l'équinoxe de printemps (21 mars) mais l'Eglise romaine, en revanche, insistait sur la date qui lui était habituelle du 25 mars (comme les partisans du calendrier julien aujourd'hui, pourrait-on dire). Finalement, l'Eglise romaine a cédé devant l'objectivité scientifique et toute l'Eglise chrétienne a adopté le 21 mars comme jour d'équinoxe. Cependant aucune mesure n'a été prise pour empêcher que le calendrier julien prenne du retard et celui-ci à continué à s'accumuler.
Au XVIième siècle ce retard a attient 10 jours (l'équinoxe correspondait alors au 11 mars). En occident, pendant le pontificat du pape Grégoire XIII, on apporta la correction nécessaire au calendrier solaire qui permit de réduire considérablement le retard (1 jour en 3200 ans). Le calendrier corrigé a pris le nom de grégorien. Et c'est depuis ce moment-là qu'il y a deux calendriers - 2 styles: l'ancien et le nouveau. D'après le nouveau style, l'équinoxe de printemps tombe les 20-21 mars comme au IVième siècle. En revanche, selon l'ancien style (calendrier julien), au XXième siècle le retard sur le temps solaire a atteint 13 jours. Conformément au comput pascal, le jour de l'équinoxe continue de correspondre au 21 mars (calendrier julien) alors qu'en réalité il correspond maintenant au 8 mars de ce même calendrier.
Voyons maintenant les dates du calendrier au IVième siècle, quand d'après le calendrier julien le jour de l'équinoxe tombait le 21 mars; à notre époque, cela correspond exactement aux dates du calendrier grégorien (nouveau style). Autrement dit, le nouveau style tel qu'il est vécu à notre époque correspond exactement au calendrier julien du IVième siècle. Ainsi, le 1er mai 1994 (nouveau style) correspond exactement à la date du 1er mai 387! Et comme il a été dit plus haut que le 25 avril apparaissait déjà comme date-limite, il paraît évident que la date du 1er mai qui se situe après la deuxième pleine lune, ne respecte plus le principe de la formule de Nicée.
En conclusion, nous pouvons dire que dans ce problème concernant la date de Pâques qui semble compliqué, nous devons distinguer deux aspects: l'un - de principe (la formule de Nicée), qui par son contenu est parfaitement simple, compréhensible et riche de sens. L'autre aspect - technique, concerne l'application pratique de ce principe.cet aspect est lié aux calculs compliqués concernant le mouvement de la terre et de la lune par rapport au soleil. Il faut être bien naïf pour croire que ces calculs ont pu être faits une fois pour toutes. Sans vouloir entrer dans des détails techniques, ne serait-il pas plus opportun de faire confiance aux spécialistes qui peuvent sans aucune difficulté prévoir avec exactitude et beaucoup d'années à l'avance le jour de l'équinoxe, de la pleine lune et tout ce qu'il faut pour l'application de la formule de Nicée?
Pratiquement, il suffit de prendre un agenda de n'importe quelle année et tous les éléments nous sont donnés: le jour de l'équinoxe appelé "printemps" (le 20 ou le 21 mars), le jour de la pleine lune, et le dimanche qui suit doit être le dimanche de Pâques. Ainsi que nous avons essayé de la montrer plus haut, en nous appuyant sur le document du IVième siècle, ces trois éléments suffisent pour déterminer la date de Pâques.
Mais alors nous voyons poindre un autre problème, celui-ci d'ordre pastoral: la prise de conscience que toute modification du calendrier entraînerait certainement à l'heure actuelle de nouveaux schismes et qu'il est préférable au nom d'une certaine unité de ne pas courir ce risque.
Nous nous permettons de donner deux réponses à cela.
Tout d'abord en parlant d'unité, il convient de distinguer l'unité dans la vérité et l'unité dans l'erreur; si l'on admet qu'il est souhaitable de quitter l'unité dans l'erreur pour se retrouver ensemble dans la vérité, il est naturellement indispensable d'effectuer un long travail préalable d'explication et de préparation. Mais si l'on ne fait rien dans ce domaine, alors cette unité dans l'erreur se transformera en situation de péché. C'est pourquoi nous nous permettons d'émettre le souhait que les responsables de l'Eglise orthodoxe parviennent à un accord total et sans équivoque à ce sujet afin que ce problème devienne clair pur chacun d'eux comme au IVième siècle.
Ayant atteint ce consensus, ces responsables devront en pasteurs attentifs l'expliquer à leurs ouailles. Ainsi, grâce aux nouvelles générations, conscientes de l'importance de ce problème, elle contribueront à éviter ce nouveau schisme. Actuellement, nous ne nous rendons pas compte de la diversité des avis en ce domaine chez les pasteurs de notre Eglise, due parfois à la méconnaissance du problème.
C'est pourquoi, nos hiérarques doivent s'attacher en premier lieu à rétablir l'unanimité chez nos hommes d'Eglise.
Quant aux fidèles, ils ont leur rôle et leur responsabilité dans l'Eglise. Cela leur donne le droit et même le devoir d'être vigilants en connaissance de cause, afin de sauvegarder le respect de la tradition ecclésiale qui nous unit tous dans la vérité et la fidélité à l'Eglise.
.............................;;;
Notes:
1. Editions du cerf, Sources chrétiennes, n°48.
2. Là, il est très important de noter que, lorsque dans la vie liturgique de l'Eglise on parle d'influence cosmique ou d'aspect cosmique, etc. on ne considère que le soleil et la lune c'est-à-dire les deux "luminaires" du 4ième jour de la création, auxquels le Créateur a ordonné d'administrer la lumière, pour que la lumière triomphe finalement des ténèbres. C'est précisément le thème essentiel de la vie liturgique et le calendrier liturgique est en cela différent du calendrier civil que son critère est la lumière qui triomphe des ténèbres. Le calendrier civil, en revanche, n'a pour objectif que le calcul des jours comme unité de temps, sans rapport avec l'aspect lumière/ténèbres.
3.L'année tropique est définie comme l’intervalle de temps, sur Terre, pour que le Soleil retourne à la même position dans le cycle des saisons. (Note de l'éditeur)
4. Intervalle de temps pendant lequel la longitude moyenne du Soleil sur son écliptique croît de 360 degrés. (Note de l'éditeur)
5. Du calendrier sur le temps solaire. (Note de l'éditeur)
6. Du point de vue du temps solaire, le jour de l'équinoxe se situe le jour nommé 8 mars en calendrier julien. (Note de l'éditeur)
Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 8 Avril 2016 à 11:39
|
55 commentaires
|
Permalien
Derniers commentaires
-
Surprenantes fresques dans un monastère en Serbie
19/09/2024 13:35 - Patrick -
"Il n'y a aucune excuse pour ceux qui déclenchent des guerres", - Mgr Onuphre, Primat de l'Eglise d’Ukraine, PM
14/04/2023 05:58 - Gilles -
Le père George Egorov, sa visite pastorale à la Légion étrangère
12/12/2022 12:55 - Baron André -
OSCE demande à Russie ce cesser la destruction d'églises en Ukraine
10/05/2022 03:22 - pere jean -
Communiqué des Evêques Orthodoxes de France au sujet de la guerre en Ukraine
14/04/2022 19:15 - Hai Lin -
Deux hiérarques russes s’expriment à titre personnel à propos de la guerre et de la paix, de la situation en Russie
14/04/2022 10:39 - Marie Genko -
Communiqué des Evêques Orthodoxes de France au sujet de la guerre en Ukraine
14/04/2022 10:26 - Marie Genko -
Le Parlement Européen a condamné le patriarche Cyrille et a félicité le clergé orthodoxe qui s'est opposé à la guerre en Ukraine
13/04/2022 21:21 - Gilles -
Communiqué des Evêques Orthodoxes de France au sujet de la guerre en Ukraine
12/04/2022 23:05 - Théophile -
Communiqué des Evêques Orthodoxes de France au sujet de la guerre en Ukraine
12/04/2022 22:00 - Nadejda na Mir
Liens francophones