L’empereur Galere, sur son lit de mort, a déclaré la liberté religieuse dans tout l’Empire romain, se concentrant particulièrement sur la fin de la persécution des chrétiens (311) mais c'est l'édit de Milan, promulgué en avril 313 par les empereurs Constantin Ier et Licinius, qui reconnaissait aux chrétiens la liberté de culte et permettait le développement du christianisme (concile de Nicée 1 réuni par Constantin en 325). Le Christianisme était déjà religion d’État en Arménie et en Éthiopie, mais à Rome la paganisme revint en force sous l'empereur Julien l'apostat (361-363) et le christianisme n'a été déclaré religion d’État de l’Empire romain qu'en 392 par le décret de Théodose Ier. C'est néanmoins l'édit de Milan qui est considérant comme la victoire du Christianisme sur le paganisme d'état, et aussi le début du changement de nature du Christianisme qui va absorber tous les attributs d'une administration étatique et, en particulier, calquer son organisation sur celle de l'administration romaine…

Cet anniversaire passe pratiquement inaperçu en France, ce qui montre à quel point nous sommes à l'écart de l'Orthodoxie, mais donne lieu à plusieurs manifestations dans le monde orthodoxe. Ce fut d'abord un colloque le 17 mai à Istanbul/Constantinople, avec la participation du métropolite Hilarion de Volokolamsk, pour l'Eglise russe, et de Mgr Emmanuel de France, à l'issu duquel le patriarche Bartholomée a publié une encyclique où il rappelle que les persécutions des chrétiens sont redevenues d'actualité. Mais c'est surtout l’Église de Serbie qui a pris la tête des célébrations de cet anniversaire, avec le soutien de l'état, en organisant plusieurs manifestations d'envergure à Belgrade et à Niš, la ville natale de Constantin: ainsi un grand colloque se tient actuellement dans cette dernière ville. L'Eglise russe a aussi organisé des manifestations à Minsk, St Petersbourg… et une procession avec des reliques des saint Constantin et Hélène à travers l'Ukraine. J'espère que, chez nous aussi, ce jour de la fête des saints Constantin et Hélène, égaux aux apôtre, prendra un relief particulier, et tout spécialement à la liturgie devant les reliques de sainte Hélène

Vladimir G.

Rédigé par Vladimir GOLOVANOW le 3 Juin 2013 à 10:23 | -2 commentaire | Permalien

Une interview de l'archimandrite Sabba (Toutounov) à l'hebdomadaire "Expert"
P.O. remercie Dimitri Garmonov d’avoir trouvé et traduit ce si actuel texte de l’Archimandrite Sabba. C’est surtout la conclusion consacrée à la vision que nous avons du Concile de 1917 qui paraîtra particulièrement intéressante à nos lecteurs.

« Et votre conciliarité tant vantée ? Où est-elle maintenant ?» - c’est cette question un peu sardonique qu’a posée un catholique aux journalistes qui assistaient au Concile des évêques de l’Eglise orthodoxe russe de 2013. Il s’agissait de changements dans les Statuts de l’Eglise qui y avaient été adoptés. D’autres médias ont estimé qu’il s’agissait là d’un « triomphe de la nomenclature de l’Eglise » ce qui signifiait pour eux la fin du principe de la conciliarité.

Ces changements concernent les pouvoir du Concile local qui est la deuxième institution de l’administration ecclésiastique après le Concile des évêques : ses pouvoirs ont été restreints. Outre les évêques, des prêtres des moines et des laïcs peuvent participerai Concile local. Et l’on dit que les droits du peuple orthodoxe ont été lésés au profit des évêques !

Une interview de l'archimandrite Sabba (Toutounov) à l'hebdomadaire "Expert"
Certains observateurs voient un lien dangereux entre la centralisation du pouvoir du Concile des évêques et la réforme actuelle des diocèses : le nombre des diocèses et des évêques augmente ceux-ci étant « particulièrement fidèles au patriarche qui leur intime des ordres ». Ainsi se créeraient des conditions favorables à une plus grande influence du patriarche au sein du Concile des évêques. Risque de papisme ? Refus la tradition d’administration de l’Eglise héritée des saints apôtres ? Pour la conscience laïque, ces changements peuvent paraître comme une nouvelle preuve de la nature antidémocratique de l’organisation ecclésiale et, très probablement, de l’existence des intentions dissimulées des hiérarques de l’Eglise russe à exercer le pouvoir politique.

Pour obtenir des réponses à ces questions nous nous sommes adressés à l’archimandrite Sabba (Toutounov), responsable-adjoint de l’administration du Patriarcat de Moscou et secrétaire de la Commission interconciliaire qui s’était occupée de l’élaboration des nouveaux Statuts du Concile local et du Concile des évêques.

* * *
- Quels pouvoirs du Concile local ont-ils été supprimés ?

- Je dirais plutôt qu’ils ont été « précisés ». Cette question s’était déjà posée en 2009 lors du Concile local qui a élu le patriarche actuel. Nous étions quelques centaines de personnes. Les participants s’exprimaient sur les conditions compliquées du travail législatif et de celles de la conduite du débat avec un si grand nombre d’intervenants. Les questions sur la procédure du Concile local ainsi que sur les pouvoirs de celui-ci et de ceux du Concile des évêques ont été également abordées. L’Assemblée interconciliaire a été crée en 2010, et c’est elle qui a été chargée de définir les pouvoirs de chaque Concile. La Commission a interrogé les diocèses. Les académies nous ont adressé un rapport. Tous se sont entendus sur le fait que, historiquement ou canoniquement, le droit, ou autrement le charisme ce qui veut dire la grâce ou le don, de la prédication et de l’administration de l’Eglise appartient à l’épiscopat ; ce qui, d’ailleurs, se transmet à l’évêque lors de l’ordination épiscopale.

La commission a élaboré le premier document qui restreignait fortement les fonctions du Concile local jusqu’à ce qu’il devienne un organe consultatif. Mais cette étape n’a pas été décisive. On peut parler, si vous voulez, de démocratie bien que je n’aime pas employer ce terme par rapport à l’Eglise. Le document a été publié et discuté, nous avons constaté une réaction négative de la part des diocèses ainsi que de ceux qui ont participé à la discussion sur Internet. Nous avons ensuite remanié le document où désormais il était déclaré que le Concile local s’exprimerait au nom de l’Eglise locale sur des questions importantes intéressant l’opinion publique – relations entre l’Eglise et l’Etat, relations avec les Eglises hétérodoxes ; le droit de participer à l’élection du patriarche, ce qui n’avait pas été mis en cause. Le pouvoir doctrinal et administratif restaient l’apanage du Concile des évêques. Nous nous sommes heurtés de nouveau à une réaction négative des diocèses.

- Dans les diocèses, les décisions ont-t-elles été prises par les évêques ?

- Souvent c’étaient les évêques eux-mêmes qui rédigeaient les rapports, mais parfois des réunions ont été organisées, même dans le cadre des doyennés qui sont un échelon inférieur réunissant une ou quelques dizaines de paroisses. Ils envoyaient leurs rapports à la réunion diocésaine qui a souvent rappelé qu’il n’était pas juste de priver le Concile local du droit de prendre des décisions doctrinales et canoniques. Dans le document définitif amendé il a été déclaré , conformément à la tradition dogmatique de l’Eglise, que le pouvoir ou la grâce de la doctrine et de l’administration canoniques appartiennent à l’épiscopat. En revanche, la réception relève du Concile local.

- Qu’est-ce que signifie, « procéder à la réception » ?

- La réception signifie un accord exprimé manifestement ou tacitement. Le Concile local peut mettre en doute et renvoyer pour révision certaines décisions du Concile des évêques. Le problème de corrélation entre la décision et la réception est, d’ailleurs, une des questions qui n’ont pas encore de réponses dans la doctrine du droit canon. Il n’existe pas de définitions de ce qu’est la réception, quelle institution et comment doit-elle y procéder. Mais le terme existe. Dans ce cas-là, le Concile des évêques a tenté d’exprimer les rapports entre décision et réception dans la forme qui a été définie par les Statuts.

Une interview de l'archimandrite Sabba (Toutounov) à l'hebdomadaire "Expert"
- En 1988, la disposition sur la convocation régulière du Concile local tous les 5 ans avait été ajoutée dans les Statuts. Pourquoi a-t-elle été supprimée récemment ?

- Cela a été fait en 2000. Il est difficile de préciser pourquoi on l’a introduit en 1988, j’étais encore adolescent. Comme nous le savons, cette règle n’a jamais été respectée. Je peux supposer qu’en 2000 les Statuts ont été justement mis en conformité à la pratique.

- Le Concile local peut être désormais réuni par le Concile des évêques. Comment peut-il alors effectuer la réception avec l’indispensable plénitude ?

- Il s’agit plutôt de situations exceptionnelles. Les évêques ne sont ni hérétiques, ni schismatiques. Avant de prendre une décision, ils y réfléchiront bien. En outre, nous pouvons avoir recours à l’Assemblée interconciliaire. Les décisions sont donc prises après en avoir pesé tous les pour et les contre. Certes, l’histoire connait plusieurs cas difficiles: par exemple, la signature de l’unie de Florence avec les catholiques par le métropolite Isidore, acte que la Russie n’a pas reconnu. Le pouvoir laïc y a joué un rôle important. Revenons au sujet, si le Concile des évêques prenait une décision qui semblerait fausse à la lumière de la doctrine ou de l’ordre canonique de l’Eglise, une grande partie de l’épiscopat, du clergé et des laïcs réagiront et exigerons la convocation d’un Concile local.

- Comment est apparu ce double pouvoir des Conciles ? Avant le XVIIe siècle et en 1917, l’année de la restauration du patriarcat dans l’Eglise orthodoxe russe, il n’y avait qu’une instance administrative – celle du Concile local?

- C’est une question de terminologie. Notre vocabulaire prend ses sources au début du XXe siècle. Dans l’histoire de l’Eglise, notamment en Russie d’avant le XVIIe siècle, le Concile local était un concile des évêques. Mais à la fin du XIXe et au début du XXe siècle, des conciles réunissant l’épiscopat, le clergé et les laïcs sont apparus dans les pays baltes. Cette belle idée des conciles publics a été reprise en Russie où les conciles ne s’étaient pas réunis pendant deux centenaires. Ainsi, en 1917, un grand Concile local a réuni tout l’épiscopat ainsi que des délégués du clergé, des laïcs et des moines. A vrai dire, les Statuts étaient très concis et n’ont pas été pleinement élaborés à cause de l’interruption anticipée du travail du Concile, ensuite l’époque des persécutions a commencé. La question de la réunion des évêques ne s’est posée qu’après la Deuxième Guerre mondiale.

- Dans les changements des pouvoirs en profit du Concile des évêques, beaucoup voient le danger du papisme : on parle de la croissance du nombre des évêques pendant la réforme diocésaine et donc des personnes qui seront particulièrement fidèles au patriarche et, comme conséquence, la loyauté de tout le Concile des évêques. Qu’en pensez-vous ?

- Tout d’abord, Sa Sainteté le Patriarche Cyrille qui est un homme d’une foi fervente sait que la vie sur terre est une étape après laquelle nous serons jugés par le Seigneur. Il ne veut pas adapter l’Eglise en fonction de circonstances temporaires et insignifiantes. Le renforcement du pouvoir du Pape de Rome a été un très long processus lié au rôle politique du Pontife. Il ne faut pas oublier que le Pape est en même temps un chef d’Etat et qu’il a été un homme politique important à l’époque de l’empire romano-byzantin dont le centre a été déplacé à Constantinople – Nouvelle Rome. Cependant, l’Ancienne Rome n’oubliait jamais son statut de capitale politique.

Une interview de l'archimandrite Sabba (Toutounov) à l'hebdomadaire "Expert"
La politique n’a pas lieu d’être dans l’activité des évêques et des prêtres de l’Eglise orthodoxe russe, le patriarches compris. L’une des taches les plus importantes du patriarche Cyrille, telle que définie lors du Concile local de 2009, est de faire venir à l’Eglise ceux qui ont été baptisés, mais qui ne pratiquent pas. Quant à la réforme diocésaine, sa réalisation est une idée de longue date du patriarche. L’administration du Patriarcat de Moscou s’occupait de cette question depuis le début : le seul but de cette réforme est de rapprocher les évêques du peuple. C’est l’une des conséquences des décisions du Concile des évêques de 2011 qui a accru le niveau du travail missionnaire, catéchétique et social dans les diocèses. En mettant ces décisions e œuvre, nous avons immédiatement compris que ce travail est impossible dans des diocèses aussi grands. C’est alors que le patriarche a décidé que le moment est venu pour réaliser son ancienne idée – la création de nouveaux diocèses où les évêques ayant un moindre nombre de paroisses à gérer pourront développer et consolider la vie ecclésiale de manière plus active.

- Admettons que le patriarche Cyrille ne tend pas au pouvoir autocratique, mais est-ce possible dans le cadre des Statuts ?

- L’idée du changement des Statuts de l’Eglise pour que le patriarche y devienne un autocrate relève plutôt de l’Eglise fiction. Je peux même supposer la manière dont va se dérouler un tel scénario : un Concile local se réunirait pour réagir négativement à cette idée. En ce qui concerne la fidélité de l’épiscopat au patriarche : la plupart des évêques ordonnés récemment n’ont pas été cooptés par le patriarche. Ils sont choisis dans les diocèses d’où ils viennent. Prenons pour un exemple le diocèse de Saransk qui est dirigé par le métropolite Barsonophe, responsable de l’administration du Patriarcat, où deux diocèses ont été récemment créés. Le métropolite lui-même a trouvé deux candidats et les a présentés au patriarche. Cela signifie que, si on utilise tout de même ces termes, ces évêques seront fidèles à celui qui les a présentés à la dignité épiscopale. Mais je ne le pense pas parce que les évêques sont en mission et fidèles non pas à celui qui les a « promus », mais à Dieu et à l’Eglise, et ils soutiennent Sa Sainteté le patriarche Cyrille non pas pour sa personnalité, mais parce qu’il est le primat de l’Eglise orthodoxe russe.

- Parmi les quatre procédures différentes proposées, les règles les plus démocratiques de l’élection du patriarche ont été choisies et consacrées dans les nouveaux Statuts. Le Concile local aurait-il donc le droit de proposer un candidat par le moyen d’un vote « arrangé » ? Pourquoi faut-il une telle forme de démocratie dans l’Eglise ?

- Ce n’est pas la démocratie. Le pouvoir démocratique appartient au peuple. Mais le Chef et le Souverain de l’Eglise est notre Seigneur Jésus Christ. Ce pouvoir se manifeste dans le Corps de l’Eglise dont l’histoire, les canons et la doctrine nous l’attestent. L’histoire dit que le pouvoir de la doctrine et de l’administration appartient aux évêques, successeurs des apôtres, qui reçoivent la grâce de Dieu lors de l’ordination épiscopale. Dans l’Eglise orthodoxe russe, le peuple joue un rôle important, notamment dans les élections de son primat. C’est notre héritage canonique et historique lié à la reconnaissance du peuple car le patriarche est le chef de l’Eglise. Dans une autre Eglise locale, les élections du patriarche peuvent se passer autrement.

-Nos évêques ne sont pas élus bien que les évêques chrétiens des premiers siècles étaient élus par le peuple?

- L’élection de l’évêque par scrutin est connue dans l’histoire mais c’est souvent un mythe. Les saints apôtres, en arrivant dans un lieu ou un autre, ordonnaient eux-mêmes des évêques sans élections préalables. Celles-ci existaient sous différentes formes et avaient chaque fois des causes historiques. A une période, l’Eglise a connu un canon qui interdisait l’élection de l’évêque par la foule afin d’éviter les excès. En Russie, les évêques ont été élus avec la participation du vetche (assemblé populaire à Novgorod). L’élection des évêques s’est également produite en 1917, ce qui était, avant le Concile local de 1917-1918, une réaction à la révolution à la suite de laquelle des « comités exécutifs » avaient souvent destitué des évêques. Dans certains cas, le Synode validait les décisions des comités, mais parfois il les rejetait. Il y avait soit des élections directes lors desquelles le peuple avait le droit de dire : « Nous voulons celui-ci », soit le processus était plus compliqué. Le futur patriarche Tikhon a été élu à Moscou, le métropolite Benjamin l’a été à Petrograd. Lors du Concile de 1917-1918, une forme de scrutin a été définie comportant une « censure » sérieuse de la part de l’épiscopat. Mais cela n’a pas pu continuer longtemps parce que la situation politique a changé.

- Le patriarche peut-il donner des ordres aux évêques ? Le principe « le premier parmi les égaux » est-il toujours respecté ?

- Oui, le patriarche est le premier parmi les évêques qui sont tous égaux : ce principe est toujours respecté. Même dans les documents envoyés par le patriarche aux évêques, on peut voir qu’il peut leur demander et leur proposer certaines choses. Le patriarche peut donner des ordres à ses évêques auxiliaires qui l’aident à gouverner le diocèse de Moscou dont il est l’évêque local. Le patriarche peut donner des ordres à l’évêque responsable d’un département synodal, ce dernier est administré personnellement par le patriarche et par le Synode. Un certain pouvoir du patriarche est également consacré dans les Statuts de l’Eglise : par exemple, il peut donner à des évêques la permission de partir en congé. En outre, il distribue la sainte huile et les antimensions qui sont indispensables pour la célébration de la sainte Eucharistie.

- Selon les règles, le patriarche peut être jugé par le Concile des évêques, mais qui est-ce qui a le pouvoir d’entamer un procès ?

- La procédure n’est pas détaillée. Le patriarche n’est pas infaillible. Si on ne prend pas en détails la notion catholique d’infaillibilité du Pape qui, en effet, est beaucoup plus compliquée que nous ne l’imaginons, alors, à la différence du Pape qui parle ex cathedra, le patriarche peut tomber dans l’erreur, dans une hérésie. A Byzance, nous connaissons des patriarches hérétiques ainsi que des patriarches destitués. Le patriarche Nikon n’était pas hérétique, sa destitution était liée à un conflit avec le tsar. On a trouvé des violations canoniques, mais elles avaient tout de même une base politique.

Une interview de l'archimandrite Sabba (Toutounov) à l'hebdomadaire "Expert"
Par le service vers la conciliarité

- La démocratie ne pourrait donc pas exister dans l’Eglise. Qu’est-ce alors cette nouvelle institution avec la participation des laïcs que l’Assemblée interconciliaire ?

- La Commission interconciliaire a été créée en 2009, elle réunit près de cent cinquante évêques, prêtres et diacres ainsi que des laïcs. Je pense qu’il n’y a dans aucune Eglise locale d’institutions similaires. Lors du Concile local de 2009, s’est posée une question de l’élaboration de projets de documents pour les Conciles prochains. Il était évident qu’il ne fallait pas les porter immédiatement à la discussion du Concile, parce que très souvent il arrive que les participants au Concile les voient pour la première fois et n’ont pas de temps pour les étudier. On a eu l’idée de créer une institution qui ressemblerait à la Commission qui avait précédé le Concile local de 1917-1918. La seule différence est que la Commission interconciliaire actuelle est une institution permanente.

- De qui est-elle formée ?

- Les membres sont nommés par le Saint Synode. Parmi les évêques, vous avez les responsables des départements synodaux, les recteurs des écoles de théologie ; deuxièmement, des représentants de la Russie ainsi que de l’Ukraine, de la Biélorussie, de la Moldova, des pays baltes etc. Quant aux prêtres et aux laïcs, le Synode visait à présenter toutes les tendances existant au sein de l’Eglise, libérale et conservatrice, et les experts dans différents domaines – liturgique, pastoral, canonique, social ainsi que travail avec la jeunesse. La seule exigence pour tous est d’être actif dans la vie quotidienne de l’Eglise.

- Au début, vous avez dit que les documents préparés pour le Concile des évêques avaient été présentés sur Internet. Ceci a-t-il été géré par la Commission ?

- Oui, tous les documents de la Commission interconciliaire peuvent être discutés par les hommes d’Eglise. D’abord, le projet du document émane d’un groupe de travail au sein de la commission de rédaction présidée par le patriarche lui-même. La commission vérifie le document et parfois le complète. Le patriarche travaille avec tout le monde. Le document est ensuite publié, y compris sur Internet – sur des pages officielles, dans le blog de la Commission interconciliaire, sur le site Bogoslov.ru qui est notre partenaire officiel. Puis toutes les réactions et commentaires sont systématisés (des absurdités comme, par exemple, les exigences d’introduire dans les Statuts de l’Eglise le thème de la défense des animaux sont exclues), et l’on commence le travail à tous les niveaux : commission de rédaction, présidium, Assemblée plénière de l’Assemblée interconciliaire.

- Si tout ce dont vous parlez ne se présente pas comme des principes démocratiques, alors qu’est-ce que la conciliarité ? De quoi se différencie-t-elle de la démocratie ?

- Si il s’agit de conciliarité, c’est de nouveau un problème de langue. Dans le Symbole de la foi, il est dit que l’Eglise est conciliaire (« sobornaïa »). Bien que, dans le texte original grec, on utilise le mot « catholique ».

- Universel ?

- Oui, elle existe dans tout l’Univers. Mais tout particulièrement, elle englobe toute l’humanité. D’où la notion de conciliarité. Le concile réunit nous tous (*en russe, « Sobor », Concile, assemblée, a la même racine que le mot « sobirat’ », réunir, rassembler – NT). Quand il s’agit de la conciliarité, nous mettons l’accent plutôt sur le principe d’administration. Je proposerais de voir la conciliarité d’abord comme un aspect liturgique – tout le monde se réunit autour du même calice pendant la liturgie. Les gens sont réunis également dans une communauté paroissiale. La vie de l’Eglise se manifeste à plusieurs niveaux. La prise de décisions n’est importante que dans le cas de leur exécution au niveau des paroisses. Actuellement, nous travaillons sur un projet – celui du site-Internet « les Paroisses ». Il s’y agit de la vie quotidienne de l’Eglise, du catéchuménat, par exemple. Le Concile des évêques a adopté un document très important sur la catéchèse. En tant que recteur d’une église, je peux vous dire qu’on se heurte à des difficultés quant à la mise en œuvre de ce document. Après avoir été nommé recteur d’une paroisse, j’ai introduit une catéchèse obligatoire avant le baptême pour les adultes qui désirent se baptiser, ainsi que pour les parents et les parrains des enfants. Mais voilà, les gens ne voulaient pas assister aux conférences consacrées au Symbole de la foi, à la doctrine sur le baptême et sa signification. Ils disaient : « Pourquoi ? Nous allons passer dans une autre église où l’on se passera de tout cela ». Mais le dimanche dernier, une trentaine de personne sont assisté à cette conférence. Il faut dire que c’est beaucoup. Le dispositif fonctionne et cela, grâce à qui ? - Grâce aux laïcs. Ma déléguée pour la catéchèse a pu valider ces études. Je connais plusieurs autres paroisses où se réalisent divers projets liés au catéchisme, aux enfants, aux jeunes. Ceci est précisément la vie quotidienne de l’Eglise.

- Est-ce que la vie liturgique et paroissiale est liée à l’aspect administratif de la conciliarité d’une manière ou d’une autre ?


- Effectivement, ceux qui participent à la vie de l’Eglise exercent une influence sur les décisions administratives, notamment au sein de l’Assemblée interconciliaire. Nous avons parlé de l’élaboration de certaines dispositions des Statuts. Je peux dire également que, pendant la préparation des documents sur la justice juvénile, sur les codes barre d’identification personnelle, la tension était énorme. Nous avons reçu plusieurs listes de souscription, surtout pour le problème de la justice juvénile, où il était dit que notre document était trop flou et qu’il faudrait s’exprimer plus d’une manière plus rigoureuse. Mais ce n’est pas la démocratie, nous n’organisons pas des référendums. La conciliarité existe réellement grâce à la vie active des laïcs. Il faut comprendre aussi que les aspects administratifs de la conciliarité ne sont pas donnés une fois pour toutes. Chez nous, ils sont exercés de la manière que je vous ai décrite. On peut toujours essayer d’améliorer la situation. Ceux qui parlent de la démocratisation de l’Eglise doivent comprendre également qu’il y a toujours un certain nombre d’ « activistes orthodoxes » considérés comme rétrogrades. Dans les conditions de la démocratisation de l’Eglise, ce sont ces « rétrogrades » qui vont influencer les décisions. Est-ce que cela plaira à ceux qui sont pour la conciliarité démocratique ? J’en doute bien. Une situation inverse avait lieu dans les années 1917-1918 : j’ai étudié cette période d’une manière approfondie car c’est le sujet de ma thèse de doctorat. A cette époque, ce sont les révolutionnaires qui ont voulu influencer les décisions de l’Eglise. La question : en avons-nous actuellement besoin ?

- En effet, où peut-on trouver la réponse à cette question ?


- Nous ne sommes pas prêts aux élections des prêtres, des évêques: nous n’avons pas un système paroissial. Qu’est-ce qu’une paroisse ? Dans ma paroisse, le dimanche dernier, deux liturgies eucharistiques ont été célébrées, près de six cents personnes ont communié. En plus, je pense qu’il y avait encore environ quatre cents personnes qui n’ont pas communié. Au total, près de mille fidèles. Comment alors réaliser la « démocratie » ? Qui sont parmi eux les vrais paroissiens ? Quand on a réuni le Concile des 1917-1918, la forme principale de la paroisse était celle du village. Une église avec un ou deux ou trois villages autour. Le prêtre connaissait leurs habitants. Maintenant la situation sociale a changé, donc à chaque époque et aux circonstances particulières de cette époque correspond un système d’organisation particulier. Le système d’aujourd’hui est suffisamment bon pour l’époque actuelle. Peut-être, il y a des points à améliorer. Par exemple, je vois certaines choses qu’on pourrait améliorer et, quand j’en ai la possibilité, je propose de le faire, d’autres le font également. Mais il faut rester réaliste.
Vera KRASNOVA pour "Expert" Народ служит, епископы управляют
Traduction D.G

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Un nouveau livre de l’higoumène Sabba (Toutounov) : « Les réformes diocésaines » et Concile local de 1917-1918: Présentation de livres à Moscou + 10 Résultats pour votre recherche sur PO

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 2 Juin 2013 à 11:18 | -1 commentaire | Permalien

Le Fédération de Russie a été confirmée dans ses droits de propriétaire de l'église russe à Nice. Pensez-vous que ce cas doit servir d'exemple et que les églises russes construites avant la révolution doivent revenir à la Russie?

Oui, la Russie doit faire valoir ses droits, quand cela est justifié, sur les églises russes construites par elle avant la révolution. 48.37%

Non, il faut garder le statu quo. 38.56%

Il ne peut y avoir de réponse générale: il faut examiner chaque édifice au cas par cas 10.78%

Cela n'a pas d'importance. 2.29%

306 Votant(s)

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 2 Juin 2013 à 11:15 | 0 commentaire | Permalien

Higoumène Georges Leroy: Vers l'Abitibi!
Chronique d'Abitibi 7

Nous avons quitté le père Georges dans une réflexion sur une forme bien peu reconnue de l'engagement orthodoxe chronique d'Abitibi 6 et alors que, visiblement, lui et Mario Rousseau ne trouvent pas leur place dans l'Eglise de l'Emigration en France Chronique d'Abitibi 5. Mais voilà qu'au Canada cela ne se passe pas mieux et le père Georges part plus loin, nous livrant au passage une description de la nature du Quebec qui, visiblement, lui tient à cœur Je passe le calame au père Georges comme précédemment…(V.G)

Rawdon, Quebec

Regardons la carte du Québec : nous y repérons facilement la grande ville de Montréal, sur le bord du fleuve Saint-Laurent. Soixante kilomètres plus au Nord, nous apercevons le village de Rawdon, non loin de la ville de Joliette. En fait, Rawdon est plus qu'un village : c’est déjà une petite agglomération. Au centre de celle-ci, l’Hôtel de Ville est couronné d'une série de drapeaux qui flottent au vent, et qui reflètent la diversité de provenance des habitants de ce lieu. À l'époque - pour qui s'y connaissait en drapeaux - le regard ne pouvait manquer d'être attiré par le drapeau tricolore de l'ancienne Russie : c'était le seul qui était cousu à la main, artisanalement. Car le village se signalait par l'existence d'une communauté russe, et surtout d'un vaste cimetière orthodoxe. En s’éloignant du centre de l'agglomération, on se retrouve au milieu de tout un lacis de petites avenues ombragées de pins, au long desquelles s’égrènent d'innombrables villas et chalets. C'est là où l'on s'aperçoit du fait que Rawdon est un agréable lieu de villégiature.

Higoumène Georges Leroy: Vers l'Abitibi!
À un moment donné, le regard est attiré par un endroit qui est tout-à-fait spécial : c'est un très vaste espace entouré de haies, et parsemé d'innombrables croix à huit branches. On ne pouvait manquer d'être charmé par le coup d'œil : tout était impeccablement entretenu; les tombes étaient abondamment fleuries, les bordures de celles-ci étaient peintes d'un blanc immaculé. Chacune était cernée d'un gazon bien taillé. Un peu plus loin, on voyait un petit bulbe qui se dressait au-dessus de la silhouette assez basse d’une église en bois.

L'ensemble était on ne peut plus russe. Le cimetière était à ce point impeccable, parce qu'il était entretenu par un jardinier enthousiaste, un Québécois, qui avait fait de ce cimetière sa passion et sa raison de vivre. Souvent, il se faisait aider par sa famille, qu'il dirigeait au doigt et à l’œil par des cris et des exclamations. Pas une seule herbe folle n'était tolérée ; les fleurs croissaient et embellissaient tout au long de la saison d'été. En franchissant une barrière, l’on découvrait un petit ermitage. C'était une minuscule maison de bois, assortie d'une non moins petite chapelle. L'ensemble avait été construit par un moine d'origine arménienne qui, après y avoir séjourné plusieurs années, était reparti, sans doute ne trouvant pas en cet endroit le recueillement et la solitude qu’il souhaitait. (Note du rédacteur: on trouve ici un article sur la présence orthodoxe à Rawdon)


Higoumène Georges Leroy: Vers l'Abitibi!
« On nié gavarit pa-roussky; on nié pravoslavny ! »

Tel était l'endroit où je suis parvenu, après mes études à l’Institut Saint-Serge. C'est toute une expérience, que d'arriver en un aéroport, et que de franchir la porte de l’« immigration »… C'est assurément une décision qui est lourde de conséquences pour l'existence à venir. J'emménageai donc dans l'ermitage de Rawdon, que j’appelai : « Skite sainte Anne ». Il fallut y exécuter divers travaux d'aménagement pour le rendre habitable. Ensuite, l’existence commença en cet endroit paisible, avec le chant quotidien de l'Office divin. Tout se passait fort bien ; de temps en temps, l'une ou l'autre personne venait de Montréal pour participer à la vie liturgique. Visiblement, la communauté russe de l'endroit comprenait difficilement que quelqu'un qui ne soit pas russe puisse exister parmi eux.

Un jour, quelqu'un me conduisait dans sa voiture, puis s’arrêta et baissa son carreau afin de converser - en russe - avec une personne de sa connaissance.

Celle-ci m'aperçut, dans la voiture. Et elle s'exclama, s’adressant au conducteur : « on nié gavarit pa - roussky; on nié pravoslavny ! » Traduction : « il ne parle pas russe ; il n’est pas orthodoxe ! » Cette personne pensait que je n'avais pas compris… Je dis au conducteur : « c'est curieux, cette personne ne semble pas être au courant du fait qu'il existe des Grecs, des Roumains, des Arabes et de nombreux peuples qui sont orthodoxes, tout en ne parlant pas russe ». Le conducteur ne me répondit pas… Cela donne une bonne idée du début de mes relations avec cette communauté russe. C'étaient des gens très simples, âgés et retraités pour la plupart. Juste de l'autre côté du chemin, se trouvait la « datcha » de Mgr Sylvestre. Cet évêque à la retraite avait présidé aux destinées de l'Archevêché orthodoxe du Canada, sous l'égide de l’O.C.A. Lorsqu'il n’était pas à Rawdon, il habitait à Montréal, dans le presbytère de la vaste église orthodoxe russe des saints Pierre-et-Paul. Apparemment, Mgr Sylvestre n'était pas particulièrement enchanté par ma présence.


Higoumène Georges Leroy: Vers l'Abitibi!
Pourtant, tout se déroulait assez bien, et je passai l’hiver dans cet ermitage.

Le lieu correspondait tout-à-fait à l'image d'Épinal d'un skite, tel qu’on pouvait se l'imaginer. En regardant par la fenêtre, on apercevait les croix du cimetière, au travers des frondaisons. Le soir, scintillaient des lampes rouges qui brûlaient sur les tombes. L'environnement était très beau. L'hiver, j'allais jusqu'au centre du village en passant sur le lac gelé, car ce chemin était nettement plus court. - J'aurais dû faire attention aux symboles : à côté de la porte de l'ermitage, poussait une vigne qui n'a bien sûr jamais donné un seul grain de raisin, vu le climat. Le sol du cimetière ainsi que celui de tous les environs était fait de sable : le paradis des fourmis ! - Que peut-il advenir d'une maison posée sur le sable, et à la porte de laquelle pousse une vigne stérile ? J’allais assez rapidement le savoir. – Mgr Sylvestre présenta au Métropolite Théodose les doléances de ses ouailles. Pourquoi « le Métropolite Théodose », et non point l’évêque diocésain ? En fait, à ce moment-là, le siège épiscopal de l'Archidiocèse du Canada dans l’O.C.A. se trouvait vacant. Après la mise à la retraite de Mgr Sylvestre, un temps fort long s'écoula jusqu'au moment où fut nommé un nouvel évêque. Lorsque se posa la question de ma présence en l'ermitage de Rawdon, je ne pouvais me référer à un évêque diocésain. Il fallait aller voir Mgr Théodose - et Washington, c'est un petit peu loin… Dans ma situation, le problème, c’est que je ne pouvais pas aller demander l’avis ou les directives de mon évêque : pratiquement, je ne pouvais me référer à personne.

Un jour, un prêtre arrive à l’ermitage.

Il me porte le message du Métropolite, qui me signifie qu'il faut partir. Les Russes n'admettent plus ma présence. Un simple hiéromoine pesait beaucoup moins lourd dans la balance, qu’une importante église russe. À l’heure actuelle, cela me paraît très évident : l’administration ecclésiastique respecte les bâtiments, et beaucoup moins les personnes… Certes, cela devrait théoriquement être le contraire, mais il faut tenir compte de la réalité. À l’époque, je voyais l’Église sous des traits passablement idéalisés. J'avoue que j'ai été assez sidéré par cette décision. C'était en hiver. Où aller désormais ? J'ai obtenu un délai, de la part de Mgr Sylvestre. Mais il fallait partir…


Higoumène Georges Leroy: Vers l'Abitibi!
Le Wilde

Mario, l’étudiant québécois que j'avais rencontré à l'Institut Saint-Serge cf. Chronique d'Abitibi 5, et qui m'avait mis au courant de l'existence de l'ermitage de Rawdon, me fit découvrir sa région: l'Abitibi. Reprenons notre carte du Québec et posons le doigt à l'endroit où se trouve la ville de Montréal. À partir de là, traçons une ligne de six cents kilomètres vers le Nord : notre crayon s'arrête sur l'Abitibi ! C'est une vaste région, avec trois villes principales : Amos, Val-d'Or et Rouyn. Cette région est couverte de forêts et de lacs, sur un sol de granit. Son relief a été aplani lors de la période glaciaire, par le raclement des formidables glaciers qui recouvraient cette partie de la terre. À la fin de la glaciation, les glaciers reculèrent puis disparurent, laissant derrière eux des amoncellements de sable bien reconnaissables, appelés « eskers », d'où jaillissent des sources d'eau d'une pureté remarquable. Partout, on trouve des beaux galets ronds en granit - souvent striés d'une veine de quartz - qui sont parfois de véritables œuvres d'art - signes de la forte érosion que les glaciers exercèrent sur le roc.

D'immenses forêts recouvrent le territoire. Elles comprennent des résineux, des bouleaux, et des trembles - sorte de faux peupliers. Les sous-bois sont inextricables, parsemés de marécages et de bois mort, mais souvent ils proposent aux promeneurs qui s’y aventurent de merveilleux lits de mousse qui charment le regard par toutes les nuances de vert. Diverses espèces de lichens croissent sur le sol, attestant la pureté de l'air. Une abondante faune vit dans cet environnement naturel, mais elle reste la plupart du temps invisible, effarouchée par la présence de l'être humain. Chaque personne qui, la saison venue, cueille des framboises dans les broussailles, peut vous compter son aventure de la rencontre avec un ours, qui est lui-même tout aussi friands de ces délicieux fruits rouges, que les êtres humains. Généralement, le plantigrade est aussi étonné de sa rencontre, que le mammifère à deux pattes, qui tient un panier entre ses mains… - De la fin de novembre au mois d'avril – selon les années - ce paysage relativement austère se couvre de neige, dont la couche s'épaissit au fur de l'hiver. Devant soi, s'étend un immense paysage blanc, sous un ciel bleu cobalt. Idéal pour la méditation !

Il existe tout un vocabulaire, concernant la neige : ce n'est pas n'importe quelle neige qui tombe… Aujourd'hui, s'il ne fait pas froid, il peut tomber de la « neige mouillante », autrement dit de la « neige à bonhomme », assez lourde et adhérente. S'il fait humide, les arbres peuvent être « frimassés », c'est-à-dire couvert de givre ; avec un rayon de soleil, cela donne des effets féeriques. Par contre, s'il fait plus froid, il tombe de la « neige folle », facilement emportée par le vent. Ce même vent arrache des cristaux aux « bancs de neige » qui bordent les routes, rendant la visibilité souvent problématique. Il s'agit de « poudrerie ». - En hiver, on a très vite appris à se protéger les mains et à se couvrir la tête, par lesquelles on perd de sa précieuse chaleur. Lorsqu'il fait moins vingt et que vous êtes barbu, vous sentez tout de suite la différence en voyant votre moustache se couvrir de givre… À moins trente, on change de catégorie : la neige rend un son métallique sous les pas. Généralement, en hiver, le froid n'est pas du tout désagréable, car il s'agit d'un froid sec, analogue à celui qui est ressenti dans les paysages montagneux d'Europe. Comme dans les montagnes, au printemps, selon les endroits, les champs se couvrent de fleurs multicolores. Les couleurs sont beaucoup plus franches que leur équivalent dans un paysage européen, et les textures - plus rudes.

Souvent, en été, les ciels sont d'une remarquable beauté et donnent un vrai sentiment de profondeur : régulièrement, il arrive que les bases des nuages soient totalement horizontales, comme coupées au couteau, et que ces bases de nuages soient toutes exactement à la même altitude, au même niveau. L'alignement de ces masses nuageuses suit la courbure de la terre et vous fait ressentir à quel point nous habitons sur une planète ronde. La pureté de l'air donne, en les nuits estivales, des ciels brasillants d'étoiles, où la Voie lactée se laisse voir dans toute sa splendeur - particulièrement en les nombreux endroits dépourvus de tout éclairage nocturne. En été, vous vous tenez immobile, l'oreille aux aguets : tout au loin dans la forêt, deux chouettes se répondent, et leurs lents hululements alternés semblent venir d’une lieue de distance. Mais la splendeur du ciel ne se révèle jamais mieux que quand, par des nuits glaciales, vous vous tenez immobile, écoutant là-bas, au loin, les craquements dans la forêt : ce sont les troncs d'arbres qui se contractent sous le froid. Je lève les yeux vers le bulbe de la chapelle, qui reluit doucement, et vers sa croix qui fend la nuit. Les étoiles scintillent par milliers, tout autour de la coupole, et on a vraiment l'impression de pouvoir les saisir par les mains, d'être soi-même environné par le ciel. Le climat est vraiment contrasté : entre les 30° sous zéro que l'on atteint en certains jours de janvier, et les 30° au-dessus de zéro qui sont courants lors des jours étouffants de juillet, il y a 60° de différence ! En une même journée, la température peut changer abruptement.

Higoumène Georges Leroy: Vers l'Abitibi!
Les maisons sont faites d'une structure de bois, et elles craquent lors de ces brusques chutes de température.

Les contrastes climatiques vous offrent tous les plaisirs des changements de saison bien tranchés : le plaisir d'être emmitouflé dans un chaud manteau et de rentrer dans la maison douillette et confortable, alors qu'un vent coupant règne au dehors, et que l'on n'y voit rien, dans la tempête de neige - au printemps, retrouver un beau matin, les sensations oubliées depuis longtemps : le parfum de la terre humide qui est en train de dégeler, le murmure de l'eau courante, le chant joyeux des oiseaux que l'on n’a plus entendus durant tout l'hiver, les cris stridents des oies sauvages qui arrivent du Sud en « voiliers », ces grandes formations en forme de « V », qui parcourent tant de milliers de kilomètres - en été, chercher un coin d'ombre pour s'abriter du soleil à l'endroit même où s'accumulait une énorme congère de neige, il n'y a pas si longtemps que cela ; s'asseoir sur le siège berçant, face au lac, et regarder le huard qui plonge et ramène un poisson – et en automne, goûter des instants vraiment paradisiaques lors des plus beaux jours de l'année, lorsque la lumière du soleil devient dorée et d'une douceur veloutée, et que les arbres se parent de toutes nuances avant de perdre leur feuillage. - Vous commencez à comprendre pourquoi j'aime l'Abitibi !

Je me suis sans doute trop attardé à décrire ma région d'adoption (note du rédacteur: j'ai un peu raccourci…) Mario me fit donc connaître sa région et me présenta à sa famille. Je fus reçu chaleureusement, comme le font les Abitibiens. Je fis connaissance des parents, frères et sœurs; ils m'emmenèrent dans le chalet qu'ils possédaient au bord d'un lac immense, parsemé d'îles. Après quelques temps de recherche, je fis l'acquisition d'une maison, située tout au fond de la campagne. Celle-ci était à vendre pour un prix très accessible. Elle était située au milieu d'une large vallée, dans un beau site. J'y déménageai ; une chapelle fut aménagée dans l'une des pièces de la maison. Et là, j'eus le temps de réfléchir…

(A suivre…)

(Note du rédacteur: on trouve ici un article sur la présence orthodoxe à Rawdon avec des photos des lieux mentionnés par le père Georges)

Higoumène Georges Leroy: Vers l'Abitibi!

Rédigé par Vladimir GOLOVANOW le 1 Juin 2013 à 14:50 | 0 commentaire | Permalien

 Ex-archevêque de Canterbury Rowan Williams: " je pensais à me convertir à l'orthodoxie "
Rowan Williams, ex-archevêque de Canterbury, qui a publié un livre sur Dostoëvski en 2008 a donné à cette occasion un interview au le site BBC Russian Service. Le blog " Parlons d'orthodoxie" met en ligne la traduction

BBC : Comment vous êtes-vous intéressés à la culture russe et, tout particulièrement, à Dostoïevski, à qui vous avez consacré un de vos livres?

Rowan Williams : Je me suis passionné pour la culture russe en général et après avoir regardé les films d’Eisenstein « Ivan le Terrible » et « Alexandre Nevsky ». Ensuite je me suis plongé dans la musique russe. C’est plus tard j’ai découvert Dostoïevski et la littérature russe. Pendant mes études de théologie, j’ai lu beaucoup d’ouvrages de philosophes et théologiens russes. Vladimir Lossky est devenu le plus important pour moi, je lui ai consacré ma thèse de doctorat. Telle est la longue histoire de mon intérêt pour la Russie.

BBC : Vous avez grandi dans le Pays de Galle. Parlez-vous gallois ?

R. W. : On parlait gallois chez nous. Mes parents et mes grands-parents passaient souvent à leur langue maternelle. Je ne parle pas aussi bien qu’eux, mais la tradition littéraire est importante pour moi comme pour eux.


BBC : Combien de langues parlez-vous ?

R.W. : Je lis neuf ou dix langues, mais je n’en parle que trois.

BBC : Pourquoi avez-vous décidé d’écrire un livre sur Dostoïevski ? Quel est votre message ?

R.W. : Depuis la publication de mon livre, on me demande : pourquoi nos contemporains doivent-ils lire Dostoïevski ? Pourquoi faut-il le lire en Occident ? La raison pour laquelle on le lit en Russie est différente. Je pourrais répondre à ces deux questions que Dostoïevski nous a montré à deux fois l’image d’un monde dans lequel l’échelle des valeurs a été répudiée. Le libre arbitre est devenu la seule valeur. Mais la volonté de l’homme est une chose étrange et sauvage. Si elle ne sait rien de ce qui est de plus haut qu’elle, si elle ne connait qu’elle-même, si elle n’aime pas, elle se transforme en une force destructive.

D’abord, Dostoïevski nous a montré un homme qui est devenu un criminel – dans Crime et Châtiment. Puis un autre exemple d’une telle transformation pour ainsi dire politisée dans Les Démons qui est, à mon avis, son roman le plus troublant et le plus anxiogène. Il me semble qu’il faut nous demander comment cette expérience s’applique à notre société.

Personne n’aura besoin de l’individu qui vit sans amour, qui ne connait que soi-même. S’il ne s’agit que de pouvoir, de combat, de rivalité et de conquête, la politique devient cruelle à l’extrême. Dostoïevski vise deux cibles : l’individualisme et le collectivisme, le faux individualisme et le faux collectivisme. Dostoïevski est un auteur horriblement incommode pour tout homme politique, qu’il soit de gauche ou de droite : il fait peu de cas de toutes les vanités et de toutes les suffisances.

Ekaterina Guenieva : Dostoïevski est-il pour vous l’un de vos interlocuteurs intimes ? Il est tellement différent de vous.

R.W. : La personnalité de Dostoïevski est très contradictoire. Dans l’une des critiques de mon livre, il avait été observé que Dostoïevski journaliste et publiciste, n’avait pas été du tout le même auteur ouvert à l’écoute et à la vision plurielle dont nous connaissons la pensée d’après ses romans. Le publiciste Dostoïevski est au contraire intolérant et fanatique.

Vous savez, parfois je me demande si j’aimerais voyager dans le même compartiment que Dostoïevski ? Dostoïevski est la preuve de ce qu’un grand artiste est toujours bien plus que sa propre personnalité. L’artiste est toujours plus ample que ce qu’il sait ou ce qu’il croit savoir. Le journaliste Dostoïevski avait des réponses claires à toutes les questions et il sévissait avec mépris et moquerie contre tous ses adversaires. Sa fureur avait une belle plume.

Par contre, en créant un roman, il ne pouvait pas s’en tenir à une vision plate et simpliste. Il était à l’écoute de toute la polyphonie du monde, il la gérait, tel un chef d’orchestre. Je pense qu’aucun artiste ne peut être réduit à sa personnalité dans le sens étroit du terme. Je viens de terminer un livre très important sur Shakespeare de Tony Nuttall, critique anglais décédé - Shakespeare the Thinker (Shakespeare le Penseur). L’auteur nous montre constamment l’objet de la réflexion et les modes de pensée de Shakespeare lorsqu’il écrit. Il ne formule pas sa vue des choses pour l’incarner en un héros dramatique, mais il réfléchit en créant. Le romaniste Dostoïevski en fait de même.

BBC : Le titre originel de votre livre est « Dostoïevsky : Language, Faith and Fiction ». Comment le traduiriez-vous en russe ?

R.W. : C’est une question difficile ! Le mot « Language » dans le titre signifie le « discours », ce qui veut dire le processus du dialogue et de l’échange. En russe, on pourrait le traduire comme « слово » (« mot ») dans le sens français de « parole ». Derrière un mot, il y en a toujours un autre. Une nouvelle étape des relations entre les hommes survient toujours au bout d’un échange. J’ai mis ces trois mots ensemble dans le titre parce que je suis sûr : si vous comprenez ce que faisait Dostoïevski en tant qu’auteur d’une histoire fictionnelle, vous comprendrez également la manière dont il appréhendait la nature de la parole en tant qu’instrument littéraire. Et ainsi vous découvrirez certaines choses sur la foi.

Ainsi pour Dostoïevski, comme pour moi, commence à se révéler, enfin, la parole de Dieu. A la limite, nos relations avec Dieu consistent dans le fait que Dieu laisse à l’homme la liberté et lui permet d’agir selon sa volonté à lui. Ces réflexions se fondent sur les philosophes russes que j’ai lu pendant plusieurs années. Certes, dans mon livre, je me réfère souvent à Bakhtine, mais il y a aussi Alexeï Lossev, auteur remarquable, mais très compliqué, ensuite on peut s’adresser à Lev Vygotski. « Language» - langage, le mot est vaste, très ouvert. Lorsque j’ai découvert Lossev, j’ai été ravi de retrouver les approches de certains philosophes de la tradition byzantine qui affirmaient que le sens des actions divines ne pourrait être compris que grâce à la parole de Dieu. Il est fort plausible que tout cela se retrouve dans le titre de mon livre.

BBC : Comment vous imaginez-vous votre lecteur ?

R.W. : J’en ai parlé dans l’introduction. Je ne m’adressais pas qu’aux spécialistes de la littérature russe, mais je pensais à tous ceux qui s’intéressaient à la littérature en général, à l’art du roman, à la recherche artistique. Je voulais un lecteur qui se poserait des questions sur le fonctionnement de la religiosité que porte la création artistique. Il est intéressant que certains critiques aient saisi cette allusion et remarqué qu’il était possible de mieux découvrir la foi et la religion en étudiant plutôt la conscience d’artiste que grâce à des livres théologiques.

BBC : Qui est-ce qui vous est plus proche parmi les penseurs orthodoxes russes ?

R.W. : J’ai déjà cité Vladimir Lossky. Il a été au centre de mes recherches durant plusieurs années. J’étais tout particulièrement envouté par des auteurs et des penseurs religieux de l’Âge d’argent. Je m’intéressais beaucoup à p. P. Florensky comme à p. Serge Boulgakov. Il y a quelque temps, j’ai publié un livre qui lui est consacré avec, en annexe, ses premières œuvres dans ma traduction.

Même aujourd’hui, je pense que le père Serge Boulgakov reste, avec toutes les particularités excentriques de sa pensée, un des plus grands esprits de notre temps. Qui pouvait encore écrire sur des thèmes littéraires, raisonner sur Dostoïevski et en même temps débattre de questions économiques comme de Nietzsche et sa philosophie ou encore l’histoire du mysticisme Occidental comme Oriental – et enfin refondre tout cela en une vision grâce à sa propre méthode de la synthèse ? C’était un géant.

J’ai reçu plusieurs témoignages de personnes qui le connaissaient : c’était un homme d’une fermeté, d’une clarté et d’une intégrité absolues. Je reviens toujours au père Serge Boulgakov. J’ai toujours à relire Lossky dont je possède un grand nombre d’œuvres inédites sur lesquelles je me suis fondé dans mes recherches. En ce qui concerne Florensky, je lui consacre une nouvelle recherche qui n’est pas encore achevée. D’autant plus intéressante pour moi était l’apparition d’une nouvelle génération de jeunes intellectuels russes dans les années 1990 qui ont découvert ce monde et, si j’ose dire, s’y sont enracinés.

BBC : N’avez-vous jamais pensé à vous convertir à l’orthodoxie ?

R.W. : Bien sûr que si. Effectivement, j’ai pensé à la conversion quand j’étais jeune, mais j’ai toujours eu le sentiment qu’il y avait un danger. Je suppose plutôt que je voulais devenir Russe ! Mais comme je suis né gallois, cela aurait été bien difficile. On peut donc dire que c’était une tentative de mieux se comprendre et de se connaître soi-même.

Ekaterina Guenieva : Qui vous est le plus proche parmi les personnages de Dostoïevski ?

R.W. : Je pense tout d’abord aux personnages qui ont une âme belle. Ils sont compliqués, ambigus. Parfois soudainement, imprévisiblement, en dépit de tout, ils commencent à luire. Pour plusieurs raisons, Zosime est un personnage très important pour moi, mais je pense également à la Sonia de Crime et Châtiment.

J’ai des sentiments étranges au sujet du roman L’Idiot dont tous les personnages sont traumatisés à un tel point qu’il devient impossible d’apercevoir le principe lumineux dans leurs âmes. L’Idiot est donc pour moi le roman le plus douloureux et le plus obscur. On peut le comparer avec Les Démons où la lumière brille, semblerait-il, émise par des hommes les plus inappropriés, mais cette lumière est plus intense que celle qui émane de L’Idiot.

BBC : Que pensez-vous des Russes et des orthodoxes d’aujourd’hui ?

R.W. : Nous entretenons de bonnes relations avec l’Eglise orthodoxe russe. Par contre, je perçois des tensions au sein de cette église. D’une part, il y a ceux, nombreux, qui veulent mettre à profit toutes les possibilités qui s’offrent aujourd’hui dans la société et redécouvrir la tradition. De l’autre, il reste une prudence, voire une défiance, à propos de tout ce qui vient de l’étranger, même si c’est de l’Eglise orthodoxe russe hors-frontières. Ces deux tendances s’opposent l’une à l’autre. Il est très difficile à un étranger d’en parler. Bien qu’il nous soit parfois douloureux d’observer ces contradictions et ces divergences. J’espère que, dans l’église russe, ce sont le courage et la confiance qui d’ailleurs lui sont tellement propres qui triompheront et permettront d’être, enfin, ouverts à ce qui vient de l’étranger ou d’autrui sans aucune craintes ni préjugés.
 Ex-archevêque de Canterbury Rowan Williams: " je pensais à me convertir à l'orthodoxie "

BBC : Est-ce qu’il y a des choses dans la tradition orthodoxe que vous souhaiteriez transposer dans la vie de l’église anglicane ?

R.W. : Je vois deux points que je voudrais introduire dans la tradition philosophique anglicane. D’abord, la distinction entre l’individu et la personnalité qui est profondément élaborée dans le personnalisme russe et, en particulier, dans les œuvres de Vladimir Lossky. Nous parlons plus souvent des individus et ne réfléchissons guère aux rapports entre l’individu et la personnalité. L’individu appartient à une génération, c’en est un atome biologique ou social. Il peut devenir une personnalité grâce à l’expression de sa volonté, de l’apprentissage de soi-même, de son développement, de la connaissance de Dieu.

Quand j’enseigne ou que je prononce une homélie, je dois assez souvent expliquer ce fait si simple : un individu n’est pas encore une personnalité. On me répond : « Oh ! Pourquoi n’y ai-je jamais pensé ? Pourquoi personne ne me l’a dit auparavant ? ». C’est cet élément que je voudrais introduire dans la conscience anglicane.

L’autre point qui est certainement lié au premier, touche le sens même de l’existence de l’Eglise. L’Eglise n’est pas un simple lieu de rassemblement; l’Eglise est le lieu où des relations se mettent en place en qui permettent à l’individu de devenir une personnalité.

Ce thème n’était pas développé que par des auteurs orthodoxes bien qu’ils aient commencé à en traiter au début du XXe . Des philosophes français et ensuite américains l’ont repris. Je connais, par exemple, le métropolite grec Jean Zizioulas qui travaillait, lui aussi, sur ce thème. Je pense qu’il serait d’accord avec l’idée que sa propre théologie repose sur les œuvres de prédécesseurs tels que Lossky et Florensky. Je voudrais introduire ces idées par l’enseignement et la prédication. D’ailleurs, ce que j’ai écrit sur Dostoïevski relève du même esprit.

Traduction Dimitri Garmonov
Site Киевская Русь
 Ex-archevêque de Canterbury Rowan Williams: " je pensais à me convertir à l'orthodoxie "

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 1 Juin 2013 à 14:19 | 11 commentaires | Permalien

L'archevêque Michel (Donskoff) de Genève (EORHF) celebre ses 70 Ans
Pour les 70 ans de Mgr Michel (1), krest-most.ru présente quelques souvenirs et anecdotes livrés par le prélat au cour d'une interview (repris dans plusieurs autres média orthodoxes russes)

Quand je suis allé en Russie pour la première fois, j'étais particulièrement heureux d'entendre parler russe dans la rue.

Curieuse rencontre

Toute la vie je rêvais de me rendre au village cosaque de Zotovsky sur le Don, où avaient vécu mes ancêtres mais où je n'étais jamais allé. Mon père m'en avait suffisamment parlé pour que je puisse bien me représenter les environs et la maison familiale et c'est ainsi que, quand enfin j'ai eu la possibilité d'y aller, j'ai retrouvai la maison difficulté. Là les curieuses commencèrent: un inconnu se tenait devant la porte et il bougonna en me voyant: "Ha-а! Voilà Michel qui nous rend visite."

Il se révéla qu'il était de la famille. Mais comment m'avait-il reconnu? Je n'avais prévenu personne de mon arrivée et, d'ailleurs, nous n'avions plus aucun contact. Entrant dans la maison nous nous sommes assis autour de la table… et tout s'est éclairci. Cet homme avait servi toute sa vie dans l'armée et avait été régulièrement convoqué au "service spécial" où on lui demandait s'il n'avait pas eu de contacts avec moi. Et on lui montrait mes photos. Voilà pourquoi il savait bien à quoi je ressemblais et mon arrivée ne lui faisait pas particulièrement plaisir: je lui avais causé de sérieux désagréments.

L'archevêque Michel (Donskoff) de Genève (EORHF) celebre ses 70 Ans
Aussi me reçut-il froidement; et en plus l'Eglise ne lui disait rien qui vaille. Mais nous avons parlé de tout à cœur ouvert, nous avons malgré tout trouvé un terrain d'entente et qu'en nous séparant nous nous sentions réellement parents…

La petite icône

Mon grand-père Semion Platonovitch Donskov a été fusillé dans ce village en 1918 par les rouges et mon père a été l'un des plus jeunes cosaques à rejoindre le général Krasnov pour défendre Don contre les bolcheviks. Il a quitté la Russie avec l'armée du général Wrangel, passant par Constantinople il a traversé l'enfer de Lemnos, où les soldats russes mourraient de faim et de froid (2). Il y eut ensuite de pénibles tribulations en Turquie, en Grèce, dans différentes villes européennes et enfin, déjà marié, ils est arrivé à Paris où je suis né pendant la Deuxième Guerre mondiale.

En quittant la Russie, mon père n'a emporté que son uniforme et deux objets: la photo de mon grand-père et une petite icône de saint Tikhon de Zadonsk que le grand-père avait rapporté de Zadonsk après la canonisation du saint. Cette icône était en laiton et lui a sauvé la vie quand une balle a frappé la poche où il la transportait. J'ai été très surpris quand mon père m'a brusquement donné cette icône, plutôt que de la donner à l'un de mes aînés, car alors je ne pensais pas encore devenir prêtre. Mais mon père a fait cela sans que je sache pourquoi.

L'archevêque Michel (Donskoff) de Genève (EORHF) celebre ses 70 Ans
Le baptême sous les bombes

Une bombe est tombée sur l'église parisienne que fréquentait notre famille quand je suis né, et le bâtiment a été entièrement détruit. À ce moment nous avons reçu la visite par l'évêque orthodoxe polonais Matfej (Семашко) qui demande à mon père quand allait-on baptiser le nouveau-né. Mon père a répondu : «Quand l'église sera restauré». Mgr a répliqué qu'on ne pouvait attendre 20 ans et m'a baptisé chez nous, à la maison.

«C'est votre "Pâques russe" (en français dans le texte)?»
J'ai fait mes études dans l'internat Saint George à Meudon et, au milieu des années 60 j'ai fait mon service militaire. Pour Pâques j'ai fait une demande de permission, bien qu'on m'avait prévenu que je risquai d'être puni si les raisons de la demande n'étaient pas reconnues valables (les raisons valables étaient la naissance d'un enfant ou le décès d'un parent…) Je suis allé au PC et j'ai demandé un formulaire au sergent qui s'est mis à rire:

— Tu as pris une insolation pendant la marche ? J'ai répondu vertement et, le ton étant monté, le colonel est sorti demandant de quoi il s'agissait.
— Je veux être à la maison pour Pâques.
— Vous êtes Russe ? А c'est votre Pâques russe?
Et voilà qu'il envoie le sergent éberlué chercher formulaires et tampons puis, pointant le doigt au ciel, il ajoute:
— J'ai des chefs, mais au dessus il y a un Chef Suprême. Et en conscience je ne peux pas vous le refuser…
Ainsi je n'ai pas jamais raté Pâques dans la vie.

L'archevêque Michel (Donskoff) de Genève (EORHF) celebre ses 70 Ans
Une autre vie

Quand je suis allé en Russie pour la première fois, j'étais particulièrement heureux d'entendre parler russe dans la rue. Ceux qui vivent en Russie ne peuvent le comprendre: ici il est normal qu'il y ait des Russes à l'église, dehors, partout … Mais pour nous, en émigration, en sortant de l'église nous nous retrouvions dans un monde absolument étranger. Pour Pâques nous nous avions l'habitude de nous congratuler dans l'église, dehors ce n'était plus possible et il semblait qu'il ne pouvait en être autrement… Mais brusquement je me retrouve dans un pays où on peut échanger les congratulations pascales dans la rue. C'est une joie et un bonheur.

Traduction et notes de VG

L'archevêque Michel (Donskoff) de Genève (EORHF) celebre ses 70 Ans
Notes:

(1) Notice biographique: Simon Donskoff, le futur archevêque, est né le 29 Mars 1943 à Paris. Il a été élève au collège jésuite St Georges à Meudon et au lycée russe. Il a servi dans le corps médical pendent son service militaire puis il a travaillé dans des hôpitaux cliniques de réanimation à Paris. Il a été moniteur et directeur de camps "Vitiaz" (1959-66), y compris en Russie (1994-1995). Ordonné diacre en 1981, prêtre en 91, il a été sacré évêque en 1996 et promu archevêque en 2011. Il est l'ordinaire du diocèse de Genève et d'Europe occidentale de l'EORHF depuis mai 2006.

(2) Plus de 21 000 Cosaques de l'Armée Blanche ont été internés à Lemnos par l'armée française de novembre 1920 à juin 1921 (cf. Bruno Bagni, « Lemnos, l'île aux Cosaques », Cahiers du monde russe, n° 50/1, janvier-mars 2009). Les tombes des victimes des épidémies et des mauvaises conditions sanitaires sont le dernier témoignage de cet épisode tragique.

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 31 Mai 2013 à 17:27 | -1 commentaire | Permalien

Des calvaires crées dans l’archipel des Solovki seront exposés au polygone de Boutovo
Une exposition intitulée « La Croix, gloire des martyrs » sera ouverte au polygone de Boutovo du 1 juin, jour de la commémoration des Nouveaux Martyrs, au 1 juillet. Ces calvaires ont été créés à l’atelier de travail du bois du monastère des Solovki qui est dirigé par GueorgyKojokar.

Seront présentés plus de 120 calvaires en bois ciselé ainsi que des croquis et des photos. Ces calvaires ont été installés en Russie ainsi que dans d’autres pays. Des liens très étroits unissent les Solovki et Boutovo, les deux Golgotha du martyr russe.Les dates de l’exposition coïncident avec les célébrations du 400e anniversaire de la dynastie des Romanov. C’est il y à 20 ans que l’on a repris aux Solovki la tradition des calvaires en bois ciselé.

Le patriarche de Moscou Cyrille conduira le 1 juin une divine liturgie dans l’église de Boutovo.

Des calvaires crées dans l’archipel des Solovki seront exposés au polygone de Boutovo
L’ancien polygone de tir de la NKVD à Boutovo est connu comme lieu d’exécutions massives des victimes de la répression communiste, cela depuis les années trente et jusqu’au début des années cinquante du dernier siècle. 27.765 personnes ont été abattues à Boutovo d’août 1937 à octobre 1938. Le premier Concile des évêques siégeant en 1997 a canonisé le Saint Martyr Séraphin, métropolite de Saint-Pétersbourg, fusillé à Boutovo en novembre 1937.

C’est en 2004 qu’a commencé la construction de l’église en la mémoire des Nouveaux Martyrs et Confesseur, les travaux se sont terminés en 2007. Les défunts patriarche de Moscou Alexis II et le métropolite Laure, primat de l’Eglise Hors Frontières avaient solennellement consacré la première pierre de cette église. C’est également en 2007 qu’ils ont procédé à la signature de l’Acte d’union canonique entre les deux branches de l’Eglise russe. Une fin a ainsi été mise à la séparation provoquée par la révolution de 1917 et la guerre civile qui l’a suivie.

Traduction "Parlons d'orthodoxie" Lien Interfax-religion et N.Krivocheine "Contre l’oubli, vers le pardon"
Des calvaires crées dans l’archipel des Solovki seront exposés au polygone de Boutovo

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 30 Mai 2013 à 11:03 | 0 commentaire | Permalien

Un rassemblement silencieux de prières aura lieu ce dimanche 2 juin à Paris, de 17h à 19h, sur l'esplanade du Trocadéro, Parvis des droits de l'homme, pour lancer un appel á la communauté internationale et à l'opinion publique en France pour la libération des deux évêques d'Alep (Syrie). Il est organisé par l'Archevêché orthodoxe antiochien d'Europe et par l'Eglise syriaque orthodoxe d'Antioche à Paris.Comité d'organisation

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 30 Mai 2013 à 08:23 | 3 commentaires | Permalien

Le patriarche Cyrille consacre la cathédrale de la flotte à Kronstadt
Le 28 mai patriarche Cyrile et le patriarche de Jérusalem et de Palestine Théophile III ont été accueillis à la cathédrale Saint Nicolas de Kronstadt. Les deux primats y officié une divine liturgie à laquelle assistait Madame Svetlana Medvedev, épouse du premier-ministre de la Fédération de Russie. Les travaux de reconstruction de la cathédrale se sont déroulés sous le Haut-Patronage de Madame Medvedev. Assistaient également à l’office M. Vladimir Medinsky, ministre de la culture, ainsi que GueorgyPoltavtchenko, gouverneur de Saint Petersburg.

La cathédrale de la flotte à Kronstadt a été bâtie en 1913 à la gloire de la marine militaire russe. Les plaques commémoratives fixées sur ses murs portaient les noms de 12.000 marins ayant péri au combat. Quotidiennement des prières étaient élevées pour le repos de leurs âmes.La hauteur de l’édifice est de 70 m. L’architecture rappelle celle de la basilique Sainte Sophie à Constantinople. Le revêtement de granit, les ornements en terre cuite, les frises en majolique, les mosaïques en étaient splendides. La cathédrale peut accueillir jusqu’à 5.000 fidèles. Par beau temps l’édifice était visible de Saint Petersburg.

Le patriarche Cyrille consacre la cathédrale de la flotte à Kronstadt
La cathédrale connut un destin dramatique. Les soviets la firent fermer après l’avoir au préalable pillé. Elle dut d’abord abriter un cinéma portant le nom de Gorki, puis une salle de concertet, enfin, une succursale du Musée de la marine.
C’est en 2009 qu’il a été décidé de procéder à des travaux de reconstruction. Le crucifix qui couronne les coupoles a été installé en 2002. Les épures et les dessins d’origine ont inspiré les promoteurs du chantier qui a couté 1 milliards trois millions de roubles.

TV - 5 VIDÉO et PHOTOS
Traduction "PO"

La Russie rouvre la cathédrale de Kronstadt, haut lieu de la révolution, qui avait été fermée au culte depuis près d'un siècle.

Le patriarche Cyrille consacre la cathédrale de la flotte à Kronstadt

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 29 Mai 2013 à 18:21 | 0 commentaire | Permalien

Le 3 JUIN 2013 à 9.30 (les heures et la confession)

LA DIVINE LITURGIE SERA CÉLÉBRÉE DEVANT LES RELIQUES DE SAINTE HÉLÈNE DANS L’ÉGLISE SAINT LEU - SAINT GILLES (92, RUE SAINT DENIS, MÉTRO ÉTIENNE MARCEL)

Chers frères et soeurs! Nous vous invitons à participer aux préparatifs des agapes qui suivront notre célébration.

Renseignements : Alla Gouraud, 06 32 49 46 10.

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 29 Mai 2013 à 10:20 | 1 commentaire | Permalien

Vladimir Poutine a invité Théophile III, patriarche de Jérusalem, aux festivités du 1025e anniversaire du baptême de la Russie
Le 27 mai Vladimir Poutine, président de la Fédération de Russie, a reçu dans sa résidence de Sotchi, les patriarches Cyrille de Moscou et de Russie ainsi que Théophile III, patriarche de Jérusalem et de Palestine. C’est la première fois que le patriarche Théophile se rend en Russie.

Le président a exprimé au patriarche Théophile sa reconnaissance pour la construction sur les bords du Jourdain d’une maison d’accueil destinée aux pèlerins : « Je tiens à vous souhaiter, Votre Béatitude, un séjour agréable et utile sur le sol russe. J’espère vous revoir lors des solennités du 1025e anniversaire du baptême de la Russie.

Les relations sont excellentes, il faut le souligner, entre le patriarcat de Moscou et celui de Jérusalem ».

Le patriarche Cyrille a, de son coté, souligné l’importance de la visite en Russie de Théophile III : « J’espère que nos contacts contribueront aux succès des initiatives de paix de la Russie au Proche-Orient. La paix et la sérénité doivent s’instaurer en Terre Sainte, là où s’est incarné Notre Seigneur ».

Vladimir Poutine a invité Théophile III, patriarche de Jérusalem, aux festivités du 1025e anniversaire du baptême de la Russie
Le patriarche Théophile estime que sa visite en Russie revêt un caractère historique : « Ce séjour en Russie scelle les excellentes relations entre nos Eglises, entre le peuple russe et le peuple palestinien. Au nom des chrétiens orthodoxes de Jordanie, de Palestine et de la Communauté du Saint Sépulcre je remercie Vladimir Poutine pour l’intérêt bienveillant qu’il manifeste à l’égard de la Terre Sainte, à la cause de la paix au Proche-Orient. Votre récent voyage en Israël, en Palestine et en Jordanie a eu une immense portée politique et religieuse. Nous prions pour vous en tant que dirigeant qui s’inspire des valeurs universelles et orthodoxes ».

Iterfax-religion
Traduction " Parlons d'orthodoxie"


Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 27 Mai 2013 à 17:25 | 3 commentaires | Permalien

Le Patriarche de Géorgie Elie II : « Je suis reconnaissant à Sa Sainteté le Patriarche de Constantinople pour son soutien »
Le Patriarche de Géorgie Elie II : « Je suis reconnaissant à Sa Sainteté pour son soutien ». Pendant son voyage à Constantinople le Primat de l’Eglise Géorgienne s’est assuré du soutien du Patriarche de Constantinople concernant le problème du statut de l’Eglise en Abkhazie.

Selon Interfax – Religion, Elie II patriarche de Géorgie, a déclaré jeudi dernier que le Patriarcat de Constantinople ainsi que l’Eglise Orthodoxe Russe considèrent l’Abkhazie comme faisant partie du territoire canonique de l’Eglise Orthodoxe de Géorgie et n’envisagent pas de reconsidérer leurs attitude.

« Nous avons eu un entretien avec le Patriarche œcuménique. Nous étions sur les mêmes positions en ce qui concerne de nombreuses questions. Je suis reconnaissant à Sa Sainteté pour son soutien. Il a répété à plusieurs reprises que Constantinople reconnaît la juridiction de l’Eglise Orthodoxe géorgienne en Abkhazie. Avec l’aide de Dieu cette question sera résolue dans la paix ».

Le Patriarche de Géorgie Elie II : « Je suis reconnaissant à Sa Sainteté le Patriarche de Constantinople pour son soutien »
Le primat de l’Eglise de Géorgie a annoncé qu’il envisageait de se rendre en Abkhazie accompagné du Patriarche de Constantinople Bartolomé. De plus, pendant sa visite à Soukhoumi le Patriarche Elie II installera en Abkhazie son représentant, un clerc d’origine abkhaze.

Toutes les églises orthodoxes locales reconnaissent l’Abkhazie comme partie intégrante du territoire canonique de l’Eglise géorgienne. Aussi toutes les questions survenant en Abkhazie doivent être examinées par l’Eglise Orthodoxe Géorgienne et son Synode. Nous avons convenu que l’Eglise Géorgienne ferait tout son possible pour que son clergé visite l’Abkhazie . Je suis le métropolite de Soukhoumi et d’Abkhazie et je dois également m’y rendre pour apaiser les esprits » - a dit Elie II.

« Les problèmes ecclésiaux en Abkhazie découlent du contexte politique. Et nous devons tout faire pour que les divergences politiques ne se répercutent pas sur la vie de l’Eglise. Au contraire, l’Eglise doit tout faire pour ramener la paix dans notre pays. »

Le voyage du Patriarche Elie à Constantinople revêtait une grande importance à la lumière des informations selon lesquelles le Patriarche de Constantinople aurait reconnu l’autocéphalie des paroisses abkhazes qui se sont détachés de l’Eglise Orthodoxe géorgienne.

Suite au conflit armé de 1992-1993 entre la Géorgie et l’Abkhazie le clergé de l’Eglise géorgienne dans la juridiction de laquelle se trouve l’Abkhazie s’est vu obligé de quitter le pays. Depuis, c’est le Patriarcat de Moscou qui a pris en charge les paroissiens abandonnés. En vertu d’un accord tacite entre Moscou et Tbilissi les abkhazes recevaient une formation dans les écoles de théologie de Moscou. Ils étaient également ordonnés par des archevêques de l’Eglise Orthodoxe russe mais Moscou a toujours souligné que l’Abkhazie était un territoire canonique du Patriarcat de Géorgie.

En 2009 lors d’une réunion du clergé d’Abkhazie le dirigeant de l’ex-diocèse de Soukhoumi et d’Abkhazie de l’Eglise Géorgienne, le protopresbytre Vissarion Allia, un abkhaze a proclamé arbitrairement l’autocéphalie de l’Eglise locale abkhaze comprenant les diocèses de Soukhoumi et de Pitsounda. Il a demandé au patriarche de Moscou de reconnaître l’autonomie de l’église abkhaze. Malgré de nombreuses demandes du clergé abkhaze le Patriarche Cyrille est resté inébranlable. Il a souligné que pour résoudre des problèmes ecclésiastiques en Abkhazie il faut se fonder sur le droit canon et procéder de concert avec le Patriarcat de Géorgie.

Les abkhazes n’étaient donc pas satisfaits de la position de Moscou. En mai 2011 les participants d’une réunion spontanée ont fondé encore une « métropole » avec une représentation au Mont Athos. Son but était de proclamer « l’église indépendante d’Abkhazie ». La réunion avaiot été convoquée par deux jeunes prêtres, Dorothée Dbar et André Ampar qui ont décidé de chercher à obtenir la reconnaissance de leur « juridiction » par Constantinople.

A ces fins ils ont entrepris un voyage en Turquie où ils ont été reçus à titre de simples pèlerins par le Patriarche de Constantinople. Plus tard, le Patriarche Bartolomé a expliqué que cette rencontre avait été non officielle. Les abkhazes avaient été reçus comme tous les autres chrétiens qui sollicitaient une rencontre avec le Patriarche. Il leur a été souligné que l’Abkhazie était un territoire canonique de l’Eglise Orthodoxe Géorgienne. Pour éviter tout malentendu le Patriarche Géorgien Elie II s’est cependant rendu lui-même à Constantinople.

Traduction Elena Tastevin
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Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 27 Mai 2013 à 10:02 | 1 commentaire | Permalien

Lyon: une église prêtée par les catholiques pour 2 paroisses orthodoxes de deux juridictions différentes. Caen:  le rite orthodoxe de l'ordination d'un prêtre en vidéo
La paroisse lyonnaise Notre Dame de toute protection (Eglise russe, diocèse de Chersonèse) a déménagé et, depuis ce dimanche 25 mai 2013, les offices sont célébrés dans une chapelle attenante à l’église St-Joseph des Brotteaux, 146 rue Sully 69006 LYON.

Ce nouveau lieu de culte est prêté à la paroisse par le diocèse catholique de Lyon et, ce qui est particulièrement intéressant, c'est qu'il sert aussi à la paroisse "Saint Sophrone de Vratsa" de l'Eglise de Bulgarie. En effet, les deux paroisses ne célèbrent des offices qu'une fois par mois chacune et rien s'opposait à cette cohabitation harmonieuse. C'est néanmoins un cas exceptionnel au sein de l'Orthodoxie, qui avait d'ailleurs été jugé impossible en son temps par le père Jean pour la cathédrale St Nicolas à Nice…

Le diocèse catholique met aussi à notre disposition une grande crypte sous la chapelle. Cette crypte, construite dans un style quasi byzantin, avait servi de lieu de culte catholique avant la construction de la grande église, dans les années 1880, puis elle fut utilisée comme salle de spectacle. Sa remise en état pour en faire une église orthodoxe va entrainer des frais importants pour la paroisse et prendra du temps...


Caen: Le rite orthodoxe de l'ordination d'un prêtre en vidéo

C'est un moment d'autant plus rare qu'il a eu lieu pour la toute première fois à Caen, ce dimanche. Jean-Paul Lefebvre-Filleau, 62 ans, ancien lieutenant-colonel de gendarmerie, a été ordonné prêtre de l'église orthodoxe roumaine, dans l'église du centre hospitalier Clemenceau. Son épouse, sa famille et une centaine de fidèles de la paroisse Saint-André et Sainte-Alexandra étaient présents. L'ordination a été célébrée par Mgr Marc Alric, évêque-vicaire de la métropole orthodoxe roumaine d’Europe occidentale et méridionale. VIDEO

V.Golovanow

Rédigé par Vladimir GOLOVANOW le 27 Mai 2013 à 09:07 | 5 commentaires | Permalien

Office solennel en l’honneur du 30 anniversaire de l’ordination de l’archiprêtre Nicolas Rehbinder
Une divine liturgie a été officiée le 25 mai à l’église de la Présentation de la Vierge au Temple (Archevêché des Églises Orthodoxes Russes en Europe Occidentale) pour célébrer le 30 anniversaire de l’ordination de l’archiprêtre Nicolas Rehbinder.

La liturgie était présidée par Monseigneur Emmanuel, métropolite de Gaule, exarque du Patriarche œcuménique chargé temporairement de l’administration de l’Archevêché et Monseigneur Nestor, évêque de Chersonèse, Eglise orthodoxe russe.

Office solennel en l’honneur du 30 anniversaire de l’ordination de l’archiprêtre Nicolas Rehbinder
Concélébraient le hiéromoine Marc (Sviatogorov), recteur de l’église cathédrale des Trois Saints Docteurs (patriarcat de Moscou), le père Michel (membre du clergé de l’église de la Présentation), le protodiacre Nicolas Rehbinder (P.M.) et le diacre Alexis Milioutine (P.M.)

Après la fin de l’office les hiérarques, les clercs et les fidèles ont chaleureusement congratulé l’archiprêtre Nicolas

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Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 26 Mai 2013 à 09:46 | 18 commentaires | Permalien

Un monument au Saint Patriarche Hermogène a été inauguré près de l’enceinte du Kremlin
Un monument au patriarche Hermogène de Moscou a été inauguré le 25 mai 2013 dans le Jardin Alexandre, près des remparts du Kremlin. Les patriarches Cyrille de Moscou et le patriarcheThéophile de Jérusalem étaient présents à la cérémonie. C’est il y a exactement 100 ans que le patriarche Hermogène de Moscou avait été canonisé.

Le 3 mai 2012 Sa Sainteté Cyrille avait présidéà la pôse de la première pierre du monument. 79 sculpteurs avaient participé au concours. Ce sont les équipes du sculpteur Salavat Tcherbakov et de l’architecte Igor Vosskressenky qui l’ont emporté.

Les reliques de Saint Hermogène de Moscou se trouvent dans la cathédrale de la Dormition du Kremlin. La canonisation d’Hermogène de Moscou a eu lieu en 1913 lors des cérémonies en l’honneur du 300 anniversaire de son martyr. C’est alors qu’il fut décidé de lui ériger un monument. Cela n’a pu se faire car peu après éclataient la Première guerre et la révolution. Il avait été d’abord envisagé d’installer la statue à l’endroit où se situe actuellement le mausolée de Lénine.

Le patriarche Cyrille a dit lors de la cérémonie d’inauguration : « Le Saint patriarche Hermogène de Moscou avait été l’inspirateur de la restauration de l’Etat russe en 1612, il est digne d’avoir sa statue érigée dans le centre de la capitale, près des murs du Kremlin, à proximité de la statue de Minine et Pojarsky.
Vesti.ru
Traduction "PO"
Un monument au Saint Patriarche Hermogène a été inauguré près de l’enceinte du Kremlin

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 25 Mai 2013 à 15:31 | -1 commentaire | Permalien

Saint Hermogène de Moscou, evêque et confesseur (+ 1611)
Né dans une humble famille de la région de Vologda en Russie, il fut élevé dans le monastère de Kazan. Prêtre séculier dans la paroisse de Saint Nicolas, il fut le témoin de l'apparition miraculeuse de l'icône de la Mère de Dieu.
Après la mort de son épouse, il devint moine au monastère de la Transfiguration, puis métropolite de Kazan et oeuvre à l'évangélisation des Tatares. Il écrivit d'importants ouvrages de théologie durant la "temps des troubles". Lors de l'accession au trône du prince Basile, il fut élevé à la dignité patriarcale. Là il montra un grand zèle pour défendre l'Orthodoxie menacée par le roi de Pologne dont les troupes occupaient la capitale de la Russie.

Le dimanche des Palmes, Hermogène fit comme de coutume la procession en passant devant les troupes et les canons ennemis. Durant la Semaine Sainte, Moscou fut brûlée et le patriarche mis en prison. Plus les troupes russes s'approchaient pour libérer la ville, plus dure fut son incarcération. Il mourut de faim et de soif dans l'horrible cachot où il était enfermé, dix jours avant la libération de Moscou.

Saint Hermogène de Moscou, evêque et confesseur (+ 1611)
Священомученик ЕРМОГЕН

Год рождения Ермогена определяется на основании свидетельств поляков, в 1615 г. утверждавших, что в 1610 г. им противился только «осьмидесятилетний патриарх» (АЗР. Т. 4. С. 51). Возможно, мирское имя будущего патриарха было Ермолай. До сих пор не вполне ясно происхождение ЕРМОГЕНА
В Казани существовало предание о том, что святой был родом оттуда, но в таком случае пришлось бы признать, что он жил в Казани еще в эпоху Казанского ханства

В 1903 г., при посещении Москвы в дни Страстной и Пасхальной седмиц, царь мч. Николай II с другими особами царствующего дома Романовых в сопровождении сщмч. Владимира (Богоявленского), митр. Московского и Коломенского, осмотрел подземелье под собором в честь Чуда арх. Михаила в мон-рях Московского Кремля (где, по преданию, в свое время томился в заточении Ермоген), повелев устроить здесь в будущем церковь во имя св. Ермогена.

В годы, предшествовавшие 300-летию кончины ЕРМОГЕНА,
Синод приступил к исследованию вопроса о канонизации патриарха. Была изучена книга записей исцелений, бывших по молитвам у мощей Ермогена (сообщалось об исцелениях хромых, слепых, больных ревматизмом, туберкулезом, страдающих сумасшествием, нервными расстройствами и т. д.; большая часть чудотворений относится к нач. XX в.). В 1912 г. отмечали память Е. в связи с 300-летием его кончины. На торжествах, которые возглавил митр. Московский Владимир (Богоявленский), присутствовала вел. кнг. прмц. Елисавета Феодоровна. 18 февр. состоялся крестный ход из Казанского собора в кремлевский Успенский собор с чудотворной Казанской иконой Божией Матери.

14 апр. 1913 вышло определение Святейшего Синода о причислении Ермогена к лику святых и о прославлении его 12 мая 1913 г. Для мощей свщм. ЕРМОГЕНА было решено устроить раку и поставить над ней медный шатер, созданный по повелению царя Михаила Феодоровича над ковчегом с частицей ризы Господней

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Rédigé par Parlons d'orthodoxie le 25 Mai 2013 à 06:06 | 0 commentaire | Permalien

L’Orthodoxie, à l'époque soviétique, a survécu grâce aux femmes – a dit le patriarche Cyrille
Le Patriarche de Moscou Cyrille, a déclaré que l'acte de foi des femmes orthodoxes à l'époque soviétique est un exploit comparable, relaté dans les Evangiles, à celui des femmes myrrhophores qui n’ont pas abandonné le Christ dans sa souffrance et la mort.

"Pourquoi l'Eglise célèbre ainsi les femmes myrrhophores? Parce que, lorsqu’advinrent les moments terribles des tortures infligées au Sauveur, et ensuite, de sa crucifixion, les apôtres, qui avaient été témoins de ses plus grands miracles, dont la résurrection, au quatrième jour, de Lazare, ont fui, dans la terreur. L’instinct animal, de survie a tout éclipsé. Alors que les faibles femmes myrrhophores - celles qui sont toujours restées dans l'ombre – n’ont pas abandonné le Sauveur », a dit au cours de son homélie le Patriarche Cyrille après la Divine Liturgie au monastère de Novo-Tikhvine d'Ekaterinbourg.

"Elles sont montées avec lui au Golgotha, Elles se sont tenues au pied de Sa croix, sans aucune crainte de persécution, et même la peur de la mort n’a pu détruire leur amour pour le Sauveur et leur dévotion pour lui", - a-t-il ajouté.

L’Orthodoxie, à l'époque soviétique, a survécu grâce aux femmes – a dit le patriarche Cyrille
Selon le primat de l'Église orthodoxe russe, il y a d'autres exemples de cet immense dévouement des femmes myrrhophores ; comme, dans l’histoire de la Russie après la révolution, quand ont débuté les persécutions contre l’Église et que la confession publique de sa foi vous faisait risquer la mort ou l'emprisonnement.

"Quand beaucoup d’habitants de Iekaterinbourg étaient prêts à déchiqueter la famille impériale, à tirer au canon sur la maison où elle se trouvait, que même les persécuteurs devaient la soustraire à cette haine – seules les sœurs du monastère de Novo-Tikhvine apportaient de la nourriture, en prenaient soin, se mettaient en danger de mort et, comme vous le savez, à la fin, ont péri pour cette dévotion et cette foi », - a dit le patriarche.

"Et puis, dans les années suivantes, des hommes forts, faisant carrière, diplômés, et même conservant la foi au fond de leur cœur, avaient peur d'assister au baptême de leurs enfants, alors qu'ils savaient qu'ils étaient baptisés. Ces hommes avaient peur de se signer, quand bien même, au fond de leur âme, ils restaient croyants. Qui a préservé la foi dans notre pays? Les femmes myrrhophores, nos mères et nos grands-mères, celles qui n'avaient peur de rien ", - a-t-il ajouté.

Le patriarche Cyrille a rappelé que c’est grâce à l'héroïsme de la fidélité des femmes myrrhophores russes qu’on a pu trouver quelqu’un pour entretenir la foi en Russie. "Elles ont sauvegardé la continuité jusqu'au jour où confesser la foi en Christ n’entraîne pas des risques terribles. Les femmes myrrhophores de notre pays ont porté la Foi", - a conclu le patriarche Cyrille.

Pravoslavie.ru Ekaterinbourg, le 20 mai 2013

L’Orthodoxie, à l'époque soviétique, a survécu grâce aux femmes – a dit le patriarche Cyrille
Note du Traducteur, en « post-face »

Lorsque les animateurs du Blog « Parlons d’orthodoxie» m’ont sollicité pour réaliser la traduction du russe vers le français de ce court texte (je n’ai pas été jusqu’à prendre en charge le texte complet à partir duquel il était extrait), j’ai tenté d’esquiver la tâche craignant – sans fausse modestie - mes compétences limitées dans l’art de la traduction et prétextant un surcroit d’activité professionnelle. Mais le texte méritait d’être porté à la connaissance de notre très large public, pas toujours russophone. Bien sûr en respect à celui qui l’a énoncé mais surtout, surtout, en hommage à celles à qui il est dédiée, les femmes myrrophores russes et en véritable souvenir à toutes celle qu’il est plus que légitime de rendre honneur. Ma dédicace personnelle s’adresse à leur intention, à travers celles que j’adresse à mes grands-tantes qui m’ont réellement fait connaitre cette dimension de l’Eglise russe, certes pas à l’époque cruelle, post-révolutionnaire, mais dans l’URSS « ultra-laïcisée » où les actes de foi étaient bien réprimandés. Dommage que j’ai été en retard dans ma traduction pour permettre sa mise en ligne le jour où l’Eglise célèbre les saintes femmes myrrhophores.

Gueorguy

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 23 Mai 2013 à 16:30 | 14 commentaires | Permalien

L’année « Russie - Pays-Bas »:  « Inspiration divine » s’invite à Utrecht
Une exposition d’icônes provenant des plus célèbres musées russes s’est ouverte dans la ville néerlandaise d’Utrecht, et ce dans le cadre de l’année « Russie - Pays-Bas ». L’exposition continuera jusqu’au 4 août

Le musée Catharijneconvent d’Utrecht, à 40 km d’Amsterdam, accueille une exposition intitulée « Inspiration divine » en collaboration avec le musée Andreï Roublev à Moscou. Le musée Roublev, du nom du plus célèbre peintre d’icônes russe, abrite l’une des plus grandes collections de tableaux dédiés à l’orthodoxie russe au monde. L’exposition a pour objectif de montrer les différences entre les traditions artistiques religieuses de l’Occident et celles de l’Est. Les 30 icônes russes du musée Roublev sont ainsi accompagnées d’œuvres provenant du Catharijneconvent et de collections privées. Les œuvres datent de périodes différentes allant du 15ème siècle au début du 20ème.

Les icônes orthodoxes sont peintes selon des règles très strictes. Elles ne sont pas considérées comme des objets d’art, mais plutôt comme une partie intégrante du culte des chrétiens d’Orient. Elles ne peuvent être conçues qu’à partir de matériaux naturels comme le bois ou la peinture à base d’œufs, ainsi que de feuilles d’or et de colorants extraits de pierres semi-précieuses. Dans ce domaine, les artistes sont rarement connus, Andreï Roublev n’étant qu’une exception à la règle.

Les icônes peuvent représenter différentes images, dont certaines reviennent assez souvent. C’est le cas de l’icône du Christ « non faite des mains de l’Homme ». Cette dernière, qui montre le visage de Jésus sur un morceau de tissu, représente soit les traits du Christ ayant été imprimés miraculeusement sur un linge offert par sainte Véronique lorsqu’il portrait sa croix au Golgotha, soit le Mandylion, pièce de tissu avec l’image du visage du Christ qu’il a offert au roi Abgar d’Édesse afin de le guérir de sa maladie. Une icône de ce type est exposée au musée Catharijneconvent.

« Une des icônes les plus intéressantes du musée Andreï Roublev et qui sera visible à Utrecht est le Mandylion peint au 17ème siècle », indique Boris Eremine, restaurateur au musée Andreï Roublev. « Elle a été dessinée par un artiste inconnu de la petite ville de Veliki Oustioug, à 900 km au Nord de Moscou. Même si cette icône a été créée selon les principes les plus stricts, elle n’en reste pas moins originale, touchante et captivante, tout en illustrant la façon de peindre dans le Nord de la Russie ».

D’autres icônes de l’exposition démontrent l’influence des tendances artistiques occidentales. En 1547, Moscou a été réduit en cendres par un incendie et le tsar Ivan IV (dit le « Terrible ») a fait appel à des architectes étrangers pour reconstruire la ville. Ils sont venus avec leurs nouvelles techniques et leurs conceptions de la beauté. C’est à ce moment que les artistes russes ont commencé à jouer avec la lumière et l’ombre, la perspective, ainsi que les différentes manières de peindre le corps humain.

« Certaines icônes ont une architecture raffinée et des paysages en arrière-plan clairement inspirés des gravures néerlandaises et flamandes », explique Désirée Krikhaar, conservateur de l’exposition. « Même la réalité en forme de cercle à la place d’un horizon plat venait d’exemples occidentaux. Le choix représentatif montre le développement de la peinture d’icônes et les influences des pays de l’Ouest en Russie ».

D’après les chiffres du musée et les témoignages, l’exposition connaît un grand succès auprès des visiteurs. « Nous étions présents pour la cérémonie d’ouverture et nous revenons une deuxième fois », indiquent Carolina et Eric, qui vivent à Utrecht. SUITE ICI+ PHOTOS

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 23 Mai 2013 à 13:23 | 0 commentaire | Permalien

Higoumène Georges Leroy: comment concilier Orthodoxie et francophonie
V.GOLOVANOW
Chroniques d'Abitibi 5

Dans Chroniques d'Abitibi 2 le père Georges racontait son cheminement vers l'Orthodoxie puis il a raconté son passage à Saint Serge et la découverte de l'Eglise de l'émigration des années 1980 dans les Chroniques d'Abitibi 4. Dans le passage suivant il montre particulièrement les difficultés d'adaptation dans l'Orthodoxie en Occident à la fin du siècle dernier pour qui "n'était pas d'origine orthodoxe" (sic), témoignage particulièrement intéressant puisqu'il confirme et explique les positions de nombre de nos intervenants…

Comme précédemment, je laisse la plume au père Georges en ajoutant titres et sous-titres.

Hièromoine cycliste

Il faut dire que je n'étais pas précisément le «hiéromoine parfait», tel qu’on peut se l'imaginer. Car j’avais un vélo, rangé dans un recoin de l'Institut. L'institut Saint-Serge était un endroit relativement abrité de la rumeur de la très grande ville : le quadrilatère, plantée d'arbres et assez verdoyant, donne sur les arrières de grands immeubles haussmanniens. Une fois franchie la grille donnant sur l'extérieur, il suffit de remonter la rue de Crimée, pour arriver dans le magnifique parc des Buttes-Chaumont, qui est véritablement un lieu théologique : les grands noms de la pensée russe en ont foulé les allées sablées, et le petit temple pseudo-antique qui couronne l'escarpement rocheux qui se dresse au milieu du parc, abrita les réflexions métaphysiques de nombre de théologiens. Malgré ces indiscutables qualités, l'environnement reste celui d'une mégalopole.

Higoumène Georges Leroy: comment concilier Orthodoxie et francophonie
. Et cela finit par être usant. Paris est une ville magnifique lorsqu'on la visite, mais pour y habiter, c'est une autre question. Le métro est comme le téléphone : c'est une invention pratique et désagréable. La millième fois que vous prenez le métro parisien, on finit par en avoir vraiment assez de son air mille fois respiré, des gens hagards qui y titubent, du danger latent de ses couloirs déserts, du désespoir et de la détresse que vous sentez, parmi tout le troupeau des gens qui s'y précipitent.

Lorsque le temps le permettait, le vélo était ma planche de salut : je pouvais respirer à l'air libre, en dehors de ces souterrains ! C'est ainsi que l'on me voyait circuler dans les rues de Paris, avec mon « orthodoxie pliable » ficelée sur le porte-bagages. Pour aller jusqu'à Asnières, je passais devant le Moulin-Rouge, Pigalle, et autres endroits pittoresques. Cela m'a permis de bien connaître la Ville de Paris, passant par les petites rues pour éviter les grands boulevards, dangereux pour les deux-roues. Et lorsque je revenais à l'Institut à des heures indues, après les Vigiles, je crois que ce moyen de transport m'a permis d'échapper à un certain nombre d'agressions : le passage furtif et silencieux d'un vélo n’est guère remarqué par un groupe de loubards à la recherche d'une victime. Je suis même allé depuis Paris jusqu’à Bussy-en-Othe (au Nord de la Bourgogne) en vélo, en passant une nuit à la belle étoile. Une fois arrivé au Monastère, je me suis fait «accueillir comme un chien au milieu d'un jeu de quilles» par Mère Théodosie, à l'époque Supérieure de la communauté, qui estimait que cela était tout-à-fait incompatible avec la respectabilité souhaitée de la part d'un auguste membre du clergé orthodoxe… Sans doute avait-elle raison.

Pendant l'été, je mettais mon vélo sur le train, et j’allais visiter, par monts et par vaux, une région de France, afin d'en voir les églises romanes. Je garde d'excellents souvenirs de ces randonnées : j'ai contemplé des paysages beaux comme des tableaux, j'ai respiré le grand air, décrassant mes poumons de toute la pollution parisienne ; cela me faisait faire un bon exercice physique, indispensable après cette existence trop sédentaire et studieuse pendant l'année, et - pourquoi ne pas le dire - je replongeais avec délices dans ma culture latine et occidentale.

Douce France

Les églises romanes témoignent de la chrétienté indivise, en cette terre de France. Par ailleurs, en dehors des considérations purement théologiques, lorsqu’on touche de ses doigts un mur du XIIe siècle, on y reconnaît la main du tailleur de pierre, et celle du maçon qui y a travaillé. Ce n'est pas encore la production plus standardisée de l'époque gothique. À l'époque romane, c'est le symbole qui dirige la forme. Au XIIIe siècle, à l'époque gothique, se produit la recherche de l'exploit technologique, en cherchant à couvrir le maximum de surface à la plus grande hauteur, avec le moins de matériaux possibles. C'est très moderne, mais cela s'éloigne totalement de la vision du cosmos ainsi que des relations entre Dieu et l'être humain, qui forment le tissu de la chrétienté du premier millénaire.


Higoumène Georges Leroy: comment concilier Orthodoxie et francophonie
J'ai découvert de très belles régions : en la montagneuse Auvergne, tout était à 45° : cela demandait pas mal d'efforts pour le cycliste. Mais ces efforts étaient largement récompensés par d'admirables paysages. Au début, je n'avais même pas de tente, jusqu'au moment où je me suis fait copieusement tremper par un orage nocturne… Les années suivantes, le soir je dépliais une tente microscopique, ce qui m'évitait d'être couvert de rosée le lendemain matin. J'étais devenu un expert pour remplacer les rayons des roues de vélo, dont l'un ou l'autre finissait par se briser. À un moment donné, ma vieille bécane devenait vraiment chancelante. Je l'avais fixée à une grille, à Paris, avec une grosse chaîne. Quelqu'un m'a rendu le grand service de sectionner la chaîne et de me le voler. C'est ainsi que j'ai pu ultérieurement franchir les méandres du Lot et découvrir encore d'autres régions, à bord d'un bon vélo nettement plus performant. J'étais cuit par le soleil, et personne ne pouvait savoir où j’étais. C'était la seule façon de ne pas être constamment poursuivi pour des remplacements dans des paroisses agonisantes.

«Bouche-trou »

Finalement, après cinq ans, j'ai obtenu mon diplôme de maîtrise en théologie, après avoir soutenu un mémoire sur « la question du péché originel dans la théologie de la rédemption ». Ce qui était difficile dans ces études à l'Institut Saint-Serge, c'est qu'il n'y avait pas de perspectives : Mgr Georges Wagner m'a dit, de vive voix : «vous n'êtes pas russe ; je ne sais pas ce que je vais pouvoir faire de vous». Il n'était évidemment absolument pas question de me charger d'une paroisse, car je n'avais pas les bons gènes… En fait, il désirait continuer de m'avoir sous la main pour exercer le rôle éternel de « bouche-trou » dans les diverses paroisses en difficulté. Lors de ma cinquième année d'études, j'ai réellement ressenti les effets que pouvait donner dans l'organisme à la fois la pollution, le stress et un mauvais équilibre de vie, au sein d’une l'énorme ville comme Paris.

Je comprends vraiment pourquoi le Patriarcat de Moscou a désiré installer son Séminaire à l'extérieur de l'agglomération parisienne. L'influence d'une mégapole est foncièrement négative et inhumaine. L'être humain n'est pas fait pour vivre au milieu de ces gigantesques accumulations de béton et de maçonnerie, et surtout parmi les tensions et les énergies négatives générées par l'ensemble de ces esprits humains, constamment brutalisés par leur environnement. À un moment donné, j’ai eu un accroc de santé, et je me suis retrouvé dans un hôpital. J'ai été soigné « à charge de la Ville de Paris », car je n'avais aucune ressource. Après une intervention chirurgicale, je me suis retrouvé sur le trottoir, en assez mauvais état, me tenant péniblement debout, alors que j'avais mission de célébrer dans une église russe, le dimanche suivant. Tout cela m'a fait réfléchir : certainement, j'allais laisser ma santé, à ce rythme.



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Comment devenir Orthodoxe quand on est Québécois

Catholique ou Protestant? Dans l'Institut, je conversais de temps en temps avec Mario Rousseau, qui était un Canadien venant passer une année d'études théologiques. Nous ne participions pas aux mêmes cours, à quelques exceptions près. Le parcours de cet étudiant canadien était « hors normes » : il était né dans un petit village au Nord du Québec, où la probabilité d'avoir un contact avec l'Église orthodoxe était pratiquement nulle. Son grand-père était bedeau dans l'église paroissiale (ensuite sa tante, puis sa cousine…), et lui-même y travaillait régulièrement. À un moment donné, le curé de cette église eut l'imprudence de dire, dans son sermon, que « les protestants avaient enlevé de la Bible tout ce qui concerne le Pape et la Sainte Vierge ». Mario eut des doutes, et demanda à des Évangélistes protestants de lui fournir une Bible « Louis Segond ». Par ailleurs, il acquit une Bible de « Jérusalem », acceptée par les Catholiques romains. Pendant tout un hiver, il éplucha les vingt-sept livres du Nouveau Testament, mot par mot. À l’issue de cette minutieuse analyse, il en vint à cette conclusion : «nulle part, on ne parle du Pape dans le Nouveau Testament, et très peu de la Mère de Dieu». Le curé avait donc menti ou, plus probablement, il n’avait jamais lu ces textes… Le doute s’instilla dans son esprit. Il se mit à s’intéresser aux autres Confessions chrétiennes. Rapidement, il constata le fait que, dans les diverses dénominations protestantes, des éléments fondamentaux du christianisme originel avaient été abandonnés : dans l'Église des premiers temps, existaient des presbytres et des épiscopes, alors que l'idée même du sacerdoce avait été évacuée du protestantisme calviniste. Les chrétiens des premiers temps se réunissaient le dimanche matin pour l'Eucharistie, dans la conviction de communier au Corps et au Sang du Christ ressuscité, alors que la Cène est réduite à un rite de fraternité, dans les communautés protestantes.

Anglican? À part le protestantisme, il était possible d'envisager l'anglicanisme. L'Église anglicane reconnaît à la fois l'épiscopat et le sacerdoce, et célèbre l'Eucharistie. Mais c'est « l'Église des Anglais ! » Au Québec, le contentieux historique existant entre les Québécois francophones et les Anglais - ressentis comme des occupants - ce contentieux pèse lourd… Dans la ville de Québec, qui est entièrement francophone, on ne parle qu'Anglais dans la cathédrale anglicane. Partout au Québec, de nombreuse églises anglicanes sont fermées, car les fidèles préfèrent désaffecter leur église, plutôt que d'y laisser dire un seul mot de français. C'est un comportement qui est presque orthodoxe… Ainsi donc, le poids de l'Histoire ne permettait pas d'envisager l'adhésion à l'anglicanisme.

Reste l'Église orthodoxe. Rappelons-nous qu'à cette époque, l'Internet n'existait pas encore ; se procurer un livre sur l'Orthodoxie était relativement difficile. Mario rassembla de la documentation. Lorsqu'il était à Montréal, il tenta de s'informer sur l'heure des Offices, à l'église orthodoxe russe Sts-Pierre-et-Paul. L’horaire était affiché uniquement en Russe. Après avoir sonné à la porte du presbytère, il se trouva face au prêtre qui le considéra avec suspicion ; il ne parlait que Russe et Anglais. Ce dernier lui dit que l'église catholique était un peu plus loin… Avec persévérance, Mario franchit le seuil de cette église, où chacun le considérait comme un meuble transparent, et où, pendant un an, nul ne lui dit jamais bonjour. Le premier voyage que Mario fit en-dehors du Québec, le fut à destination du Mont-Athos.

À cette époque, il n'était pas encore devenu orthodoxe. Il parvint à son but, malgré une grève de la compagnie d'aviation française - grève qui, comme chacun le sait, est en France un sport national. Une fois revenu au Québec, Mario continua ses recherches sur la Foi orthodoxe. Mario écrivit à Mgr Sylvestre, qui résidait en l'église Sts Pierre-et-Paul, à Montréal. Dans sa lettre, Mario demandait s'il existait des églises ou un monastère orthodoxe au Québec ? Mgr Sylvestre transmit la lettre de Mario à un prêtre orthodoxe d'origine arménienne, le Père Grégoire Papazian. Celui-ci lui répondit par ces mots : « Cela fait déjà deux fois que vous importunez Mgr Sylvestre. Avec le nom que vous avez, je doute fort que vous soyez d'origine orthodoxe». Mario répondit derechef : «Avec le nom que vous avez, vous n'êtes sûrement pas, vous non plus, de naissance orthodoxe. Mais avec une telle attitude, il ne faut pas s'étonner qu'il n'existe pas de convertis ». Après ce premier contact, Mario rendit visite au Père Grégoire Papazian, en son ermitage. Là, il rencontra le Père Stéphane Bigham, un prêtre américain qui venait au Québec pour fonder une paroisse francophone. Quelques années plus tard, le Père Stéphane reçut Mario dans l’Orthodoxie.

Mario collabora ensuite à la fondation de la paroisse orthodoxe francophone Saint-Benoît, à Montréal. À un moment donné, il désira approfondir ses connaissances théologiques, et voulut faire un an d'études à l'Institut Saint-Serge, à Paris, ce qui explique le fait que j’ai pu l’y rencontrer. Mario résista vaillamment à toute tentative de russification, et fut le cauchemar de la professeure de Russe… Québécois, il entra à l'Institut Saint-Serge ; québécois, il en ressortit. La professeure de Russe lui disait : «dans une perspective missionnaire, M. Rousseau, veuillez bien prononcer le Slavon !» Au chœur, Mario chantait : « bogorochtchouiou mouchchouia tzarstvouchouïou… » et cela passait très bien.

L'appel de la Providence: Un jour, Mario me donna une information qui n'est pas tombée dans l'oreille d'un sourd : le Père Grégoire Papazian avait construit un ermitage juste à côté du cimetière orthodoxe russe de Rawdon, à une soixantaine de kilomètres au nord de Montréal. Le Père Grégoire avait par la suite quitté son ermitage pour s'établir en un autre lieu, laissant inoccupées l'église, ainsi que la petite maison attenante. Je vis en cette annonce une œuvre de la Providence : Mgr Georges Wagner m’opposait une fin de non-recevoir, et me laissait clairement savoir qu'il n'y avait aucune place pour moi dans l'archevêché de la « Rue Daru ». L'existence de cet ermitage désaffecté, de l'autre côté de l'Atlantique, était certainement un signe du Seigneur à mon égard. De son côté, le Père Stéphane Bigham s'activait, pour obtenir les autorisations nécessaires. C'est ainsi qu'un jour, avec armes et bagages, je partis pour commencer une nouvelle vie, en terre canadienne. Dans ma poche, était glissée la lettre dimissoriale qui me permettait de passer sous l'égide de l'Église orthodoxe en Amérique (O.C.A.). Cette lettre avait été signée avec enthousiasme par Mgr Georges Wagner, très heureux de se débarrasser d'un francophone.

Le surgissement de l'Orthodoxie dans l'existence de Mario Rousseau est un fait beaucoup plus remarquable que ma propre découverte de la Foi orthodoxe. Il a vécu son enfance dans un milieu où rien ne permettait de découvrir l'existence de l'Église orthodoxe. Certes, il voyait parfois passer, en la ville de Val-d'Or, la silhouette furtive, en soutane noire, du père David Shevchenko,. Celui-ci prenait l'autobus pour se rendre en l'une des églises russes qu'il desservait dans la région, ou en Ontario. Mais ce prêtre ne parlait à personne, tout simplement parce qu'il ne s'exprimait qu’en Russe. De toute manière, son action pastorale était absolument limitée à la petite colonie de l'émigration russe. - De toute évidence, la venue de Mario Rousseau dans l'Église orthodoxe est une œuvre directe de l'Esprit-Saint. Aucune raison culturelle ni sociologique n’a pu motiver, ni ne peut expliquer cette démarche. - En ce qui me concerne, je découvrirai plus tard qu'il faut être prudent, lorsqu'on affirme que tel événement de la vie est un signe de la Providence…





Higoumène Georges Leroy: comment concilier Orthodoxie et francophonie

Rédigé par Vladimir GOLOVANOW le 23 Mai 2013 à 12:05 | 3 commentaires | Permalien

A propos de la situation au sein de l'Archevêché: "Ne pas répudier le patrimoine"
Moscou (Mensuel KIFA , avril 2013)

Le 15 janvier 2013 Mgr Gabriel (de Vylder), archevêque de Comane, qui a pendant 10 ans été à la tête de l’ Archevêché des Églises Orthodoxes Russes en Europe Occidentale a dû quitter sa chaire pour de graves raisons de santé. Le Métropolite Emmanuel, de France, Président de l’Assemblée des Evêques Orthodoxes de France a été nommé locum tenens de l’Archevêché. Conformément aux statuts il doit faire procéder aux élections d’un nouvel archevêque dans un délai de quatre mois, c’est-à-dire avant le début de mai. C’est l’Assemblée de l’archevêché constituée de représentants du clergé et des laïcs qui procède statutairement à cette élection. Cependant, et c’est pour la première fois depuis que cette entité existe, que la liste des candidats établie le 13 février par le Conseil de l’archevêché n’a pas a été approuvée. Dans une lettre datée du 4 mars le patriarche Bartholomé a proposé au locum tenens d’assumer ses responsabilités à titre provisoire en tant qu’exarque du patriarche. Par conséquent l’Assemblée générale qui devait se tenir les 29 et 30 mars pour procéder à l’élection a été remplacée par une Assemblée extraordinaire sans pouvoir décisionnel. La rédaction de KIFA a sollicité à ce sujet les commentaires de M. D.Struve en russe et du père Georges Kotchetkov

A propos de la situation au sein de l'Archevêché: "Ne pas répudier le patrimoine"
KIFA : - L’archevêché est menacé de disparition. N’y a-t-il pas eu des erreurs commises peut-être dans le passé qui ont conduit à une cette situation ?

Le père Georges : - Cette situation est l’aboutissement d’une longue période, d’un chapitre important qui est sur le point de se fermer. Une étape nouvelle a commencé dans la vie de l’Eglise russe et de tout ce qui lui est lié.La tradition dite « Eulogienne » et l’exarchat russe en Europe occidentale ont une très grande importance pour toute l’Orthodoxie, pour l’Eglise russe et pour la Russie. Tout ceci ne saurait être ignoré ou sous-estimé. La juridiction « Eulogienne » a réuni les meilleurs esprits, nombre de grands hommes, a donné des saints à la diaspora russe. Ces personnalités attirent jusqu’à présent ceux, partout dans le monde, qui veulent aller de l’avant sans revenir sur le passé.

Jamais cette entité n’a été d’apparence forte ou grande, elle a toujours vécu au bord de la misère mais a maintenu sa liberté. L’archevêché a toujours été lié avec la Russie, avec son histoire. Son souhait était de retourner dans le pays et de acquitter de ses dettes à l'égard de la Patrie. Comment ne pas admirer ceux dans l’émigration russe qui ont quitté leur pays malgré eux et qui s’estimaient toujours être les débiteurs de la Russie, de l’Eglise russe et de son peuple. Ils savaient que le cataclysme qui avait frappé la Russie et qui avait détruit ce grand pays, sa grande culture et son grand peuple ne pouvait s’éterniser et devait tôt ou tard disparaître. On espérait d’abord que ce serait bientôt et l’on y travaillait d’arrache-pied et dans l’abnégation. C’était un véritable élan créateur. Mais certains de ces émigrés étaient porteurs des défauts, voire des péchés, de l’ancienne société russe. Souvent ils étaient divisés, ils n’aspiraient pas à l’unité, ne percevaient pas leur vocation à tous et à chacun. Souvent ils ne voulaient pas et ne pouvaient pas se comprendre les uns les autres ; il leur arrivait d’idéaliser à la fois l’ancienne et la nouvelle Russie. Ils voulaient voir la Russie dans toute sa beauté ce qui les conduisait à préconiser la vocation messianique mondiale du peuple russe. C’était, certes, une grave erreur. Parfois le mal auquel ils ne pouvaient efficacement résister à cause de l’absence d’unité parmi eux pénétrait dans leur propre milieu. Je ne pense pas en l’occurrence aux divisions au sein de l’Eglise, c’est un sujet à part.

Et voilà que cette grande histoire touche à sa fin.
Il nous faut établir le bilan du XX siècle. Malheureusement cette tâche n’est toujours pas accomplie en Russie où il fallait tout d’abord accepter la portée spirituelle de l’exploit des Nouveaux martyrs et confesseurs et s’imprégner de leur expérience. Elle ne l’est pas non plus hors de la Russie où il fallait adopter la même démarche à l’ égard des grands ancêtres de l’émigration. Il y là inaboutissement et approche erronée. La Russie reste l’otage d’une idéologie omniprésente, otage de ses préjugés et de ses contradictions. Nous ne nous sommes pas libéré de la confusion que les décennies communistes ont semées dans les âmes. Décennies de crimes terribles et d’admirables exploits de sainteté. Les Russes de la diaspora n’ont pas eu la sagesse indispensable pour comprendre qu’en préservant sa liberté et son patrimoine spirituel il fallait faire plus pour sauvegarder la langue du pays et se sentir encore plus responsable à l’égard de la Russie et de sa culture. Le seul qui pendant de longues années a été d’une manière quasi surnaturelle et admirable à la hauteur de cette mission est Nikita Alexeevitch Struve. Mais personne, je le crains, n’est conscient de nos jours de ce que l’archevêché se trouve aujourd’hui au bord du dépérissement, voire de la disparition.

Quelles sont donc les erreurs commises ?
Je crois que les mauvais choix ont été faits à la fin des années 80 et au début des années 90 du siècle dernier. C’est alors que l’archevêché n’a plus voulu se considérer russe et à s’est même senti gêné de sa russité. A la suite de plusieurs générations d’immersion dans la société occidentale l’archevêché a souhaité une vie confortable et sans ennuis dans ce bas monde, il ne s’est que trop bien adapté à des conditions de vie qui ne laissent rien désirer. Ses paroissiens ont oublié la langue et ne sont plus conscients de ce qui a été accompli par leurs ancêtres, ces grands prédécesseurs au sein de l’archevêché. Cette entité n’a pas pris conscience de la nécessité de changer en profondeur pour que l’admirable expérience de cette église régie par les dispositions du grand Concile de Moscou 1917-1918 puisse être transmise à la Russie ainsi qu’au plérome de l’orthodoxie. Cette expérience est unique, seule l’Eglise autocéphale d’Amérique (OCA), branche de l’Eglise orthodoxe russe la connaît. La vocation de l’archevêché consistait à témoigner des résultats du Concile afin de les préserver de l’influence des forces marginales et rétrogrades en Russie et dans le monde, Grèce y compris. Il était indispensable de diffuser l’expérience du père Serge Boulgakov, de Nicolas Berdiaev, de ne pas les abjurer, de ne pas se laisser prendre aux provocations de ceux qui les faisaient passer presque comme des hérétiques s’étant écarté de l’orthodoxie.

Pendant toutes ces décennies l’Archevêché a su garder son identité russe car il était conscient de sa personnalité particulière, de sa spécificité au sein de l’orthodoxie universelle. Mais dès que l’on s’est mis à se dire que l’Аrchevêché était la semence de l’orthodoxie locale en France ainsi qu’en Europe occidentale, que c’était l’avenir de tous et de tout il ne fallait pas ce faisant oublier ses propres limites, ses racines, sa responsabilité et son destin qui n’était en rien universel mais tout à fait concret et tangible. Destin d’une voie étroite, celle du service de la Russie et de l’Eglise russe. Comment ne pas être conscient que seule cette voie, celle du patrimoine et de la russité qu’il était envisageable, fût-ce vêtu à l’européenne, de rester fidèle à sa vocation et de mieux servir le plérôme orthodoxe, Grèce, Europe occidentale, Amérique, etc. Comment ignorer, ne fût-ce que pour un instant, cette manifeste volonté Divine, son devoir à l’égard de la Russie et de son Église, ce legs des ancêtres, de tous ceux qui ont été actifs au sein de l’émigration russe. Les aïeux de ceux qui, grâce à eux, appartiennent à l’orthodoxie, ont hérité d’une expérience unique, d’une vision particulière du monde et de l’homme, de l’Eucharistie, de la vie, de l’amour, de la liberté, de la création et de la personnalité. Si tout cela est d’ores et déjà perdu, comment s’étonner qu’il y ait tant de mécontents : au sein de l’archevêché, à Constantinople ainsi qu’à Moscou ?

Je ne peux que regretter le cours des évènements.
J’ai été le témoin de cette évolution. Au début des années 90 j’ai essayé, maladroitement peut-être et sans finesse, d’expliquer lorsque me trouvant en France qu’il est indispensable, et cela en toute urgence, de dire les offices en russe, de catéchiser les adultes, de contribuer à la création de communautés et de fraternités sans, en aucun cas, renoncer à ses racines russes et à la langue russe. Tout cela en continuant à vivre le plus pleinement possible en Occident, au sein de ses familles, dans un autre environnement linguistique, parmi des gens dont les origines n’ont absolument rien de russe. Je n’ai été ni entendu, ni compris. On ne faisait que me répondre : « nous avons tout l’indispensable et nous n’avons besoin de rien ». Ce qui signifiait : c’est en Russie que tout va mal, nous,au contraire, nous n’avons pas de problèmes.

Bien plus tard, déjà après le décès de l’archevêque Serge (Konovaloff) lorsque Mgr Gabriel (de Vylder) qui jouissait de toute mon estime s’est un peu brutalement orienté exclusivement sur Constantinople et, en même temps, sur tout ce qui n’était pas russe (surtout pas russe à relent soviétique)je disais qu’il ne faut pas s’en laisser conter, d’où que viennent les provocations. Il fallait préserver et faire croître son talent. Son talent propre, et non des qualités abstraites quelles qu’elles soient car cela est pratiquement impossible. Là aussi je n’ai pas été entendu ! D’une manière un peu provinciale tout ce qui était russe était considéré comme soviétique… Cela à tous les niveaux, gens d’église et laïcs. Quelle amertume, quelle tristesse que de voir cela, surtout pendant ces dernières années. Mais il était inconcevable d’adopter cette vision.
Il est aujourd’hui impossible de faire marche arrière et j’en suis parfaitement conscient. L’archevêché n’en aurait d’ailleurs pas l’énergie. Il y a en son sein des personnalités admirables mais des changements radicaux me paraissent inconcevables. Quelle pitié! Je déplore non seulement la dissolution du patrimoine russe, l’échec que subissent l’Eglise et le peuple russe. Voilà une œuvre divine vouée à la stérilité. Mais Dieu est miséricordieux et je continue à garder espoir. D’une manière ou d’une autre le Seigneur fera de sorte à ce que son Eglise, à ce que l’Eglise russe, à ce que notre pays trouvent une issue à cette impasse. Nous viendrons à une véritable renaissance ecclésiale, indispensable pour nous tous, que ce soit en Russie ou en Occident, à Paris, à Bruxelles, en Amérique ou où que ce soit ailleurs.

KIFA, N°5 (159), avril 2013
Traduction P.O.


A propos de la situation au sein de l'Archevêché: "Ne pas répudier le patrimoine"

Rédigé par Parlons D'orthodoxie le 23 Mai 2013 à 11:18 | 120 commentaires | Permalien

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