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p.Vladimir Zielinsky
LA DEMEURE DE DIEU (3)
Viachteslav Ivanov (1866 -1949), poète et penseur russe ( l'auteur du mot du lequel est sortie l’image des "deux poumons" , devenue célèbre grâce à Jean Paul II), dans un message adressé au germaniste italien Alessandro Pellegrini, a proposé une formule stupéfiante qui porte en soi une véritable clé de l'unité chrétienne: "L'anamnèse universelle en Christ - voilà le but de la culture humaniste chrétienne et la prémisse de l'Apocatastase universelle…"
"Anamnèse" : ce n'est pas par hasard que le terme liturgique grec surgit à l'improviste dans une réflexion sur l'origine de la culture. Il ne s'agit ni d’une mer de livres, ni d’une montagne d’œuvres d'art, mais de la circulation des idées fécondées par la Parole. "N'importe quelle grande culture, écrit Ivanov, en tant qu'émanation de la mémoire, représente un aspect particulier de la révélation du Verbe dans l'histoire". La célébration eucharistique aussi, en tant qu'image visible de la Révélation, se nourrit de la mémoire et l'anamnèse, avant de devenir la formule sacerdotale existe déjà dans l’assemblée priante.
LA DEMEURE DE DIEU (3)
Viachteslav Ivanov (1866 -1949), poète et penseur russe ( l'auteur du mot du lequel est sortie l’image des "deux poumons" , devenue célèbre grâce à Jean Paul II), dans un message adressé au germaniste italien Alessandro Pellegrini, a proposé une formule stupéfiante qui porte en soi une véritable clé de l'unité chrétienne: "L'anamnèse universelle en Christ - voilà le but de la culture humaniste chrétienne et la prémisse de l'Apocatastase universelle…"
"Anamnèse" : ce n'est pas par hasard que le terme liturgique grec surgit à l'improviste dans une réflexion sur l'origine de la culture. Il ne s'agit ni d’une mer de livres, ni d’une montagne d’œuvres d'art, mais de la circulation des idées fécondées par la Parole. "N'importe quelle grande culture, écrit Ivanov, en tant qu'émanation de la mémoire, représente un aspect particulier de la révélation du Verbe dans l'histoire". La célébration eucharistique aussi, en tant qu'image visible de la Révélation, se nourrit de la mémoire et l'anamnèse, avant de devenir la formule sacerdotale existe déjà dans l’assemblée priante.
Nous « faisons » la communion avec le pain et le vin consacrés, mais aussi sous "les espèces" du mémorial du Christ historique, corporel, vivant. Voyons de plus près: la liturgie est la mémoire célébrée, la Bible est la mémoire commune de Dieu avec son peuple, la Tradition est la mémoire des actes des saints.
Mais il y a aussi une preuve a contrario : quand Satan vient, "il enlève la Parole" (Mc 4,15) semée en nous, il « vole » la mémoire. Parfois en plein midi. Un homme peut contrôler ses actions, mais leur sens et leurs conséquences lui échappent complètement. Il m'est arrivé de lire la confession d'un assassin intelligent (procureur de son métier), capable d’une analyse détaillée de ses gestes. Au moment du crime, confesse-t-il, sa mémoire était paralysée, son passé (position sociale) aussi bien que son futur imminent (châtiment) avaient cessé d’exister. Il agissait en esclave de la logique intérieure du meurtre, dans le cadre de sa "nécessité", décretée d'avance, comme imposée du dehors. Tout le temps du délit, semble-t-il, s’est réduit à cet instant de délire méticuleusement rationnel
Ne s'agit-il pas de la photo instantanée d'une obsession?
De son côté, la littérature ascétique insiste sur le fait que les vertus les plus hautes auxquelles l'âme chrétienne doit aspirer, sont la sobriété et le matrîse de soi. On sait que la prière peut dévoiler les souvenirs les plus profondément enfouis au fond de notre âme alors que, dans le même temps, l’hymne des Chérubins, au seuil de l’Eucharistie dans la liturgie orthodoxe, invite à « déposer tout souci du monde ». La prière ouvre une couche scellée de la mémoire que nous portons en nous sans l'apercevoir.
L'école de l'ascèse commence par le travail de "mise à nu" de notre existence, de notre "moi" authentique. La prière creuse la profondeur de la mémoire et ouvre ce nuage venimeux des péchés refoulés, mais couvés quelque part. A ce moment de vérité nous devons reconnaître que c’est bien là notre vrai "moi" et qu’il ne vaut rien, en effet! Mais l'arrêt que nous prononçons sur nous-mêmes fait le miracle: Dieu nous acquitte! Le péché une fois extrait de sa cachette, jeté aux pieds du Seigneur, devient transparent comme un verre traversé par un rayon de lumière. Et ce rayon provient de quelque source ensevelie dans la mémoire. Car en fait notre "moi" aux racines divines est "caché avec le Christ en Dieu", (cf. Col 3,3). Nous ne le découvrons que sur le chemin des "réminiscences".
St Augustin dans ses "Confessions" s'arrête, émerveillé, devant l'imperceptibilité du temps.
"Ce moment-là est déjà passé, un autre n'est pas venu encore, où est le temps, donc, qui m'appartient?" Oui, le temps ne m'appartient pas, je ne peux en saisir la "matière" : c'est la mémoire qui est mienne, en fait. Son espace n'a pas de frontières, là je peux faire tout ce que je veux. On le sait: le pouvoir corrompt, et le pouvoir absolu corrompt absolument. Le pouvoir sur sa propre âme comporte un danger contre lequel les Pères de l’Église nous mettent en garde: tu n'abuseras pas de cette puissance. Pécher en esprit est beaucoup plus facile que pécher en acte, dit St Maxime le Confesseur, et le combat contre ce péché en pensée est de beaucoup plus ardu aussi. On oublie toujours ce précepte ancien. Personne ne veut renoncer au pouvoir illimité qui lui appartient, ni même le partager. Mais les hommes de Dieu étaient capables de remettre cette domination sur leur propre mémoire à Celui qui est venu y habiter incognito. C'était "l'éducation sentimentale" des moines. Il ne s'agit pas d’abdiquer le trône pour s'éloigner ensuite dans un exil doré, mais d'un effort permanent qui engage tout notre être. Changer sa mémoire veut dire se changer soi-même. Non seulement au niveau moral, mais au sens primordial de changer la "substance" de l'homme pécheur qui accumule "intentions mauvaises, meurtres, adultères, inconduites, vols, faux témoignages, injures" (Mt 15,19) dans cette demeure où le Père vient, où le Fils habite et que couvre l’Esprit. Ce changement, je l’appellerais "l’Eucharistie de la mémoire". Car la mémoire, d'un mont-de-piété des intentions de toutes sortes, peut devenir un lieu de la visite de Dieu, Son endroit inimaginable.
Ici l'homme finit - ou recommence - car où Dieu vient y habiter. "La prémisse de l'Apocatastase universelle" prend racine dans l'anamnèse en Christ dans lequel nous pouvons nous souvenir les uns les autres et nous reconnaître. Cette reconnaissance se produit dans la mémoire de la création qui communie à la Parole, qui constitue le mystère de chaque visage, celui qui se fait dans une copie unique (Bruno Chenu). Nous pouvons découvrir ou souvenir ce visage dans son essence eucharistique. Et dans l'acte de la mémoire nous recevons les semences de la Parole qui unit toute la famille humaine. Cette fécondation par le "Logos spermaticos" dont parlent les Pères est un gage de notre Résurrection. La Parole ne meurt pas et tout ce à quoi elle s'apparente ne peut disparaître. La Cène du Seigneur est le testament de la vie dans Son Corps ressuscité, dans la pérennité de la Parole et dans la joie de la reconnaissance réciproque.
Les hommes se cherchent, mais ils ne peuvent se rencontrer "en esprit et vérité" qu'en un Dieu-Homme. Nous sommes "en chemin" vers Lui et cette voie se construit par l'anamnèse, sur le chemin où Il est. Certes, Sa demeure même est inaccessible, mais "l'orientation" permanente vers Lui constitue la vie liturgique de notre foi. Nous la vivons aussi dans mémoire qui "collabore" avec le Seigneur dans Son travail de purification. "Quand vos péchés seraient comme l'écarlate, comme neige ils blanchiront" (Is 1,18). Et la toile ainsi blanchie de la mémoire devient un antimension (morceau de linge avec une relique qui sert pour la célébration eucharistique) sur laquelle se réalise la présence réelle. "Ceci est mon Corps", devant nous, parmi nous. La théologie orientale évite toute explication de type philosophique. Elle préfère rester face à face avec le mystère nu, désarmée, ne pas savoir "comment", face à la seule révélation du verbe être. "Ceci est Mon Corps" et l’on est déjà devant le Christ. Quand on reçoit la communion (en ayant conscience de son indignité absolue, de "l'incompatibilité" de son corps, de son sang, de son âme, avec le sacrifice de Dieu) on le devient ce Corps, ici et maintenant. Telle était la foi apostolique. Demeurer dans cette foi signifie faire "ceci en mémoire de Moi" (Lc 22,19).
Notre mémoire humaine, avec toutes ses taches, ses blessures, ses espoirs devient un espace où Dieu manifeste qu'Il est avec nous.
Celui qui reste la source unique de l'être, Celui qui se trouve au-delà de l'être, y entre, prend la chair de l'Homme de Nazareth, la chair du Corps et du Sang eucharistiques, mais ensuite aussi la chair de notre mémoire, quelle qu’elle soit : pauvre, sale, indigne. Dieu entre dans cette étoffe humaine qui Lui est déjà familière. Car sous ce tissu, sous les replis innombrables de nos souvenirs, se trouve l'habitation de Sa parole, lieu impénétrable de la Lumière qui nous a illuminés. L'homme qui est capable de "travailler" sur sa mémoire, aller à sa source, peut aboutir un jour à ce Règne limpide qui est en nous.
Sinon, comment le larron sur la croix, aurait-il pu se souvenir du Règne de Dieu dont il n'avait jamais entendu parler? Tandis que son compagnon était frappé du péché de l'oubli? Le mémoire de Dieu est un don absolument gratuit, mais en même temps il doit être choisi, voulu, recherché. Il faut que nous prêtions à ce don "la chair" de la pensée. "Rendez grâce en toute circonstance, car c'est la volonté de Dieu à votre égard dans le Christ Jésus" (1 Thess 5, 18). Nous sommes appelés à rendre ce que nous avons déjà reçu, à faire un "échange des grâces", selon la volonté de Dieu. En grec "rendre grâce" signifie "faire eucharistie », en toutes les choses. L'homme est appelé à célébrer la liturgie avec toute la création et la mémoire lui sert d’autel.
Cette mémoire définit notre propre "moi" donc notre vraie, notre unique essence, cachée en Dieu, notre « carte d'identité » eucharistique. Selon la foi de l’Église, la Cène où le Christ s'est réuni avec les apôtres et nos assemblées eucharistiques d'aujourd'hui gardent la même identité dans ce mystère écclesial qui reste un et indivis. Son unité embrasse les vivants et les morts, les humains et les anges. "L’Eucharistie comme le midi éternel, dure…", écrit le poète russe Ossip Mandelstam*. Elle dure depuis la Cène jusqu'au Royaume où, si nous sommes y admis, nous boirons avec Jésus le vin nouveau. Celui de la Résurrection, de la communion en Christ, et en Lui la communion les uns avec autres.
*Ossip Mandelstam
L'un des grands poètes russes du XXe siècle (1891-1938)
Après trois ans d'exil, il est arrêté et meurt, en 1938, déporté dans un camp de transit pour la Kolyma près de Vladivostok, de faim et de froid.
Mais il y a aussi une preuve a contrario : quand Satan vient, "il enlève la Parole" (Mc 4,15) semée en nous, il « vole » la mémoire. Parfois en plein midi. Un homme peut contrôler ses actions, mais leur sens et leurs conséquences lui échappent complètement. Il m'est arrivé de lire la confession d'un assassin intelligent (procureur de son métier), capable d’une analyse détaillée de ses gestes. Au moment du crime, confesse-t-il, sa mémoire était paralysée, son passé (position sociale) aussi bien que son futur imminent (châtiment) avaient cessé d’exister. Il agissait en esclave de la logique intérieure du meurtre, dans le cadre de sa "nécessité", décretée d'avance, comme imposée du dehors. Tout le temps du délit, semble-t-il, s’est réduit à cet instant de délire méticuleusement rationnel
Ne s'agit-il pas de la photo instantanée d'une obsession?
De son côté, la littérature ascétique insiste sur le fait que les vertus les plus hautes auxquelles l'âme chrétienne doit aspirer, sont la sobriété et le matrîse de soi. On sait que la prière peut dévoiler les souvenirs les plus profondément enfouis au fond de notre âme alors que, dans le même temps, l’hymne des Chérubins, au seuil de l’Eucharistie dans la liturgie orthodoxe, invite à « déposer tout souci du monde ». La prière ouvre une couche scellée de la mémoire que nous portons en nous sans l'apercevoir.
L'école de l'ascèse commence par le travail de "mise à nu" de notre existence, de notre "moi" authentique. La prière creuse la profondeur de la mémoire et ouvre ce nuage venimeux des péchés refoulés, mais couvés quelque part. A ce moment de vérité nous devons reconnaître que c’est bien là notre vrai "moi" et qu’il ne vaut rien, en effet! Mais l'arrêt que nous prononçons sur nous-mêmes fait le miracle: Dieu nous acquitte! Le péché une fois extrait de sa cachette, jeté aux pieds du Seigneur, devient transparent comme un verre traversé par un rayon de lumière. Et ce rayon provient de quelque source ensevelie dans la mémoire. Car en fait notre "moi" aux racines divines est "caché avec le Christ en Dieu", (cf. Col 3,3). Nous ne le découvrons que sur le chemin des "réminiscences".
St Augustin dans ses "Confessions" s'arrête, émerveillé, devant l'imperceptibilité du temps.
"Ce moment-là est déjà passé, un autre n'est pas venu encore, où est le temps, donc, qui m'appartient?" Oui, le temps ne m'appartient pas, je ne peux en saisir la "matière" : c'est la mémoire qui est mienne, en fait. Son espace n'a pas de frontières, là je peux faire tout ce que je veux. On le sait: le pouvoir corrompt, et le pouvoir absolu corrompt absolument. Le pouvoir sur sa propre âme comporte un danger contre lequel les Pères de l’Église nous mettent en garde: tu n'abuseras pas de cette puissance. Pécher en esprit est beaucoup plus facile que pécher en acte, dit St Maxime le Confesseur, et le combat contre ce péché en pensée est de beaucoup plus ardu aussi. On oublie toujours ce précepte ancien. Personne ne veut renoncer au pouvoir illimité qui lui appartient, ni même le partager. Mais les hommes de Dieu étaient capables de remettre cette domination sur leur propre mémoire à Celui qui est venu y habiter incognito. C'était "l'éducation sentimentale" des moines. Il ne s'agit pas d’abdiquer le trône pour s'éloigner ensuite dans un exil doré, mais d'un effort permanent qui engage tout notre être. Changer sa mémoire veut dire se changer soi-même. Non seulement au niveau moral, mais au sens primordial de changer la "substance" de l'homme pécheur qui accumule "intentions mauvaises, meurtres, adultères, inconduites, vols, faux témoignages, injures" (Mt 15,19) dans cette demeure où le Père vient, où le Fils habite et que couvre l’Esprit. Ce changement, je l’appellerais "l’Eucharistie de la mémoire". Car la mémoire, d'un mont-de-piété des intentions de toutes sortes, peut devenir un lieu de la visite de Dieu, Son endroit inimaginable.
Ici l'homme finit - ou recommence - car où Dieu vient y habiter. "La prémisse de l'Apocatastase universelle" prend racine dans l'anamnèse en Christ dans lequel nous pouvons nous souvenir les uns les autres et nous reconnaître. Cette reconnaissance se produit dans la mémoire de la création qui communie à la Parole, qui constitue le mystère de chaque visage, celui qui se fait dans une copie unique (Bruno Chenu). Nous pouvons découvrir ou souvenir ce visage dans son essence eucharistique. Et dans l'acte de la mémoire nous recevons les semences de la Parole qui unit toute la famille humaine. Cette fécondation par le "Logos spermaticos" dont parlent les Pères est un gage de notre Résurrection. La Parole ne meurt pas et tout ce à quoi elle s'apparente ne peut disparaître. La Cène du Seigneur est le testament de la vie dans Son Corps ressuscité, dans la pérennité de la Parole et dans la joie de la reconnaissance réciproque.
Les hommes se cherchent, mais ils ne peuvent se rencontrer "en esprit et vérité" qu'en un Dieu-Homme. Nous sommes "en chemin" vers Lui et cette voie se construit par l'anamnèse, sur le chemin où Il est. Certes, Sa demeure même est inaccessible, mais "l'orientation" permanente vers Lui constitue la vie liturgique de notre foi. Nous la vivons aussi dans mémoire qui "collabore" avec le Seigneur dans Son travail de purification. "Quand vos péchés seraient comme l'écarlate, comme neige ils blanchiront" (Is 1,18). Et la toile ainsi blanchie de la mémoire devient un antimension (morceau de linge avec une relique qui sert pour la célébration eucharistique) sur laquelle se réalise la présence réelle. "Ceci est mon Corps", devant nous, parmi nous. La théologie orientale évite toute explication de type philosophique. Elle préfère rester face à face avec le mystère nu, désarmée, ne pas savoir "comment", face à la seule révélation du verbe être. "Ceci est Mon Corps" et l’on est déjà devant le Christ. Quand on reçoit la communion (en ayant conscience de son indignité absolue, de "l'incompatibilité" de son corps, de son sang, de son âme, avec le sacrifice de Dieu) on le devient ce Corps, ici et maintenant. Telle était la foi apostolique. Demeurer dans cette foi signifie faire "ceci en mémoire de Moi" (Lc 22,19).
Notre mémoire humaine, avec toutes ses taches, ses blessures, ses espoirs devient un espace où Dieu manifeste qu'Il est avec nous.
Celui qui reste la source unique de l'être, Celui qui se trouve au-delà de l'être, y entre, prend la chair de l'Homme de Nazareth, la chair du Corps et du Sang eucharistiques, mais ensuite aussi la chair de notre mémoire, quelle qu’elle soit : pauvre, sale, indigne. Dieu entre dans cette étoffe humaine qui Lui est déjà familière. Car sous ce tissu, sous les replis innombrables de nos souvenirs, se trouve l'habitation de Sa parole, lieu impénétrable de la Lumière qui nous a illuminés. L'homme qui est capable de "travailler" sur sa mémoire, aller à sa source, peut aboutir un jour à ce Règne limpide qui est en nous.
Sinon, comment le larron sur la croix, aurait-il pu se souvenir du Règne de Dieu dont il n'avait jamais entendu parler? Tandis que son compagnon était frappé du péché de l'oubli? Le mémoire de Dieu est un don absolument gratuit, mais en même temps il doit être choisi, voulu, recherché. Il faut que nous prêtions à ce don "la chair" de la pensée. "Rendez grâce en toute circonstance, car c'est la volonté de Dieu à votre égard dans le Christ Jésus" (1 Thess 5, 18). Nous sommes appelés à rendre ce que nous avons déjà reçu, à faire un "échange des grâces", selon la volonté de Dieu. En grec "rendre grâce" signifie "faire eucharistie », en toutes les choses. L'homme est appelé à célébrer la liturgie avec toute la création et la mémoire lui sert d’autel.
Cette mémoire définit notre propre "moi" donc notre vraie, notre unique essence, cachée en Dieu, notre « carte d'identité » eucharistique. Selon la foi de l’Église, la Cène où le Christ s'est réuni avec les apôtres et nos assemblées eucharistiques d'aujourd'hui gardent la même identité dans ce mystère écclesial qui reste un et indivis. Son unité embrasse les vivants et les morts, les humains et les anges. "L’Eucharistie comme le midi éternel, dure…", écrit le poète russe Ossip Mandelstam*. Elle dure depuis la Cène jusqu'au Royaume où, si nous sommes y admis, nous boirons avec Jésus le vin nouveau. Celui de la Résurrection, de la communion en Christ, et en Lui la communion les uns avec autres.
*Ossip Mandelstam
L'un des grands poètes russes du XXe siècle (1891-1938)
Après trois ans d'exil, il est arrêté et meurt, en 1938, déporté dans un camp de transit pour la Kolyma près de Vladivostok, de faim et de froid.
Rédigé par Père Vladimir Zelinsky le 3 Mai 2011 à 07:52
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