Cet entretien, accordé par le métropolite Juvénal au journaliste moscovite G. Botcharov, a été publié en français dans le numéro 9 - mai-juin 2008 - du "Messager de l'Eglise orthodoxe russe".
Mgr Juvénal est un des plus anciens évêques de l’Église orthodoxe russe. Il est membre permanent du Saint-Synode en vertu de sa charge de métropolite de la région de Moscou qu’il occupe depuis 1977. Né en 1935 à Iaroslavl, Mgr Juvénal fut très proche du métropolite Nicodème de Leningrad. Depuis 1989, il préside la commission synodale pour la canonisation des saints. Cette année, le métropolite Juvénal a publié un livre intitulé « La vie dans l’Église » où il réfléchit sur le sort de l’orthodoxie russe au XXe siècle et au début de ce nouveau millénaire.
Monseigneur, pensez-vous que l’Église soit capable de donner les réponses à toutes les questions brûlantes que la vie pose devant l’homme ? Surtout à des moments critiques.
Mgr Juvénal est un des plus anciens évêques de l’Église orthodoxe russe. Il est membre permanent du Saint-Synode en vertu de sa charge de métropolite de la région de Moscou qu’il occupe depuis 1977. Né en 1935 à Iaroslavl, Mgr Juvénal fut très proche du métropolite Nicodème de Leningrad. Depuis 1989, il préside la commission synodale pour la canonisation des saints. Cette année, le métropolite Juvénal a publié un livre intitulé « La vie dans l’Église » où il réfléchit sur le sort de l’orthodoxie russe au XXe siècle et au début de ce nouveau millénaire.
Monseigneur, pensez-vous que l’Église soit capable de donner les réponses à toutes les questions brûlantes que la vie pose devant l’homme ? Surtout à des moments critiques.
Je dirai que l’Église n’existe que pour conduire les hommes au Royaume de Dieu. L’Église accompagne le chrétien dès sa naissance jusqu’à son dernier souffle. Du baptême jusqu’à la mort. Le lien ininterrompu – et j’insiste sur cet épithète – de l’homme avec Dieu rend la vie simple. D’une façon générale, mais surtout à des moments difficiles. Un croyant a toujours plus de facilités, dans les épreuves et le bonheur. Pour ce qui concerne les questions existentielles, nous trouvons toutes les réponses dans l’Évangile.
Quelle est la différence entre un croyant et un athée ?
C’est une différence fondamentale. En s’approchant de sa tombe, le croyant est convaincu que la vie éternelle l’attend. L’athée est persuadé que sa vie se termine définitivement dans le cercueil. A partir de là, la vision du monde sera entre eux radicalement différente.
Que pensez-vous de la place que l’Église renaissante occupe aujourd’hui dans la vie de la société ? Quels sont les problèmes les plus importants ?
Ce que notre Église faisait il y a vingt ans et ce qu’elle fait maintenant, ce sont deux choses incomparables. Il y a deux décennies, nous étions témoins d’un mépris général envers le christianisme. C’était une approche arrogante, cynique et honteuse. Les églises et les âmes étaient traitées sans aucun respect. La plus grande partie du XXe siècle restera dans l’histoire de l’Église orthodoxe russe comme une page très noire. Mais, comme disait l’apôtre Paul dans la seconde épître à Timothée, on ne peut lier la foi. Même à des moments les plus tragiques, les hommes continuaient à participer aux sacrements de l’Église qui est toujours restée la même malgré les circonstances. Elle restera toujours la même. Aujourd’hui, l’orthodoxie renaît dans notre pays et personne ne craint les persécutions. Il n’y a plus de discrimination ou d’humiliation des prêtres et des fidèles. Des changements énormes se sont opérés dans la société. On le voit dans le diocèse de Moscou. Je ne citerai que les exemples les plus éloquents : au cours de ces vingt dernières années, nous avons construit 253 églises et 162 chapelles. Sans parler des lieux de culte restaurés. Aujourd’hui, notre diocèse compte 1271 églises. En 1988, il y en avait 132. Tout cela est l’œuvre de chrétiens enthousiastes, des fidèles serviteurs de l’Église, des amoureux de notre culture et de notre spiritualité. Cependant, cette dynamique de la construction de nouvelles églises, ainsi que la fin des persécutions soulèvent chez beaucoup de personnes des questions importantes. Comment se fait-il, s’interroge-t-on, qu’après avoir rendu à l’Église la liberté, les lieux de culte et le droit de propriété, le nombre de crime dans le pays ne diminue pas, les mœurs se dégradent, les vices sont de plus en plus recherchés et pernicieux ? Que fait l’Église ? Où est son influence bénéfique ?
D’ailleurs, ces questions sont soulevées non seulement par des jeunes fonctionnaires, mais aussi par ce qui naguère cherchaient à détruire l’Église.
Ce n’est pas facile de reconstruire ce qui a été détruit. La renaissance est un long chemin. Nous n’en sommes qu’au tout début. Je ne cesse de répéter : pendant quarante ans, Moïse a erré dans le désert avec le peuple d’Israël libéré de la servitude égyptienne. Ils n’ont regagné la Terre promise qu’après la disparition de la vieille génération, formée au temps de l’esclavage. […]
Dans votre livre La vie dans l’Église, vous affirmez que les problèmes des jeunes tels que l’alcoolisme, les drogues, le tabac, le cynisme exigent des actions ordonnées de l’Église, de l’école et de l’État. Il ne faut pas laisser ces nouveaux fléaux de notre temps détruire les vies humaines, écrivez-vous. En conclusion vous déclarez qu’ « autrement la Russie n’aura pas d’avenir ». Cela sonne comme une sentence.
Ce n’est pas une sentence, mais une exhortation à l’action.
Il y a vingt ans, l’Église orthodoxe semblait d’ailleurs très vieillissante.
Oui. Quand j’étais récemment aux États-Unis, un journaliste m’a demandé : « On dit que votre Église est celle des babouchkas. Qu’y aura-t-il quand elles ne seront plus là ? « Je lui ai répondu : « Nos babouchkas sont éternelles ».
On disait autrefois que la Russie a été baptisée, mais pas évangélisée. Est-ce que cela a changé ?
Oui, c’est devenu pire. Des millions de personnes ont été baptisées dans notre pays au cours des deux dernières décennies. Mais elles n’ont pas été évangélisées. L’Église essaie par tous les moyens d’y remédier. Je suis convaincu que ces efforts porteront des fruits…
La traduction française est du hiéromoine Alexandre Siniakov.
Quelle est la différence entre un croyant et un athée ?
C’est une différence fondamentale. En s’approchant de sa tombe, le croyant est convaincu que la vie éternelle l’attend. L’athée est persuadé que sa vie se termine définitivement dans le cercueil. A partir de là, la vision du monde sera entre eux radicalement différente.
Que pensez-vous de la place que l’Église renaissante occupe aujourd’hui dans la vie de la société ? Quels sont les problèmes les plus importants ?
Ce que notre Église faisait il y a vingt ans et ce qu’elle fait maintenant, ce sont deux choses incomparables. Il y a deux décennies, nous étions témoins d’un mépris général envers le christianisme. C’était une approche arrogante, cynique et honteuse. Les églises et les âmes étaient traitées sans aucun respect. La plus grande partie du XXe siècle restera dans l’histoire de l’Église orthodoxe russe comme une page très noire. Mais, comme disait l’apôtre Paul dans la seconde épître à Timothée, on ne peut lier la foi. Même à des moments les plus tragiques, les hommes continuaient à participer aux sacrements de l’Église qui est toujours restée la même malgré les circonstances. Elle restera toujours la même. Aujourd’hui, l’orthodoxie renaît dans notre pays et personne ne craint les persécutions. Il n’y a plus de discrimination ou d’humiliation des prêtres et des fidèles. Des changements énormes se sont opérés dans la société. On le voit dans le diocèse de Moscou. Je ne citerai que les exemples les plus éloquents : au cours de ces vingt dernières années, nous avons construit 253 églises et 162 chapelles. Sans parler des lieux de culte restaurés. Aujourd’hui, notre diocèse compte 1271 églises. En 1988, il y en avait 132. Tout cela est l’œuvre de chrétiens enthousiastes, des fidèles serviteurs de l’Église, des amoureux de notre culture et de notre spiritualité. Cependant, cette dynamique de la construction de nouvelles églises, ainsi que la fin des persécutions soulèvent chez beaucoup de personnes des questions importantes. Comment se fait-il, s’interroge-t-on, qu’après avoir rendu à l’Église la liberté, les lieux de culte et le droit de propriété, le nombre de crime dans le pays ne diminue pas, les mœurs se dégradent, les vices sont de plus en plus recherchés et pernicieux ? Que fait l’Église ? Où est son influence bénéfique ?
D’ailleurs, ces questions sont soulevées non seulement par des jeunes fonctionnaires, mais aussi par ce qui naguère cherchaient à détruire l’Église.
Ce n’est pas facile de reconstruire ce qui a été détruit. La renaissance est un long chemin. Nous n’en sommes qu’au tout début. Je ne cesse de répéter : pendant quarante ans, Moïse a erré dans le désert avec le peuple d’Israël libéré de la servitude égyptienne. Ils n’ont regagné la Terre promise qu’après la disparition de la vieille génération, formée au temps de l’esclavage. […]
Dans votre livre La vie dans l’Église, vous affirmez que les problèmes des jeunes tels que l’alcoolisme, les drogues, le tabac, le cynisme exigent des actions ordonnées de l’Église, de l’école et de l’État. Il ne faut pas laisser ces nouveaux fléaux de notre temps détruire les vies humaines, écrivez-vous. En conclusion vous déclarez qu’ « autrement la Russie n’aura pas d’avenir ». Cela sonne comme une sentence.
Ce n’est pas une sentence, mais une exhortation à l’action.
Il y a vingt ans, l’Église orthodoxe semblait d’ailleurs très vieillissante.
Oui. Quand j’étais récemment aux États-Unis, un journaliste m’a demandé : « On dit que votre Église est celle des babouchkas. Qu’y aura-t-il quand elles ne seront plus là ? « Je lui ai répondu : « Nos babouchkas sont éternelles ».
On disait autrefois que la Russie a été baptisée, mais pas évangélisée. Est-ce que cela a changé ?
Oui, c’est devenu pire. Des millions de personnes ont été baptisées dans notre pays au cours des deux dernières décennies. Mais elles n’ont pas été évangélisées. L’Église essaie par tous les moyens d’y remédier. Je suis convaincu que ces efforts porteront des fruits…
La traduction française est du hiéromoine Alexandre Siniakov.